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    Tu te souviens de cette grosse affaire qu’y a eu lieu il y a plus de dix ans ?



    Pourquoi est-ce que c’est à elle que cela arrive ?

    Liu An’an serra ses bras autour d’elle, alors qu’elle était toujours recroquevillée à l’arrière du taxi, maintenue par la ceinture de sécurité. Ses yeux grand ouvert, qui écarquillés, étaient remplis de larmes qui pouvait à tout moment déborder, mais la peur les empêchait de couler. La voiture roulait vite. Elle n’osait pas saisir le volant — d’une part, par peur de provoquer la conductrice, et d’autre part, par crainte de provoquer un accident et de précipiter les deux dans une chute mortelle depuis le pont.

    Mais pourquoi cela devait-il lui arriver ? Liu An’an, agitée, mordit sa lèvre inférieure. Ses lèvres d’un rouge vif étaient marquées par l’empreinte de ses dents, d’un blanc cadavérique. Ce maudit pays sous-développé. Ses habitants, aussi stupides que des chiens, étaient incapables de produire autre chose que des rejetons prêts à se déchirer entre eux. Sa vie n’était-elle pas déjà assez misérable ? Elle voulait seulement échapper à son passé. Elle travaillait honnêtement, se démenait sans jamais se plaindre, avait arrêté de fumer et de boire, touchait un salaire misérable après des heures d’exploitation, survivant péniblement et discrètement dans cette grande ville — pourquoi cela devait-il lui arriver ? Était-ce parce qu’elle était revenue ? La malédiction de cette terre avait-elle fini par refaire surface ?

    La femme dit à Liu An’an : « N’aie pas peur, l’endroit où on va est à une heure de route seulement, de l’autre côté du comté, là où se trouve la gare. »

    Pleurer ne servirait à rien… Pensa Liu An’an. Si elle voulait simplement qu’elles meurent ensemble, elle aurait déjà tourné brusquement le volant pour causer un accident et en finir. Le fait qu’elle prenne tant de précautions et qu’elle ait même une destination en tête signifiait qu’elle devait avoir un motif. Et s’il y avait un motif, alors il restait peut-être une chance de s’en sortir.

    Elle observa attentivement les objets dans la voiture : c’était un taxi très ordinaire. Si elle devait noter quelque chose de particulier… Il était inhabituellement propre, avec une petite gourde accrochée au rétroviseur. Les gourdes symbolisaient la chance ; elles étaient des talismans de protection. Il semblait y avoir un petit carnet près de l’essuie-glace avant, que Liu An’an prit pour un permis de conduire.

    La femme portait une tenue propre et soignée, avec des gants blancs comme ceux qu’un chauffeur pourrait porter.

    Tout en conduisant, la femme jeta un coup d’œil à Liu An’an. « Tu n’as plus peur ? »

    Liu An’an tenta de répondre calmement : « J’ai peur… Vous allez me laisser rentrer chez moi ? »

    La femme ricana froidement : « Rentrer chez toi ? Quelle maison ? Ta famille n’est même pas venue te chercher. »

    Liu An’an força un sourire, serrant les dents : « Li-jie, j’ai vu que ton nom de famille est bien Li dans l’application de réservation, non ? Li-jie, il faut que tu te calmes. Si tu conduis, où pourrais-je m’enfuir ? Laisse-moi t’appeler jiejie. Essayons de rester calmes, sinon on risque de tomber du pont avant même d’arriver à destination. Li-jie, où m’emmènes-tu ? »

    La femme la fixa froidement, une lueur de moquerie dans le regard : « Arrête d’être curieuse. Ne joue pas avec des mots doux, je ne tomberai plus dans le piège. »

    Plus dans le piège ? Qu’entendait-elle par « plus » ?

    Sous le choc, Liu An’an s’exclama : « Li-jie, est-ce que tu me connais ? » Puis, prise d’une soudaine inquiétude, elle ajouta précipitamment : « Si je t’ai fait du mal par le passé… »

    La femme l’interrompit sèchement : « Arrête de jacasser. »

    Liu An’an n’osa plus parler et se contenta d’observer le profil de la femme en silence. Son nez, mince et étroit comme un tube de cuivre, et ses orbites profondément creusées, lui donnaient un visage menaçant. Elle lui semblait vaguement familière. Était-elle une tueuse en série ? Liu An’an regretta d’avoir pensé que cette femme serait facile à gérer en montant dans la voiture. Peut-être voulait-elle vraiment les tuer toutes les deux, ou peut-être pas…

    Plus Liu An’an y pensait, plus ses sanglots s’apaisaient. Enfin, elle cessa de pleurer. Elle regarda autour d’elle en silence, l’arrière de sa tête appuyée contre la vitre, espérant que la pluie, si elle tombait, pourrait réveiller son esprit à travers le verre froid. Enfonçant ses ongles dans ses paumes, elle prit une profonde inspiration, puis soupira lentement. « Li-jie… Si tu n’es pas prête à tout abandonner ainsi, peut-être que cette rencontre infortuite de ce soir est elle-même une sorte de destin malheureux… J’ai eu mon bac à 17 ans et j’ai quitté le comté pour aller à l’université. Après ma licence, j’ai fait un master, puis j’ai fini par rester là-bas pour travailler. En un clin d’œil, presque dix ans se sont écoulés. Je n’étais pas revenue depuis tout ce temps… Je me demande juste à quel point cet endroit a changé. »

    Liu An’an ne pouvait pas deviner les pensées exactes de la femme, mais elle sentait que celle-ci se détendait légèrement.

    La femme répondit d’un ton détaché : « Je ne sais pas quels changements il y a eu, je n’en suis pas sûre. »

    Liu An’an tenta de tisser un lien : « Li-jie, tu dois être une visiteuse alors ? »

    La femme éclata d’un rire glacial : « Je suis du coin. Une locale comme une étrangère ! Sans famille, sans racines — et sans attaches ! »

    Un frisson d’effroi parcourut Liu An’an ; elle craignait d’avoir touché un point sensible. Alors qu’elle s’en voulait déjà, la femme reprit, presque distraitement : « Pourquoi es-tu soudainement revenue ? »

    Quatre mots, « l’indemnisation pour une démolition », traversèrent brièvement l’esprit de Liu An’an, mais l’image sombre de la vieille maison ne fut qu’une vision fugitive. Elle choisit de se montrer vulnérable, laissant échapper un demi-soupir. « Même après toutes ces années, je vis encore comme si ma vie était recouverte de suie… Ai-je seulement la face* de revenir… »

    « Quoi ? Tu n’as pas eu une belle vie dans la grande ville ? »

    Les soupçons de Liu An’an se renforçaient : cette femme semblait vraiment la connaître. Pourtant, elle s’efforça de ne laisser paraître qu’un air abattu en surface.

    La femme resta silencieuse un instant avant de briser le calme en prononçant soudain le nom du lycée de Liu An’an. Sans hésiter, elle ajouta : « … Je te connais. J’ai vu ton nom et ta photo sur la liste des élèves brillants de l’école. Je me souviens de toi au lycée, il y a dix ans. À l’époque, l’école consacrait la moitié de sa cour à élever des cochons… La plupart des élèves disparaissaient après la demi-journée de cours pour aller voir les cochons. Tu es la première en dix ans à être entrée dans une université de premier rang, et pas des moindres. Humph… Petite fille talentueuse, major de promo… Alors, tu n’as vraiment pas eu une belle vie ? Ha… Tu n’as vraiment pas eu une belle vie ? »

    Liu An’an la scruta, tentant de deviner avec prudence : « Li-jie… Serais-tu… La mère d’un de mes anciens camarades de classe ? »

    Même si l’âge ne correspondait pas tout à fait et qu’elle semblait un peu trop jeune pour être une mère à l’époque, dans son village natal , il n’était pas rare de tomber enceinte au collège. Liu An’an ne comprenait juste pas quelle haine un parent de camarade pouvait lui vouer.

    Comme un monstre, la femme émit un rire froid et ne nia pas. Liu An’an rassembla précipitamment son courage et déversa toutes les injustices et difficultés qu’elle avait rencontrées durant ses années ou elle vivait dans la grande ville. Bien que ses paroles fussent motivées par le besoin de survivre, elles devinrent de plus en plus authentiques au fil de son récit. Liu An’an venait d’une petite ville. À part étudier, elle ne savait rien et n’avait pas d’argent. Elle devait travailler d’arrache-pied pour rattraper ses camarades, ne mangeant que des pousses de soja bouillies et du tofu avec des choux chinois comme accompagnements*. En une année, elle ne vivait qu’avec quelques vêtements, portés jusqu’à l’usure. Sans foyer pour le Nouvel An, elle travaillait d’arrache-pied, jour et nuit, méprisée et isolée. Minée par un complexe d’infériorité et refusant de se résigner, mais les obstacles se multipliaient. Tout ce qu’elle pouvait faire était de gagner sa vie seule jusqu’à aujourd’hui. Liu An’an évoqua même la pression qu’elle subissait : les 996 heures de travail, son salaire dérisoire, le poids de son emprunt immobilier et ce vernis à ongles rouge, symbole d’une vie qu’elle ne pouvait s’offrir…

    La femme l’écouta sans dire un mot. À la fin, elle déclara, indifférente : « La vie est dure pour tout le monde. »

    Voyant que la femme semblait s’attendrir, Liu An’an continua de parler avec émotion. Elle évoqua sa maison d’il y a dix ans, sa simplicité rustique. Dans son esprit, elle voyait encore les nombreuses routes en terre, les petites usines qui produisaient vêtements, chaînes, perruques et cordons d’acier.

    « Les petits endroits sont si bien, tout le monde se connaît, et personne n’est complètement un inconnu. Mais je pense que cet endroit a dû changer maintenant aussi… »

    Sans prévenir, la femme effectua un virage brusque, et Liu An’an poussa un cri, sa tête heurta violemment la vitre. Dans son étourdissement, elle entendit la voix de la femme : « … Je pense que les petits endroits ne sont pas si bien. Juste un groupe de gens, des gens sans cervelle, qui se déchirent comme des chiens. Et ils provoquent toujours les choses les plus dégoûtantes. Par exemple… Cette grande affaire d’il y a plus de dix ans, tu t’en souviens encore ? »

    L’esprit de Liu An’an bourdonna. Un frisson écœurant, semblable à un serpent venimeux glissant sur son corps, l’envahit comme une décharge électrique. Elle se sentait faiblir, ses doigts agrippant fermement la ceinture de sécurité. Même l’arrière de ses chevilles était terriblement tendu. Elle ne savait même pas où elle trouva la force de murmurer d’une voix faible et traînante. « … Est-ce que tu parles de l’Affaire de La Scie* ? »

    La femme répondit, avec une froideur dérangeante : « Nous, les locaux, préférons encore l’appeler l’Affaire du Matricide. »

    Liu An’an se redressa brusquement. « Le meurtrier a déjà été condamné à mort, que— »

    La femme gloussa étrangement. « C’est toi qui as mentionné cet affaire. Ce n’est pas de celle-là que je parlais… »

    La respiration de Liu An’an était saccadée, une vague de rancœur voila son regard. Elle serra encore plus les dents, son rouge à lèvres maculant ses dents, laissant une trace de rouge sombre désordonné. « Alors… Que veux-tu dire ? »

    « C’était une affaire d’il y a de très, très nombreuses années. Très longtemps, non ? » répondit la femme, « Une affaire mineure. »

    « Deux chauffeurs de bus allaient transporter des marchandises, dans un endroit misérable et reculé et ils se sont disputés puis l’un d’eux a poignardé l’autre à mort. C’était sur le coup. Il a sorti le couteau et tchack ! Ce chauffeur meurtrier s’est suicidé, craignant d’être condamné, abandonnant sa femme et sa fille. Les deux gamines ne pouvaient plus subvenir à leurs besoins. Quant à celui qui a été tué, c’était encore plus pitoyable : sa femme s’était enfuie avec quelqu’un depuis longtemps, il n’avait même pas De proches. Il ne lui restait que sa fille, si jeune qu’il était quasi impossible pour elle d’obtenir des allocations. Alors, la femme du chauffeur qui s’était suicidé a eu une idée. Elle a adopté cette petite fille et l’a élevée avec sa propre fille. Comme ça, elle pouvait gérer l’indemnité de la petite. Dans ce trou maudit, elle a pris soin d’elle… Hein… Dis-moi, cette jeune fille n’est-elle pas pitoyable ? »

    La méchanceté brillait encore dans le regard de Liu An’an. Elle esquissa un sourire. « Li-jie, puisque tu me connais, tu dois aussi connaître toute mon histoire, est-il vraiment nécessaire de me frapper là où ça fait mal ? »

    La femme semblait sourire, sans pour autant l’être vraiment. « Grande fille talentueuse, je suis contente pour toi. Tu n’as ni père ni mère, et tu as été élevée par la famille de l’homme qui a tué ton père, mais tu as quand même réussi dans la vie, tu es une battante, n’est-ce pas ? »

    Liu An’an resta silencieuse un moment.

    Elle se souvenait de l’époque où elle était encore, très jeune, quand elle passait ses journées à regarder la télévision dans la chambre de son père. Son père disait que sa mère était partie, puis il la serrait dans ses bras, la piquant au visage avec sa barbe, lui promettant : « Papa ne t’abandonnera jamais. »

    Menteur, pensa Liu An’an.

    À six ans, elle ramassait des cailloux et jouait à la marelle quand quelques hommes en grands chapeaux vinrent la voir. « Ton père est mort. » Les policiers à la télévision semblaient toujours aimables et justes. Mais ceux qui vinrent chez elle s’éventaient d’un air agacé, tout en lui disant : « … Il gisait dans ce coin de forêt, près des champs de la famille Li… Ça faisait plusieurs jours… Et avec cette chaleur… Ça commençait à sentir…  » Liu An’an tapa du pied dans sa pantoufle en plastique rose. Les pantoufles avaient chacune un petit lapin blanc aux yeux rouges. Elle regarda les policiers retirer le drap blanc. Une énorme entaille, rouge-noir sur rouge-noir, comme les yeux d’un lapin, avec une mouche collée sur le front de son père.

    Liu An’an dit : « Li-jie, ne parlons plus de ces choses du passé. »

    La femme répondit : « Oh, mais à part ces choses du passé, de quoi pourrais-je parler ? Je suis sortie il y a moins d’un an, tu sais. »


    Toutes les affaires de cette histoire sont fictives. S’il y a des incohérences, c’est uniquement pour les besoins du récit, ne les considérez pas comme réelles.

    Yi Shan Gou Yue

    ・.ʚ Voilà la fin du chapitre ɞ .・

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