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Chapitre 08 – Le premier jour
by Ruyi ♡[PDV De PORSCHE]
J’ai passé un bon moment à me lamenter sur la perte tragique de ma liberté avant de finalement m’approcher de l’immense portail doré. Le garde vérifia mon nom dans le registre avant de m’indiquer le garage des employés, qui était situé le long du périmètre de la propriété. Je poussai un soupir las en voyant tous ces hommes en costume noir impeccablement ajusté disséminés par-ci et là sur le terrain. Je me mis alors à réfléchir à la nature des affaires de la famille de Kinn. Pourquoi avaient-ils besoin d’une petite armée de gardes du corps ? C’était, pour le dire gentiment, un peu excessif.
Être le seul type en uniforme d’université au milieu de toute cette marée noire me faisait ressortir comme un furoncle au milieu du visage. Je les regardai brièvement du coin de l’œil, feignant l’indifférence face à leur hostilité manifeste, puis me dirigeai vers le bâtiment principal.
« Ah, vous voilà enfin, » m’accueillit P’Chan lorsque j’entrai. Tenant une liasse de documents dans une main et une tasse de café fumant dans l’autre, il inclina la tête et me fit signe de le suivre dans l’une des pièces. Je regardai autour de moi avec prudence, encore en train de m’adapter à l’ambiance dérangeante du lieu.
« Entrez. »
Je le suivis dans ce qui semblait être une salle de réunion, équipée d’un alignement méticuleux de bureaux, de chaises et d’un projecteur.
« Comportez-vous convenablement avec votre supérieur, » me rappela P’Chan tout en arrangeant des boîtes sur le bureau.
« Bonjour… Monsieur, » dis-je en joignant les paumes et en m’inclinant* légèrement. J’avais complètement oublié comment me comporter dans ce genre de contexte ; j’étais mort de trouille, et je n’étais pas du tout habitué à ce genre d’environnement professionnel.
(N/T : Le wai est un geste traditionnel thaïlandais : paumes jointes et légère inclinaison de la tête. Il sert à saluer, remercier ou montrer du respect, surtout envers les aînés ou les figures d’autorité.)
« Alors… Vous vous êtes battu avec Big hier ? » demanda P’Chan.
« C’est lui qui a commencé, » répondis-je honnêtement.
« Essayez d’éviter les ennuis, d’accord ? Contentez-vous de suivre le mouvement. N’énervez pas M. Kinn. »
Je fronçai les sourcils à ces mots. Kinn était-il une sorte de dieu tout-puissant qu’on ne devait surtout pas contrarier ?
« Asseyez-vous, » dit l’homme plus âgé en voyant que je ne réagissais pas, me désignant une chaise. « Voici vos couteaux et vos armes à feu. Vous devez les porter quand vous accompagnez M. Kinn. Vous savez utiliser une arme, n’est-ce pas ? »
J’acquiesçai. Dans ma jeunesse, j’adorais les pistolets-jouets. Tirer était vite devenu mon passe-temps favori, avec le judo.
« Parfait… N’oubliez pas, vous devez protéger M. Kinn à tout prix, » dit P’Chan en faisant glisser vers moi la boîte noire contenant les armes.
« Je vais aller en prison si je tue quelqu’un sans le vouloir ? » demandai-je franchement. Il venait de me remettre une arme comme s’il s’agissait d’un bonbon. Je voulais savoir si Kinn me couvrirait en cas de bavure.
« Tout ce que fait cette famille est au-dessus des lois, » répondit P’Chan.
Cela voulait-il dire que M. Korn avait les flics dans sa poche ? Merde, ce type ne rigolait pas. Je voulais vraiment savoir ce qu’il faisait dans la vie. Devenir comme lui un jour semblait un objectif plutôt intéressant.
« Vous pourriez me dire exactement de qui je suis censé protéger Kinn ? » demandai-je.
« De tous ceux qui veulent lui nuire… »
Eh bien, ça doit m’inclure aussi, pensai-je en ricanant intérieurement.
« Il y a beaucoup de personnes qui représentent un danger pour M. Kinn — ceux qui lui doivent de l’argent, ses rivaux… Même ses partenaires commerciaux, » continua P’Chan, lisant tranquillement son document tout en sirotant son café.
À ce moment-là, je me surpris à m’intéresser sincèrement à la famille de Kinn. Pourquoi avaient-ils besoin d’une telle sécurité ? Ils n’avaient pas l’air très nets — les citoyens honnêtes n’ont normalement pas autant d’ennemis prêts à les descendre.
« La famille de M. Korn contrôle plusieurs secteurs : casinos, prêts d’argent, trafic d’armes, et gestion portuaire, » expliqua P’Chan, comme s’il avait lu dans mes pensées. Quel monsieur je-sais-tout, pensai-je… Avant de me demander s’il pouvait lire ça aussi.
« Arrêtez de me fixer, » dit P’Chan. « M. Kinn est rentré de l’université. Vous devriez aller le rejoindre. »
À contrecœur, j’hochai la tête et me levai, prenant l’étui d’armes avec moi.
« Au fait, c’est où sa chambre à ce mec ? » demandai-je en sortant. En guise de réponse, je me pris un regard sévère.
« M. Kinn n’est pas votre ami, » rétorqua fermement P’Chan.
Je levai les yeux au ciel face à sa réponse pédante. P’Chan se comportait comme si Kinn était un prince et que nous étions ses humbles serviteurs voués à vénérer le sol qu’il foulait. Ils se rendaient compte que l’esclavage avait été aboli en Thaïlande depuis plus d’un siècle, non ?
« Alors, où dois-je aller ? » répétai-je, prenant soin de ne pas mentionner Kinn cette fois.
« Deuxième étage, dernière porte à gauche. Et que ce soit bien clair : si tu t’avises de faire le moindre coup tordu — ou même si tu songes à le trahir — sache que la sanction sera la mort ! »
Je savais qu’il essayait juste de m’intimider, mais je n’en étais pas moins un peu tendu. Ces gens n’avaient aucune compassion ; ils traitaient les autres comme de simples pions dans une partie d’échecs. P’Chan, en particulier, était incroyablement stoïque, comme si les émotions lui étaient complètement étrangères.
Je suivis les indications de P’Chan, l’étui d’armes à la main. Les autres gardes du corps me lancèrent des regards désapprobateurs au passage, mais je les ignorai. J’arrivai devant une pièce qui me semblait étrangement familière, comme si j’y avais mis les pieds la veille. Un garde, assis sur un canapé devant la chambre de Kinn, leva les yeux vers moi lorsque je m’arrêtai devant lui.
« Ah, te voilà. M. Kinn veut te voir, » dit-il.
Je lançai un regard sarcastique aux trois ou quatre hommes postés devant la chambre de Kinn, trouvant leur présence quelque peu excessive. Bordel, on se serait cru sur une scène de Likay* en pleine effervescence. Il y avait quelque chose de franchement comique là-dedans. J’avais le sentiment que les choses allaient devenir intéressantes.
(N/T : Le Likay (ลิเก, prononcé « Liké ») est une forme de théâtre populaire thaïlandais, proche du musical ou de l’opéra. Coloré, chanté et dansé, il est souvent joué sur scène ouverte lors de fêtes de temples ou d’événements locaux.)
Alors que je tendais la main vers la poignée, le même garde m’arrêta brusquement : « Aucune arme n’est autorisée dans la chambre de M. Kinn ! »
Je levai les yeux au ciel avec lassitude, me demandant si quelqu’un d’autre trouvait ces règles aussi absurdes que moi.
« Très bien, je vais aller la ranger, » dis-je en reculant, m’apprêtant à aller la déposer dans ma chambre. Mais il m’arrêta à nouveau.
« Attends ! Laisse-la ici. Ne fais pas attendre M. Kinn. »
Soupirant bruyamment, je posai la boîte au sol, à côté de la porte, puis j’entrai dans la chambre de Kinn.
Je m’arrêtai un instant, et observai les personnes présentes. Ma présence sembla interrompre net leur conversation animée.
« Tu ne sais pas frapper à la porte ? »
Je reconnus immédiatement la voix. Son expression passa de joyeuse à renfrognée en un éclair. Ça me faisait bizarre de voir Kinn dans son uniforme universitaire ; j’étais habitué à le voir toujours habillé en noir, comme s’il portait un deuil permanent.
Toc, toc.
Je frappai deux coups, histoire de le provoquer un peu.
« Maintenant je sais, » répondis-je. Je jetai un coup d’œil aux autres hommes dans la pièce. Ils portaient le même uniforme universitaire, j’en déduisis donc qu’ils devaient être les amis de Kinn. Ils me regardaient avec incompréhension.
« C’est qui, ce mec ? » demanda l’un d’eux à Kinn.
« Mon nouveau garde du corps, » répondit-il d’un ton nonchalant, sans me quitter des yeux.
« Quoi ? » rétorquai-je, les bras croisés sur la poitrine, le regard noir.
« T’es sûr que c’est ton garde du corps et pas ton père ? » lança son pote avec un ricanement. Visiblement, ça fit froncer encore plus les sourcils de Kinn.
« Va me chercher de quoi boire, » ordonna-t-il.
L’ordre soudain de Kinn me laissa sans voix. Je le fixai, le visage vide, ne comprenant pas tout de suite ce qu’il me demandait.
« De quoi boire ? Quelle boisson ? » demandai-je.
« Il a l’air paumé, » souffla l’un de ses amis, assez fort pour que je l’entende.
« Va me chercher quelque chose à boire, en bas ! » répéta Kinn, d’un ton plus autoritaire. Je fronçai les sourcils. Pourquoi devais-je aller lui chercher à boire ? Je n’étais pas son putain de larbin !
« Je ne suis pas ton majordome ! » lâchai-je, ce qui provoqua des regards stupéfaits chez ses amis.
« Putain ! Celui-là, il a du cran, » s’exclama l’un d’eux.
« Porsche ! Qu’est-ce que je t’ai dit ? ! » hurla Kinn. Tout le monde sursauta à sa voix, sauf moi. Je pris une profonde inspiration pour essayer de calmer la colère qui montait.
« Descends tout de suite me chercher à boire ! » ordonna-t-il encore.
« Si tu veux quelque chose, va le chercher toi-même ! » répliquai-je, d’une voix froide.
« Porsche ! » Kinn bondit du canapé et fut sur moi en une seconde. Sa main agrippa violemment mon bras, me tirant vers lui avant même que je puisse réagir. La force de sa poigne trahissait une colère noire.
« Tu veux remettre mon autorité en question ? ! » grogna-t-il entre ses dents, son regard redevenu aussi tranchant et dangereux que l’autre jour. Je le repoussai brutalement, et il me lâcha.
« Très bien ! » grondai-je avant de sortir de la pièce en claquant presque des pieds. Est-ce que quelqu’un s’était déjà opposé à Kinn ? Ou était-il juste pourri gâté ? J’avais hâte de voir quelqu’un le remettre à sa place !
Et comment étais-je censé savoir où trouver ses putains de boissons ? ! Je n’avais aucune idée d’où se trouvait la cuisine. Cette maison gigantesque ressemblait carrément à un palais.
Les gardes que je croisai n’étaient pas franchement du genre chaleureux ou serviable. Leur expression était toujours fermée et sinistre. À chaque fois que je croisais leur regard, je recevais un regard assassin en retour. Alors que je descendais les escaliers, je tournai la tête, scrutant les environs pour tenter de deviner où se trouvait la cuisine.
« Tu cherches quelque chose ? » demanda un homme en costume noir, d’un ton neutre.
« La cuisine, » répondis-je.
« Par là, puis à gauche », dit-il en me désignant la direction d’un geste de la main. Je m’éloignai sans me retourner pour voir sa réaction, l’agacement au bord de l’explosion.
La cuisine était exactement là où il avait dit. Quatre servantes s’y affairaient, jusqu’à ce que l’une d’elles me remarque.
« Que puis-je faire pour vous, monsieur ? » demanda-t-elle.
Je pris une profonde inspiration, essayant de calmer ma frustration avant de répondre poliment : « Des rafraîchissements… S’il vous plaît ? » Cette femme était bien plus âgée que moi, je devais lui parler avec respect. Je n’avais pas envie de la froisser.
La vieille dame me regarda de la tête aux pieds avant de dire : « Vous êtes un ami de M. Kinn ou de M. Kim ? » Son ton était courtois, et elle arborait un sourire chaleureux.
« Non… Je suis… Enfin », me repris-je rapidement, « je suis le nouveau garde du corps de M. Kinn. »
La domestique me détailla à nouveau du regard. « Oh, le nouveau garde du corps de M. Kinn ? » demanda-t-elle avec curiosité. « Pourquoi vous n’avez pas encore mis votre costume ? »
Je soupirai. « Je suis juste là pour chercher ses rafraîchissements, madame. » Je répétai ma demande, détournant volontairement la question.
« Très bien, donnez-moi une minute. Est-ce que les amis de M. Kinn sont là aussi ? »
J’acquiesçai d’un hochement de tête. Elle revint avec un plateau chargé de biscuits et de thé.
« Au fait, cette assiette est pour M. Tay. Dites-lui que je l’ai préparée spécialement pour lui », ajouta-t-elle.
Je roulai des yeux, me demandant pourquoi elle n’apportait pas elle-même ce plateau à l’étage. Je pestai intérieurement en remontant avec le plateau lourd dans les bras, songeant à cracher dans le thé de Kinn. J’avais envie de lui faire payer son arrogance, mais ce n’était qu’un fantasme pour me distraire. Avec tous ces gardes qui patrouillaient dans le coin, je serais immédiatement repéré. Ils m’auraient tiré une balle dans le ventre sans la moindre hésitation.
« Vous pouvez ouvrir la porte ? » demandai-je aux hommes assis devant la chambre de Kinn à mon retour, espérant qu’ils m’aideraient à entrer. Tous firent mine de ne pas m’entendre, absorbés par leurs magazines.
« Hé ! » insistai-je. Toujours aucune réponse. Très bien ! Je me baissai pour poser le plateau au sol afin d’ouvrir la porte, mais l’un d’eux s’écria :
« Qu’est-ce que vous faites ? ! »
« J’ouvre une porte », répondis-je d’un ton sarcastique.
« Vous pouvez pas poser la nourriture de M. Kinn par terre ! »
Bon sang ! Kinn était un roi ou quoi ? J’allais la poser par terre, et j’aurais même déplacé le plateau avec mon pied ! Je me redressai avec le plateau en main pendant qu’un des gardes, maugréant, frappait à la porte avant de m’ouvrir. Apparemment, ces chiens avaient quand même un semblant de savoir-vivre.
Je vis Kinn et sa bande absorbés par une discussion sur un exposé universitaire et décidai de m’incruster directement dans leur cercle. Je balançai négligemment le plateau sur la table, les tasses tremblant sous l’impact. Le thé déborda légèrement. Les amis de Kinn se dépêchèrent de retirer leurs papiers et attrapèrent des mouchoirs. Tous me dévisageaient, stupéfaits.
« Merde ! Ça a éclaboussé notre exposé ? » demanda l’un des membres de la bande.
Je soufflai. Comment leur exposé aurait-il pu être touché alors que tout était resté sur le plateau ?
« Porsche ! » siffla Kinn d’une voix basse, les yeux chargés de colère. Je le regardai du coin de l’œil, tentant de rester indifférent.
« Allez, laisse tomber », intervint un autre de ses amis, le forçant à se rasseoir en appuyant sur son épaule. Un léger sourire s’étira sur mes lèvres en le voyant fermer les yeux, essayant visiblement de contenir sa rage. Je commençai à sortir de la pièce, pensant avoir terminé ma mission, mais la voix de Kinn m’arrêta :
« Qui t’a autorisé à partir ? »
Je me retournai pour le fusiller du regard.
« Quoi encore ? » grognai-je.
« J’veux un café », ordonna-t-il.
Je soupirai pour la millième fois, me demandant pourquoi il ne m’avait pas tout simplement demandé ça dès le départ. J’étais prête à redescendre à la cuisine.
« Tu vas où comme ça ? T’as pas entendu ce que j’ai dit ? »
« J’ai très bien entendu », répondis-je en me tournant vers lui. « J’allais chercher ton café, Votre Altesse. »
« La machine est là-bas », dit-il en désignant un coin de la pièce où trônait une machine sophistiquée, entourée de tasses. Putain… Ce riche de merde avait sa propre machine à café. Cette famille ne manquait vraiment de rien : tout leur était servi sur un plateau.
Je me dirigeai vers le comptoir, fixant bêtement la machine dernier cri aux innombrables boutons—totalement paumé sur son fonctionnement.
« J’veux un americano bien chaud », ajouta Kinn d’un ton morne.
Putain… Comment j’étais censé faire un americano alors que je savais même pas comment allumer cette merde ?
« Un café le soir… Quel enfer », marmonnai-je entre mes dents en essayant les boutons « ON/OFF » et « START ». Je restai planté là, aucun signe de café. Me demandant s’il fallait en appuyer d’autres, j’essayai le bouton rouge marqué « HOT ». Rien. J’en essayai un autre, avec une tasse dessinée dessus—toujours rien. Peut-être que cette machine fonctionnait comme une bouilloire, et qu’il fallait attendre que l’eau chauffe avant de la verser sur le café…
Je restai un moment devant, pensant qu’elle chauffait. Malgré son look futuriste, cette machine n’était rien d’autre qu’une bouilloire électrique.
En attendant, je pris le temps d’observer la pièce. L’aménagement intérieur reflétait l’élégance du reste de la maison. La couleur dominante était le brun. Un lustre trônait au plafond. Il y avait un grand bureau de travail, une bibliothèque contre le mur et un canapé noir au centre. Un vase contenait une gerbe de brindilles sèches, longues et moches.
Une autre pièce attenante, de la taille d’un petit bureau, était visible derrière une porte vitrée, bien que des rideaux noirs en bloquait la vue. Je n’arrivais pas à deviner à quoi elle servait, mais ce n’était clairement pas une salle de bain. Une chambre, peut-être ? Je fronçai les lèvres avec un rictus amer, envieux du luxe indécent de cette famille.
La chambre de Kinn était vraiment bien aménagée, digne d’une suite de condo de luxe. Mais la déco dégageait une ambiance mature et terne, à l’image de son propriétaire…
« Ça sent le brulé, non ? » lança quelqu’un.
« Ouais… On dirait du métal cramé. »
Je sentais aussi cette odeur, réalisai-je. Je regardai dans leur direction tout en cherchant la source de cette puanteur âcre. Quelqu’un essayait de foutre le feu à cet endroit ? Vu le nombre d’ennemis qu’ils avaient, c’était plausible.
« Porsche ! » cria Kinn en se précipitant vers moi, paniqué.
« Quoi ? »
« La putain de machine à café est en feu ! »
Je tournai la tête vers l’appareil au moment où un nuage de fumée noire s’en échappait. J’avais cru que c’était de la vapeur. Je restai figé, la bouche entrouverte, complètement paumé. Une étincelle jaillit à l’arrière de la machine. J’étais foutu !
« Merde, reste pas planté là ! Coupe le courant ! » aboya Kinn en fonçant hors de la pièce pour prévenir les autres gardes du corps d’aller couper le disjoncteur principal.
Où était cet interrupteur ? La fumée était si dense que j’y voyais rien du tout.
« Où est ce foutu interrupteur ? ! » Je fouillais partout en tentant d’écarter la fumée de la main. Les trois amis de Kinn étaient tout aussi paniqués, courant dans tous les sens et hurlant dans le chaos.
« Kof… Kof… »
« Time, va voir s’ils vont bien ! » hurla Kinn. « Et toi ! T’as trouvé l’interrupteur ? ! »
Putain, tu crois pas que je flippe autant que toi ? ! Je toussai si violemment que je crus m’étouffer. Impossible de voir quel morceau de cette foutue machine foutait tout ce bordel.
« Il est où cet enfoiré d’interrupteur ? ! » gueulai-je en retour.
« Merde ! Attention ! » cria Kinn.
BOOM !
J’entendis Kinn hurler juste avant l’explosion. Je fus violemment plaqué au sol, protégé par le corps de Kinn. Puis, toute l’électricité de la maison sauta.
« M. Kinn, vous allez bien ? » demanda un des gardes en se précipitant dans la pièce.
« Le disjoncteur a été coupé, » annonça un autre.
Kinn poussa un soupir de soulagement et laissa un garde l’aider à se relever et à le conduire jusqu’au canapé. Moi, je restai assis au sol, complètement sonné. Tout s’était passé si vite que je n’avais pas eu le temps de réagir.
« Kinn, ça va ? » demandèrent ses amis en revenant, suivis d’autres gardes qui ouvrirent toutes les fenêtres et les portes pour évacuer la fumée.
« Bouge-toi au lieu de rester assis comme un con ! On aurait bien besoin d’un coup de main ! » me lança quelqu’un, furax.
Je soufflai. Tu crois pas que j’suis en état de choc, connard ? ! Mais bon, je me levai quand même et allai aider à dissiper la fumée pendant que les autres débranchaient la machine défectueuse et l’emportaient.
J’y suis pour rien, bordel ! C’est Kinn qui m’a ordonné de faire ce putain de café !
Quand tout fut enfin calme, Kinn m’appela.
Il me jeta un regard noir, les yeux pleins d’une rage glaciale. Ses amis étaient partis, ne restaient plus que moi et une ligne de gardes du corps derrière moi.
« T’essayais de foutre le feu à ma baraque ? » demanda Kinn d’un ton aussi tranchant que son regard.
« C’était pas mon intention, » répondis-je sincèrement.
« Heureusement qu’il y a un système d’arrêt d’urgence ici. Sinon, tout aurait cramé, » se plaignit un des gardes, visiblement en rogne.
Ta gueule. C’est déjà suffisant que Kinn me gueule dessus, pas besoin que tu t’y mettes aussi !
« T’es aveugle ou quoi ? T’as pas vu qu’y avait pas d’eau dans la machine ? » continua Kinn en me fusillant du regard.
« J’savais pas. J’sais pas comment ça marche, ce truc, » répliquai-je.
Apparemment, appuyer sur le bouton « HOT » sans eau faisait surchauffer la résistance, qui finissait par exploser.
« Pourquoi t’as rien dit ? » insista-t-il.
Je roulai des yeux. J’avais rien dit parce que j’pensais que ça marchait comme une bouilloire normale, merde ! Je gardai un air neutre, décidé à ne pas argumenter. Pourquoi ma première journée doit déjà être aussi merdique ?
« T’aurais dû demander. Fais pas le malin quand tu captes rien à ce que tu fous ! » jura-t-il.
« Va te faire foutre ! J’suis ton garde du corps, pas ton majordome. Si tu veux quelqu’un pour te faire ton café, t’as qu’à embaucher un putain de barista, » crachai-je, incapable de me retenir. Les mains sur les hanches, je le fixai, provocateur.
« Porsche ! » hurla Kinn en abattant son poing sur la table en verre, dans un bruit strident, faisant sursauter tous les gardes du corps. Il me pointa du doigt, menaçant. « J’ai été clair sur qui j’étais et qui t’étais. Reste à ta place, et t’avise plus jamais de me manquer de respect ! »
Je le regardai, sans dire un mot.
« C’est ton dernier avertissement. Si tu me fais encore chier, tu verras ce qui t’attend ! »
Je le fixai avec dédain à son ordre plein d’arrogance, ce qui lui valut de froncer encore plus les sourcils.
Toc toc !
On fut interrompus par un coup frappé à la porte, puis l’entrée d’un des gardes.
« M. Peem est là, » annonça-t-il en s’écartant pour laisser entrer un bel homme dans la vingtaine. Le mec sourit poliment à Kinn avant de s’installer à ses côtés. Apparemment, Kinn recevait encore du monde.
« Vous pouvez tous disposer, » déclara Kinn.
Enfin ! Ça fait une éternité que je veux me casser d’ici. Je fis volte-face et me dirigeai direct vers la porte, plus vite que tous les autres gardes. Malheureusement, je dus m’arrêter net quand Kinn m’appela soudain :
« Porsche, attends ! »
Qu’est-ce qu’il me veut encore, celui-là ? !
« Kom, file-lui les clés, » dit-il à un type que je supposai être Kom, avant de se tourner vers moi. « Tu sais conduire, hein ? »
Je hochai la tête avec mépris.
« Ramène M. Peem chez lui à deux heures du matin, » continua Kinn. « T’es libre d’ici là. »
Son ordre me laissa plein de questions. Pourquoi moi ? Et pourquoi à deux heures du mat’ ? Si son pote comptait rester aussi tard, il ferait mieux de dormir ici.
Kom me tendit une clé avec le logo d’une voiture de luxe.
« Où ça ? » demandai-je, ne sachant même pas où j’étais censé le déposer.
Kinn, visiblement lassé de moi, me montra l’adresse sur son téléphone.
« OK, » dis-je en lui rendant l’écran et je quittai la pièce sans me retourner.
J’avais remarqué que les gardes du corps de Kinn n’étaient pas très enclins à me parler. Peut-être parce que j’avais botté le cul de leur supérieur hier. En y repensant, je ne l’avais même pas vu aujourd’hui. Est-ce que je l’avais vraiment mis K.O. ?
Sans plan précis en tête, j’empruntai un couloir faiblement éclairé à la recherche d’un coin pour fumer. Je me rappelai avoir vu d’autres gardes fumer près du jardin quand j’étais arrivé, alors c’est là que je décidai d’aller.
« Hé… »
Me lança un mec, qui était en train de fumer. Je le reconnus, c’était celui qui m’avait indiqué la cuisine plus tôt. Je lui fis un petit signe de tête en sortant un paquet de clopes de ma poche arrière. J’en sortis une, l’allumai et fumai en silence.
« Premier jour ? » me demanda-t-il avec un sourire. C’était probablement le premier sourire non hostile que je recevais dans cette maison.
« Mh-mh, » répondis-je avec un petit grognement.
« Moi c’est Pete*. »
(Note de Ruyi : Peteeeeeee ! ! ! ☆ ~(’▽^人) )
« Porsche. »
« Classe, ton prénom ! Mais pourquoi cette tête ? » Il s’alluma une autre cigarette tout en poursuivant la conversation.
« J’suis crevé, » répondis-je honnêtement.
« Comment ça ? J’ai entendu dire que t’étais le garde du corps de M. Kinn. T’as un job facile, normalement. » Il souffla un nuage de fumée.
Facile, mon cul ! J’avais pas eu une seule seconde pour respirer depuis que j’étais arrivé, et il était déjà minuit.
« Qu’est-ce que tu veux dire par « facile » ? » lui demandai-je.
« M. Kinn a l’air strict, mais c’est le plus simple à servir, » dit Pete avec un sourire.
« Tu te fous de moi ? » grognai-je en le regardant d’un œil méfiant.
« Hah ! Me regarde pas comme ça. Fais-moi confiance, t’as de la chance, » insista-t-il.
« Et toi, tu bosses pour qui ? »
« M. Tankhun, » répondit Pete en poussant un long soupir.
Je me rappelai avoir rencontré M. Tankhun hier. Il m’avait semblé plutôt sympa. « Pourquoi cette tête alors ? » Je retournai sa question contre lui.
« Les trois fils de cette famille sont tous différents. Surtout M. Tankhun – il est très exigeant. Son humeur est tellement imprévisible que j’ai mal à la tête tous les jours. Mais il reste mieux que M. Kim. »
M. Kim ?
« Qui ? »
« M. Kim ! Le plus jeune fils de Boss Korn ! Enfin, c’est pas surprenant que tu le connaisses pas si t’es là que depuis aujourd’hui. Et puis, il est presque jamais à la maison. C’est comme s’il avait disparu, » dit Pete avec une pointe d’humour.
« Qu’est-ce que tu veux dire ? »
« M. Kim a traumatisé tout le monde. Il supporte pas qu’on le suive, il veut pas rentrer chez lui. Il manipule ses gardes, fout la merde… » expliqua Pete. « P’Nont est crevé à force de s’occuper de lui. Et c’est lui que Boss Korn engueule dès qu’il se passe un truc avec M. Kim… Ah, P’Nont, c’est le chef des gardes de M. Kim. »
Pfff… Tellement de noms à retenir. Mais rencontrer Pete m’avait fait du bien. Il avait un air amical, un peu comme Tem et Jom. Au moins, ma vie ici serait pas totalement déprimante.
« M. Kinn est le plus raisonnable des trois. Tout le monde veut bosser pour lui. »
Je pouffai aussitôt. Kinn ? Raisonnable ? Autant dire qu’un buffle pouvait mettre bas un chien.
« J’y crois pas une seconde, » dis-je.
« Au fait, pourquoi t’as pas de costume ? » demanda Pete en détaillant ma tenue.
« J’ai eu la flemme de me changer, » répondis-je, pas du tout motivé à me justifier.
« Tu vois ? Si je portais ça devant M. Tankhun, il me gueulerait dessus. »
Zzzzt !
Un bourdonnement surgit de nulle part. Pete soupira et attrapa son talkie-walkie. « Écoute ça, » dit-il.
« Hé, Pete ! T’es où bordel ? Ramène-toi tout de suite ! » cria une voix à travers l’appareil.
Pete écrasa sa clope au sol, l’air épuisé.
« T’as un talkie ? » demandai-je.
« Ouais. M. Tankhun en a filé un à tous ses gardes, et il nous appelle non-stop ! Bref, faut que j’aille regarder une émission avec lui. »
Je voulus lui répondre, mais il fila dans la maison avant même que je puisse demander ce qu’il entendait par « regarder une émission ». Au moins, j’avais croisé quelqu’un de sympa ici, même si on bossait pas pour le même mec. Et il semblait avoir à peu près mon âge, c’était rassurant.
Puis je me rendis compte que j’avais oublié de lui demander où étaient les chiottes. Cette baraque était immense – j’avais envie de pisser, mais je voulais pas retourner jusqu’à ma chambre.
« Porsche ! M. Kinn veut te voir ! » dit un des gardes de Kinn, visiblement agacé en me trouvant.
J’étais énervé. Ce connard arrêtait pas de me convoquer. Et moi, j’avais super envie de pisser. Fais chier ! J’étais coincé. Retourner dans ma chambre prendrait trop de temps, et le garde s’était déjà barré avant même que je puisse lui demander où étaient les toilettes.
Argh ! Je scrutai les environs, priant pour trouver un coin où me soulager. J’avais rien utilisé depuis mon arrivée. Personne m’avait expliqué quoi que ce soit. Pas d’orientation, pas de plan, que dalle.
J’avais pas d’autre choix. J’avais pas envie d’être en retard et de me faire encore engueuler par Kinn. Je devais me débrouiller. Je m’approchai du mur tout au fond du jardin.
Il faisait assez sombre, avec plein d’arbres qui masquaient la vue. Y’avait une mare trouble qui semblait être un genre de fosse septique. La situation devenait urgente… De toute façon, un mec s’en fout un peu d’où il pisse, et ce coin était limite à la frontière de la propriété – ça gênerait personne, non ?
Je baissai mon pantalon, me soulageai aussi vite que possible, puis courus vers la maison.
Un des gardes me bloqua juste avant que je pousse la porte. « Pas la peine d’entrer. »
Je me retournai. Il me tendait une pile de papiers. « Quoi ? » demandai-je.
« Tu dois les trier selon la table des matières. Ensuite, vérifie l’emploi du temps de M. Kinn. S’il y a des documents sur son bureau, c’est à toi de les identifier. Ce sont des détails cruciaux que tu dois gérer, » dit-il. « En plus, tu dois t’assurer que son travail soit bien organisé et précis. Et t’es censé prendre des notes pour lui quand il gère ses affaires. »
Je pris les papiers avec une tête choquée.
« Pourquoi c’est à moi de faire ça ? »
« T’as voulu être son garde du corps principal, non ? Ben c’est ta responsabilité, » répondit-il en s’asseyant sur le canapé.
Je regardai les feuilles dans mes mains avec mépris. Depuis que j’étais arrivé, j’avais pas fait une seule chose que j’avais imaginée. Mes tâches étaient débiles et complètement inutiles !
Je m’assis sur le canapé en face. Y’avait déjà un mec dessus, mais dès que mon cul toucha le siège, il se leva et se cassa. Connard ! Un jour, je leur ferai tous payer – un par un !
Ces papiers avaient l’air d’être les devoirs de Kinn. Ce mec allait à la même fac que moi, mais dans le programme international de la Business School, et tout son rapport était en anglais. Il s’attendait à ce que je lise ça ? J’suis un bourrin sans cerveau, et j’ai été accepté à la fac par pur coup de bol. En général, je comptais sur Tem pour nos exposés de groupe. J’espérais juste que Kinn me tomberait pas dessus si je foirais son devoir.
— 02 : 00 du matin —
Je continuais à réorganiser les documents de Kinn jusqu’à ce qu’il soit temps de raccompagner son ami chez lui. Je savais pas s’ils s’étaient chamaillés ou autre dans la chambre de Kinn, mais M. Peem avait l’air complètement vidé. Dès qu’il s’installa à l’arrière de la voiture, il appuya sa tête contre la vitre, prêt à s’endormir à tout moment. J’arrivais pas à bien voir, mais il me sembla apercevoir des bleus sur son cou et ses bras. Je me souvenais pas s’ils étaient déjà là avant et que j’y avais juste pas fait gaffe. Ou alors il avait énervé Kinn, et Kinn lui avait fait subir le même traitement qu’à moi. Dans tous les cas, c’était pas mes affaires.
« Laisse-moi ici, » dit M. Peem en sortant de la voiture dès que je me garai à l’endroit prévu.
Maintenant que ma tâche était terminée, j’avais envie de faire un tour en ville — j’avais aucune envie de retourner dans ce foutu enfer. Mais bon, je pouvais que rêver. Je savais pas si cette voiture avait un GPS intégré, et j’avais pas envie de me faire engueuler par Kinn s’il découvrait que je m’étais baladé pour le plaisir. Putain, ça me foutait les nerfs !
Je revins m’asseoir sur le même vieux canapé devant la chambre de Kinn, remarquant que certains de ses hommes pionçaient carrément dessus ou jouaient sur leur téléphone. Kinn devait déjà dormir, vu qu’il était introuvable.
Je transpirais un peu et je me dis qu’une douche me ferait pas de mal… J’attendais avec impatience que le matin arrive, rien que pour pouvoir me changer. L’épuisement commençait à me rattraper. Mais je résistais à l’envie de me détendre, préférant attendre d’être chez moi pour vraiment me reposer. Je pouvais pas baisser ma garde ici, au cas où ces types décideraient de me tomber dessus.
La nuit s’éternisait, interminable, et je voulais juste qu’elle finisse.
Pendant tout ce temps, j’alternais entre rester assis et faire les cent pas jusqu’à ce que le matin se lève enfin. J’attendis pas qu’on me dise que mon service était terminé — je fonçai direct dans ma chambre pour ranger mes armes et prendre une bonne douche. Ensuite, direction le garage, et j’aurais filé chez moi sans me retourner si un vacarme assourdissant m’avait pas stoppé net.
« QUI C’EST QUI A PISSÉ DANS MON BASSIN À KOÏ ? ! »
Un hurlement strident fendit l’air, attirant tous les regards vers la source du cri. Puis un autre gémissement de douleur suivit :
« Non ! Elizabeth ! Sebastian ! Réveillez-vous ! Réveillez-vous ! »
Je vis un groupe de gardes du corps courir en panique vers l’origine des cris. En plein chaos, je repérai un visage familier et je l’attrapai par le bras avant qu’il me dépasse. C’était Pete.
« Qu’est-ce qui se passe, bordel ? » je lui demandai.
« Y a un connard qui a pissé dans le bassin à koï de M. Tankhun. Tous les poissons sont morts ! Putain ! Quel bordel. Et dès le matin, en plus ! » jura Pete avant de filer.
Je déglutis péniblement, un frisson glacé me parcourant l’échine. Je sautai sur ma moto et décampai aussi vite que possible.
J’étais foutu.
Ce chapitre vous est présenté par la Dragonfly Serenade : Traductrice • Ruyi ⋄ Correctrice • Ruyi
・.ʚ Voilà la fin du chapitre ɞ .・
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