Warning: Violence, Langage vulgaire! — Some content might be marked as sensitive. You can hide marked sensitive content or with the toggle in the formatting menu. If provided, alternative content will be displayed instead.
Chapitre 03 – Karma
par Ruyi ♡[PDV De Porsche]
« Ne me dis pas que tu vas encore me déposer à la même station-service que la dernière fois, » a-t-il dit d’une voix rauque.
Aujourd’hui, il semblait en bien meilleure forme qu’hier. Malgré les ecchymoses et quelques blessures éparpillées sur son visage, il restait impressionnant.
« Pourquoi es-tu revenu ? » ai-je répondu d’une voix froide, même si je n’avais pas vraiment envie de lui parler. J’ai jeté un coup d’œil dans mes rétroviseurs avant d’accélérer en apercevant un homme en noir qui nous suivait de près.
Cette fois-ci, j’étais prêt. Habilement, j’ai slalomé à travers des ruelles étroites, ma moto tout-terrain nous facilitant la tâche.
« Ralentis ! » m’a-t-il ordonné, cachant son visage dans mon dos pour éviter le vent. Il tenait fermement ma taille d’une main tandis que l’autre s’agrippait à l’arrière du siège.
« Serre-toi contre moi, » ai-je murmuré avant d’accélérer encore plus. Ses mains puissantes ont agrippé ma chemise, et il a collé son corps contre le mien, calant sa tête derrière mon épaule pour éviter le vent.
« Hé, je suis encore en vie… » a-t-il dit joyeusement en regardant autour de lui.
Après m’être assuré que personne ne nous avait suivis, j’ai coupé le moteur. Le chemin emprunté était assez complexe, et je pense qu’on a réussi à les semer pour le moment. Nous étions assez loin pour qu’ils puissent nous rattraper.
J’ai poussé un soupir de soulagement en arrivant devant ma porte d’entrée.
« Où diable sommes-nous… ? »
« Chez moi, » ai-je répondu.
Au départ, je ne voulais pas me mettre en danger. Mais face à une situation de vie ou de mort, j’ai simplement suivi le chemin que je connaissais bien, et avant même de m’en rendre compte, je nous avais conduits jusqu’à chez moi.
« Allez, entre, tu pourras aller te laver le visage. »
Il a laissé échapper un long soupir de soulagement, comme s’il venait de traverser l’enfer.
« Attends… ! » Je l’ai retenu avant qu’il ne franchisse la porte. J’ai sorti un paquet de cigarettes de ma poche et en ai allumé une.
Il n’a rien dit, mais a haussé un sourcil, attendant la suite.
« Cinquante mille, » ai-je marmonné en le fixant, la cigarette entre les lèvres.
« Hein… ? » Il a eu un petit rire et m’a lancé un regard incrédule.
« Hier, c’était ma montre… »
Avant qu’il ne termine, je l’interrompis : « Ce qui s’est passé hier est déjà passé… »
Au fond de moi, j’avais peur qu’il me demande de lui rendre la montre. Alors, je pris un air dur, espérant qu’il hésiterait avant de me la réclamer.
Et même s’il me la demandait, je ne l’avais plus. J’ai utilisé l’argent de la vente pour payer les frais de scolarité de Chay, puis la réparation du climatiseur dans la chambre à coucher. Ensuite, j’ai payé toutes les dettes qu’on avait. Maintenant, il ne restait plus rien…
« Hier, tu m’as demandé cinquante mille, et aujourd’hui, encore cinquante mille, soit un total de cent mille. Mais je suis sûr que tu connais la valeur de cette montre. Je suis certain que tu as pu la vendre pour au moins quatre cent mille. Tu vois, je t’ai déjà payé d’avance, » a-t-il dit avec un rictus, la tête penchée comme pour me narguer.
Je me suis retourné pour le regarder. C’était la première fois que je voyais son visage d’aussi près. Il me dépassait de quelques centimètres, et avait encore un sourire aux lèvres en me fixant. Ses yeux, perçants, luisaient d’une lueur redoutable, laissant entrevoir qu’il n’était pas une personne ordinaire.
Il avait une ecchymose sous son œil gauche, virant au vert. Malgré cela, son teint métissé, sans doute européen, lui donnait un air de noblesse, comme issu d’une famille très aisée.
Je ne pouvais plus ignorer la peur qu’il m’attaque dès que j’aurais le dos tourné.
« D’accord, maintenant que tu es sain et sauf, tu peux retourner d’où tu viens, » ai-je dit d’un ton posé. Puisque mon plan n’a pas marché, je ne vois pas pourquoi je l’aiderais gratuitement.
« Hein… Je ne m’attendais pas à grand-chose, mais tsk, je ne pensais pas que tu serais un tel voleur. Vu ton joli minois, j’aurais dû m’en douter… » a-t-il dit en riant, les bras croisés avec un air suffisant. Son sourire s’étirait sur son visage, ses lèvres, ses joues et ses yeux prenant une expression à la fois moqueuse et fascinante. J’avais juste envie de lui donner un coup dans le ventre.
« Peux-tu la fermer et t’en aller ? »
« C’est quoi tout ce raffut ? C’est toi, hia* ? »
(N/T : En dialecte teochew (ou chaozhou), « hia » signifie « grand frère » ou « frère aîné.)
La porte s’ouvrit dans un fracas, et mon frère apparut en pyjama, surpris de me voir accompagné. Gêné, il lui fit un petit signe de la main.
« Euh, salut, » a dit mon petit frère, mal à l’aise.
L’autre le regarda brièvement et acquiesça d’un signe de tête.
« Retourne à l’intérieur, » ai-je dit à Chay, espérant qu’il obéirait sans poser de questions.
« Bon sang, que fais-tu dehors ? Tu vas réveiller les voisins. Rentrez et venez parler à l’intérieur. » Fidèle à lui-même, Chay, toujours naïf, ouvrit la porte en grand et nous invita à entrer.
« Eh bien, si cela ne te dérange pas, bien sûr ? » La grande silhouette fit mine d’accepter l’invitation et s’apprêta à entrer, mais je l’attrapai rapidement par le col de sa chemise.
« J’arrive et toi, fous le camp d’ici ! » lui ai-je dit froidement. Il fronça les sourcils, surpris, et repoussa ma main avant de saisir mon poignet.
« Comment oses-tu me faire ça… » a-t-il dit d’un ton menaçant, mais cela ne m’intimida pas.
J’étais sur le point d’entrer dans la maison lorsque…
« Hé, attends ! Personne n’a jamais osé me faire ça, » a-t-il insisté en resserrant sa prise sur mon poignet.
Cela ne me fit ni chaud ni froid, et je l’ai repoussé violemment. « Pourquoi ? Qui es-tu ? Je peux faire bien plus que tirer sur ton col. » Nos regards se sont accrochés, un défi silencieux entre nous.
« Si tu ne pars pas, je te battrai à mort ! » ai-je lancé en pointant un doigt menaçant vers son visage.
« Hé, hé… » Chay, qui était rentré, refit surface à la porte, le regard inquiet, la tête penchée sur le côté pour mieux me voir.
« Rentre à l’intérieur ! » J’ai repoussé sa tête à l’intérieur, suis entré à mon tour, et ai claqué la porte au visage de l’autre.
Je le maudis intérieurement. J’espère qu’il se fera de nouveau battre dans une ruelle à cause de son arrogance.
Huh ! Je n’ai pas peur de ce salaud. Pour qui se prend-il ? Qu’importe qu’il soit riche ! Et s’il revenait pour reprendre la montre… ?
(Note de Ruyi : Si tu savais à quel point tu as merdé… )
J’ai pris mon téléphone pour appeler Jae Yok, pensant qu’elle était peut-être à l’hôpital. Lorsque je l’ai eue au téléphone, elle m’a assuré que les gangsters s’étaient enfuis peu après notre départ du bar, et que la police avait été alertée. Jae s’est plainte jusqu’à me donner mal aux oreilles. Et puis, j’ai dû accepter mon karma. Demain, je vais devoir tout nettoyer et récupérer ce que je peux. Il ne me reste plus qu’à prier pour que les dégâts ne coûtent pas trop cher.
Le lendemain, Jae m’a regardé avec un air interrogateur. « Où êtes-vous allés, tous les deux ? »
Je n’ai pas répondu pour éviter tout malentendu, qui pourrait laisser croire que j’avais ramené ce type chez moi ou autre chose dans le genre.
« Désolé, Jae. » J’ai baissé la tête en signe d’excuse. Elle a soupiré, lasse.
Tout était de ma faute. Mais dans cette histoire, je n’avais rien fait de mal, le vrai coupable était Kinn. Si j’avais su que ça finirait ainsi, je me serais abstenu de me mêler de ses affaires ce jour-là.
« D’accord, on a du boulot. Les nouveaux meubles arrivent cet après-midi. »
« C-C’est combien… ? » ai-je demandé, inquiet, bien que pas prêt à entendre la réponse.
« Pourquoi ? T’as de l’argent pour payer ? » a répondu Jae, étonnée, tout en agitant délicatement son éventail chinois devant son visage.
« J’en ai un peu… » ai-je dit, même si je n’étais pas le principal responsable, je me sentais obligé d’assumer une part de la responsabilité.
« Nous avons de la chance que M. Kinn ait tout pris en charge… Sinon, je n’ose imaginer combien de temps il t’aurait fallu pour tout rembourser, » a déclaré Jae Yok.
« Kinn ? » Son visage arrogant et ses yeux perçants me sont immédiatement revenus à l’esprit.
« C’est ça. M. Kinn a dit que ces voyous étaient ses ennemis autant que les tiens. Il les a vus semer le chaos ici et a estimé qu’il devait nous aider. »
Hmpf ! Ce salaud manipulateur ! Je peux admettre que je suis avide d’argent, mais je m’occupe toujours de mes affaires. Maintenant, tout à coup, je me suis fait un ennemi. J’imagine que Jae Yok n’a pas vu que Kinn et moi avons fui ensemble, puisqu’elle était occupée à repousser ces brutes avec ses talents de kung-fu.
« D’accord… » ai-je répondu avec un léger sourire.
« C’est drôle, maintenant que j’y pense, » a-t-elle ajouté. « On aurait dit que la police était venue fermer un bordel illégal. C’était le chaos ! »
J’ai ri et répondu : « Tu as l’air de ce genre de madame, oui. »
« Ouais, j’allais m’enfuir quand j’ai vu les flics. Puis j’ai réalisé qu’ils étaient là pour nous aider ! » Elle a posé sa main sur sa poitrine et a éclaté de rire. « Vraiment, nous avons de la chance que M. Kinn connaisse des hauts gradés dans la police. Tout a été réglé avant même que ça ne fasse les gros titres. Les flics sont venus récupérer les images des caméras de surveillance ce matin. Ah… Je frissonne encore chaque fois que je pense à M. Kinn. »
« Pourquoi ? » ai-je demandé.
« Il est magnifique ! Comment quelqu’un peut-il être aussi beau ? Ça devrait être illégal ! On parle de mari idéal, là ! »
J’ai écouté Jae divaguer sur la beauté de M. Kinn pendant un moment, puis je suis allé aider à nettoyer les lieux avec les autres employés. Des éclaboussures de sang, des éclats de verre et des meubles brisés jonchaient le sol.
Nous avons eu de la chance que personne n’ait été grièvement blessé lors de l’altercation de la nuit dernière. Cependant, certains serveurs ont dû être traités à l’hôpital, et les autres arboraient des ecchymoses et des coupures partout. Ils plaisantaient en disant qu’ils avaient pris tous les coups pour moi, puisque j’en étais sorti presque indemne. Je leur ai dit que je les inviterais à dîner plus tard pour les remercier. Bien que je n’aie pas reçu d’argent de Kinn, je n’ai pas eu à payer pour les dégâts — offrir un repas était le moins que je puisse faire pour mes collègues.
Nous avons gardé le bar fermé au public ce soir, mais la plupart de l’équipe est venue comme d’habitude pour aider à nettoyer. À 21 heures, tout commençait à revenir à la normale, alors j’ai décidé de faire une pause cigarette. Je suis allé m’asseoir sur un gros réfrigérateur dans l’allée derrière le bar et j’ai tiré une longue bouffée de ma cigarette, laissant la nicotine clarifier mes pensées.
Clap, Clap
Soudain, des bruits de pas se firent entendre. Rien qu’au son, j’avais une idée de qui ça pouvait être. Cette ruelle était étroite et rarement fréquentée.
« Salut… »
Les pas s’arrêtèrent non loin de moi. La silhouette en noir me paraissait familière ; en regardant de plus près, je reconnus Kinn. Je me levai et écrasai mon mégot de cigarette sous mon pied.
« Qu’est-ce que tu veux cette fois-ci ? » demandai-je, d’un calme apparent malgré l’agitation qui grondait en moi. Je mis les mains sur mes hanches, prêt à en découdre.
Kinn s’approcha lentement, balayant la ruelle du regard, comme pour s’assurer que nous étions seuls. Son allure, comme s’il venait prêt à en découdre, me rappela les événements de la veille. Je croisai les doigts pour que cette scène ne se répète pas, sinon Jae me maudirait à vie.
»Tu veux encore te battre ?« lui lançai-je, agacé, alors qu’il s’arrêtait juste devant moi, sans dire un mot.
« J’ai une proposition à te faire. » Son ton doux contrastait avec l’intensité de mon propre rythme cardiaque, qui battait si fort que je sentais un mauvais pressentiment s’installer.
« Quoi ? » dis-je froidement, masquant mon trouble.
« Viens avec moi. »
« Où allons-nous ? »
« On a beaucoup de choses à se dire, » déclara-t-il en me regardant droit dans les yeux, les mains dans les poches. Bien qu’il donnât l’impression d’être décontracté, ses yeux perçants révélaient une autre réalité.
« Je ne veux pas, » dis-je en me retournant, dans l’intention de rentrer dans le bar, bien que mon cœur battît toujours la chamade. Mais il attrapa mon bras et le tint fermement. Je me retournai donc pour lui faire face.
« Mais j’ai quelque chose à te dire. »
« Mais je ne veux pas ! Lâche-moi ! » D’un geste rapide, je libérai mon bras et le repoussai loin de moi. J’attrapai le pied d’une des tables cassées qu’on avait jetées et le lançai sur lui. Il l’esquiva habilement. Ses hommes, qui se tenaient à une certaine distance de nous, se précipitèrent à sa rescousse. L’un d’eux fonça sur moi, et je lui assénai un coup de poing.
Soudain, des bruits de pas se firent entendre. Rien qu’au son, j’avais une idée de qui ça pouvait être. Cette ruelle était étroite et rarement fréquentée.
« Salut… »
Les pas s’arrêtèrent non loin de moi. La silhouette en noir me paraissait familière ; en regardant de plus près, je reconnus Kinn. Je me levai et écrasai mon mégot de cigarette sous mon pied.
« Qu’est-ce que tu veux cette fois-ci ? » demandai-je, d’un calme apparent malgré l’agitation qui grondait en moi. Je mis les mains sur mes hanches, prêt à en découdre.
Kinn s’approcha lentement, balayant la ruelle du regard, comme pour s’assurer que nous étions seuls. Son allure, comme s’il venait prêt à en découdre, me rappela les événements de la veille. Je croisai les doigts pour que cette scène ne se répète pas, sinon Jae me maudirait à vie.
« Tu veux encore te battre ? » lui lançai-je, agacé, alors qu’il s’arrêtait juste devant moi, sans dire un mot.
« J’ai une proposition à te faire. » Son ton doux contrastait avec l’intensité de mon propre rythme cardiaque, qui battait si fort que je sentais un mauvais pressentiment s’installer.
« Quoi ? » dis-je froidement, masquant mon trouble.
« Viens avec moi. »
« Où allons-nous ? »
« On a beaucoup de choses à se dire, » déclara-t-il en me regardant droit dans les yeux, les mains dans les poches. Bien qu’il donnât l’impression d’être décontracté, ses yeux perçants révélaient une autre réalité.
« Je ne veux pas, » dis-je en me retournant, dans l’intention de rentrer dans le bar, bien que mon cœur battît toujours la chamade. Mais il attrapa mon bras et le tint fermement. Je me retournai donc pour lui faire face.
« Mais j’ai quelque chose à te dire. »
« Mais je ne veux pas ! Lâche-moi ! » D’un geste rapide, je libérai mon bras et le repoussai loin de moi. J’attrapai le pied d’une des tables cassées qu’on avait jetées et le lançai sur lui. Il l’esquiva habilement. Ses hommes, qui se tenaient à une certaine distance de nous, se précipitèrent à sa rescousse. L’un d’eux fonça sur moi, et je lui assénai un coup de poing.
Nous continuâmes à nous battre jusqu’à ce que Kinn s’interpose, ne supportant pas de voir ses hommes tomber un par un. Il attrapa mon poing avant qu’il ne touche son visage. Surprise, je tentai de lui asséner un coup de genou, mais il l’évita également. À présent, je haletais, mais fus distrait un instant, suffisant pour qu’il me torde les poignets avant de me plaquer contre un mur. Je ne comprenais pas pourquoi, hier seulement, il semblait si faible, mais maintenant, c’était comme s’il était un autre homme. Il était plus fort que je ne le pensais !
« Relâche-moi ! » criai-je en colère.
Il me tenait à l’arrière de la tête, enfonçant ses doigts dans mes cheveux, puis rapprocha son visage comme s’il allait m’embrasser.
Oh mon Dieu !
« Non, je suis là pour négocier avec toi. »
Quoi ? !
Ses lèvres, de couleur châtain, murmuraient doucement près de mon visage, et je pouvais sentir son souffle contre ma peau.
« Je n’ai pas envie de te parler ! ! » criai-je en retour, essayant toujours de me libérer de son visage trop proche.
« Pfft ! Je te pensais meilleur que ça, » a-t-il ricané.
Son insulte m’a piqué au vif. J’ai rugi et lui ai sauté dessus, le mordant au cou de toutes mes forces. La douleur l’a surpris, et sa prise s’est relâchée lorsqu’il m’a repoussé.
Ignorant son cri, je me suis précipité dans le bar par la porte de derrière. Je l’ai rapidement verrouillée et me suis dirigé vers la salle du personnel pour récupérer mon sac. Mes collègues me regardaient, perplexes.
« Qu’est-ce qui se passe ? » a demandé P’Deaw, l’un des membres plus âgés du personnel.
« Dis à Jae Yok que je pars plus tôt. Elle peut déduire ça de mon salaire, peu importe ! » ai-je crié en retour. En vérité, j’avais peur de Kinn. Pas qu’il essaie de me tabasser — mais qu’il me demande de lui rendre sa montre.
(Note de Ruyi : Porsche, comment tu t’enfonces… )
Cette nuit-là, j’ai rapidement enfourché ma moto et suis rentré chez moi à toute vitesse, mon esprit obsédé par la montre. Je ne vois pas pourquoi Kinn viendrait me chercher avec ses subordonnés, sauf pour récupérer ses affaires. Il se souvient sûrement que sa montre valait cinq… Six… Non, sept cent mille bahts !
Je me suis réveillé à six heures et suis allé au marché pour acheter le petit-déjeuner de Chay. Je n’avais pas fermé l’œil de la nuit, trop préoccupé par Kinn et le moment où il reviendrait me chercher.
« On dirait que quelqu’un a de l’argent en ce moment, » a dit Chay, jetant un regard entre moi et l’abondance de nourriture sur la table.
« Mange et va à l’école, » ai-je répliqué, poussant distraitement les crevettes dans ma bouillie de riz avec une cuillère. Notre petit-déjeuner était en effet plus luxueux que d’habitude. D’ordinaire, nous avions juste du riz avec un œuf frit ou de la bouillie de porc. Mais aujourd’hui, il y avait aussi du pain, du beurre, de la confiture, du lait frais, du jus d’orange — tout le tralala.
« Je peux avoir mon argent de poche pour la semaine ? » a demandé Chay.
J’ai sorti six billets de mille bahts de mon portefeuille et les lui ai tendus.
« Wow ! » Les yeux de Chay se sont écarquillés d’incrédulité.
« Disons que je te donne ton argent de poche pour tout le mois d’avance, » ai-je répondu. J’ai décidé qu’il valait mieux répartir l’argent maintenant. Comme ça, même si Kinn me le réclamait, je ne pourrais pas le rembourser.
« D’où vient tout cet argent ? »
« J’ai économisé, » ai-je dit. Mon petit frère n’y croyait clairement pas. Il m’a fixé avec scepticisme jusqu’à ce que je le chasse.
« Dépêche-toi d’aller à l’école et étudie bien ! Économise l’argent, » ai-je crié en le regardant partir dans son uniforme bleu de lycée. Je n’ai pas pu m’empêcher de soupirer de soulagement. Au moins, avec l’argent que j’ai en ce moment, je pourrai couvrir les frais de ce semestre.
Tout le monde doit se demander pourquoi j’envoie mon frère dans une école aussi chère, alors qu’on est fauchés. C’est parce que je ne veux pas qu’il ait l’impression que nous manquons de quelque chose.
Il étudie dans cette école depuis la maternelle, qui est aussi mon alma mater. Je ne veux pas le transférer avant qu’il ne soit diplômé, je ne veux pas qu’il se sente inférieur à moi. Même s’il me dit parfois que ce serait bien que je le fasse transférer dans une école moins chère, je n’en ai pas envie. Je veux qu’il se sente en sécurité, comme avant, quand nos parents étaient encore en vie.
(N/T : Alma Mater – C’est une expression d’origine latine, traduisible par « mère nourricière », parfois utilisée pour désigner le collège ou l’université où une personne a étudié.)
Peu importe à quel point c’est difficile, peu importe à quel point je suis épuisé, je le ferai pour mon frère. Je prendrai soin de lui, quoi qu’il m’en coûte.
J’ai verrouillé la porte de la maison et sauté sur la moto. J’ai conduit mon frère à l’école, et c’est là que je me suis rappelé de quelque chose. Zut ! Kinn sait où je vis !
« Tante Aoi ! » ai-je crié en saluant la gentille voisine.
« Si quelqu’un venait à me demander, s’il te plaît, dis-leur que j’ai déménagé loin d’ici. »
« Qui va venir te voir ? » Tante Aoi m’a regardé, perplexe.
« Dis-leur simplement que j’ai déménagé à l’étranger, » ai-je répondu précipitamment.
Elle a acquiescé en réponse. Je suis revenu pour collecter tout ce qui était à l’extérieur de la maison : chaussures, tongs, parapluies, casques de moto, vieux comme neufs. J’ai fourré quelques pneus de plus à l’intérieur de la maison pour la rendre plus déserte. Heureusement, je n’avais pas assez d’argent pour acheter des meubles, donc cela fut plus facile de rendre la maison inhabitable…
Nous sommes allés à la cafétéria après les cours. Tem m’a fixé un moment avant de finalement demander : « Pourquoi es-tu si agité aujourd’hui ? »
« Qu’est-ce que tu veux dire ? » ai-je répliqué.
« Tu regardes tout le temps autour de toi, nerveux. Quelqu’un en a après toi, encore ? »
« Tem a raison. Tu as l’air sur les nerfs, » a ajouté Jom, me jetant un regard sceptique. « Je ne t’aiderai pas cette fois-ci. On s’en est sortis de justesse la dernière fois. »
Ils avaient réussi à s’échapper de la bagarre sans blessures graves. Depuis, ils m’ont reproché par téléphone et dans notre groupe de discussion de les avoir mêlés à ça. Je n’ai pas cherché d’excuses et les ai laissés croire que c’était ma faute.
« C’est rien, » ai-je dit, jouant distraitement avec ma nourriture. J’ai réussi à garder mes émotions sous contrôle, mais j’étais sur mes gardes depuis mon arrivée aujourd’hui.
« Rien, mon œil ! Tu as peur que ces voyous reviennent ? Je doute qu’ils osent, » a dit Jom, incrédule.
« Alors, qu’est-ce que tu as fait pour les énerver ? » a demandé Tem.
« Ha ! Je parie qu’il les a juste regardés avec sa tête énervante. Ça suffirait à énerver n’importe qui, » a interrompu Jom avant que je puisse répondre. J’ai haussé les épaules, trop paresseux pour m’expliquer.
« Jom ! » Une voix a retenti. C’était P’Ohm, un étudiant de troisième année de notre département. « Ton père* te cherche ! »
(N/T : Faire des blagues sur le père ou la mère de quelqu’un de cette manière est une forme d’insulte dans la culture thaïlandaise.)
Nous l’avons salué alors qu’il s’approchait de notre table.
« Mon père ? » a demandé Jom, perplexe.
« Aucune idée. Mais ce type a dit qu’il devait te parler, » a répondu P’Ohm.
Jom avait l’air abasourdi, alors P’Ohm a insisté : « Il l’a vraiment dit ! »
J’ai avalé ma salive en entendant les mots de P’Ohm, me demandant si c’était Kinn qui demandait Jom. Je lui ai bien dit que mon nom était Jom. Merde…
« À quoi ressemble-t-il ? » ai-je demandé nerveusement.
« Le père de Jom ? Il est super beau ! Je n’aurais jamais pensé que quelqu’un d’aussi beau serait lié à quelqu’un d’aussi… Euh, disons, moins beau. »
(Note de Ruyi : Ça va de mal en pire, il a mis son pote dans la sauce… ~(>_<~) )
« Sérieusement, mec ! C’est qui, lui ? » s’exclama Jom.
P’Ohm ricana. « Il a vraiment dit qu’il était ton père et qu’il voulait te parler. Il porte notre uniforme avec l’insigne de la fac de commerce. Min dit qu’il est très populaire. Son nom est— »
« Hey ! Allons voir un film. C’est moi qui invite. » Je coupai P’Ohm* avant qu’il ne puisse finir sa phrase. Tout le monde me regarda avec incompréhension.
« C’est quoi ton problème aujourd’hui, Porsche ? T’es vachement bavard, dis donc… » Jom m’observa d’un œil soupçonneux.
(N/T : En général, les thaïs s’appellent par leur prénom. Celui-ci est précédé du mot « P’ » quand on s’adresse à un aîné)
« Allez ! Prenons la voiture de Tem. Je laisse ma moto ici. » Je donnai un coup de coude à Tem pour l’inciter à suivre le mouvement. Mes amis étaient totalement déconcertés.
« D’accord, on va voir un film, mais d’abord, je veux voir à quoi ressemble mon superbe papa. » Jom insista sur les derniers mots en jetant un regard appuyé à P’Ohm.
« Fais comme tu veux, connard ! » P’Ohm jura avant de s’éloigner vers le terrain de foot.
« Si t’étais pas mon aîné, je t’aurais déjà mis une claque ! » Jom lui cria dessus.
« Allons-y, » dit Tem en attrapant son sac avant de se diriger vers la sortie de l’école.
« Les gars ! Le cinéma ! » insistai-je d’une voix ferme.
« On a compris ! Mais passons d’abord par l’entrée pour que Jom puisse voir son père. »
« Je n’vous paie pas si vous n’venez pas avec moi, » tentai-je de les menacer, de plus en plus nerveux.
« Bien sûr qu’on vient avec toi. Mais je veux juste vérifier qui est mon père. »
« Mais qu’est-ce qui cloche avec toi aujourd’hui, Porsche ? » demanda Tem, intrigué.
« J’ai pas envie d’aller près de l’entrée, » répondis-je, obstiné.
« Attends-nous à la voiture, alors ? On en a pour deux secondes. » Tem me tendit ses clés de voiture avant de partir avec Jom.
Je soupirai en pensant aux ennuis que cela allait engendrer. Oh mon Dieu, il est venu pour moi… ?
« Oh, vous ne comptiez pas aller au cinéma ? Allez-y, je reviens vite, héhé, » leur dis-je, nerveux. Ma tentative désespérée attira l’attention de tout le monde autour de la table.
« Hé, qu’est-ce qui ne va pas, Porsche ? » demanda P’Ohm, perplexe.
« Ah, rien. Allez-y, les gars, partez sans moi. La voiture est déjà pleine, je vais aller garer ma moto ! » J’avais haussé le ton sur la fin, les poussant doucement vers la sortie. Kinn ne leur fera pas de mal, hein ?
Je n’avais pas peur de me faire tabasser, mais s’il était vraiment venu pour récupérer sa montre…
« Oh, allons voir la tête de mon père, » dit Jom en insistant sur le mot pour taquiner P’Ohm.
Ce dernier haussa un sourcil avant de se rapprocher de Jom.
« Même si tu es mon aîné, je n’hésiterai pas à te foutre une baffe sur la tête. »
« Je suis trop fatigué pour aller à l’entrée de l’école… » murmurai-je.
Les deux partirent rapidement en direction du bâtiment de la faculté tandis que j’allumais ma deuxième cigarette. Que dois-je faire… ?
« Merde, ce P’Ohm nous a fait une farce ! » s’exclama Jom en revenant.
« Quoi ? Pourquoi ? » demandai-je, curieux.
« On est restés là, devant l’entrée, pendant plusieurs minutes, mais personne n’est venu ! Je suis sûr que ce connard nous a fait une blague, je vais le tuer ! » Tem fulminait.
Soulagé, je ricanai. « P’Ohm adore nous faire des coups comme ça. Oublions cette histoire et allons au ciné. »
Ils acquiescèrent et prirent une cigarette chacun avant que nous ne montions dans la voiture de Tem pour nous rendre au centre commercial près de l’université.
En arrivant chez moi, je suis immédiatement allée voir Tante Aoi.
« Tante Aoi ! Est-ce que quelqu’un est venu me voir ? »
« Oh, oui. Mais qui étaient ces hommes ? Ils avaient l’air d’appartenir à la Mafia. Est-ce que tout va bien, Porsche ? »
« Ils ont demandé après une personne nommée Jom. J’étais confuse, alors j’ai dit qu’il n’y avait personne ici. Et que cela faisait un moment que la maison était vide. Alors, ils sont repartis. » J’ai hoché la tête.
« Quand sont-ils venus, tante ? »
« Aux alentours de midi », dit-elle en me lançant de nouveau un regard suspicieux. Mais elle n’osait probablement pas poser plus de questions, puisqu’on se parlait très rarement.
Ah. C’est bien qu’ils soient venus quand je n’étais pas à la maison.
« Puis-je garer la moto chez vous, tante ? »
« Oh oui, bien sûr. Vas-y… Porsche, prends soin de toi, d’accord ? »
« Oui, tante, merci beaucoup. »
Et s’il changeait d’avis ? S’il me donnait cinquante mille en échange de sa montre ? Mais je ne le ferai pas. C’est dommage… Sept cent mille contre cinquante mille. Qui aurait envie de la lui rendre ? Ce serait stupide.
Ce chapitre vous est présenté par la Dragonfly Serenade : Traductrice • Ruyi ⋄ Correctrice • Ruyi
・.ʚ Voilà la fin du chapitre ɞ .・
0 Commentaire