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    Quand il retrouva ses esprits, il ne voyait plus rien d’autre que les traces qu’elle avait laissées.

    Il ne pouvait s’enfuir, même s’il l’aurait voulu. Il se savait accro, et aucun remède au monde ne pourra y changer quelque chose.

    Tout ce qu’il pouvait faire, c’était tendre désespérément les bras vers elle.

    « Cela n’a pas être compliqué. »

    Rufus effleura doucement les cheveux de Sarubia.

    « Disons seulement que c’est le destin. »

    En disant cela, Rufus enlaça Sarubia. Le plafond sembla osciller doucement.

    Rufus était infiniment tendre.


    Sur les conseils de sa gouvernante, la princesse Sordide invita Rufus dans son palais.

    « Il doit être un homme rustre et sans manière », grommela-t-elle, alors que cinq de ses servantes l’apprêtaient en même temps.

    « Je vais simplement bien le traiter et le renvoyer. L’opinion publique est encore en ébullition, alors on décidera du mariage plus tard. »

    C’est en réfléchissant ainsi que la princesse se rendit au jardin situé à l’arrière de son palais.

    « Où est cet homme ? »

    « Il attend à l’intérieur », répondit une servante en inclinant la tête.

    Le corps de cette servante, qui s’était fait battre la veille à la place de Sarubia, portait encore les marques des coups.

    Derrière cette pauvre femme, la princesse aperçut un visage familier : des cheveux ivoire, des yeux dorés et ce sourire insolent qui ne disparaissait jamais.

    « Tsk. »

    La princesse fronça les sourcils tout en jetant un regard agacé à la servante.

    Elle m’agace.

    Elle détestait ce visage. Sordide souffrait à l’idée d’épouser un homme qu’elle méprisait profondément, et pourtant, cette femme… Pourquoi ce sourire obstiné ne quittait-il jamais ses lèvres ?

    Sordide sentait une rage sourde montée en elle. Elle n’avait qu’une envie, c’était de lui lacérer les lèvres avec un couteau, pour que cette peste ressente la même douleur qu’elle.

    « Qu’est-ce qu’elle trouve de si plaisant dans la vie, cette effrontée ? » maugréa la princesse en se dirigeant vers le jardin.

    Le jeune homme, vêtu modestement, se leva de son siège en voyant la princesse.

    « Votre Altesse, c’est un honneur pour moi de pouvoir saluer la noble princesse du royaume. »

    Cet homme était donc Rufus, le héros qui avait tué le Roi Démon Audixus, mettant ainsi fin à une guerre qui durait depuis des années.

    La princesse le salua avec froideur.

    Hmph, regardez-le, à faire le noble avec son titre qui ne vaut pas un sou.

    Moqueuse, elle s’installa avec une élégance calculée face à lui.

    Mais alors qu’elle levait brièvement les yeux vers lui, une pensée l’effleura.

    Il n’est pas totalement désagréable à regarder, après tout…

    Jetant un bref coup d’œil au visage de l’homme, la princesse leva élégamment sa tasse de thé.

    Rufus, ce héros mystérieux, n’avait fait son apparition à la capitale qu’à l’âge de dix-huit ans. Dans un royaume où l’honneur des familles nobles passait avant tout, et où chaque parent, qu’il fût riche ou pauvre, s’empressait de présenter sa descendance à la société, cet homme avait brillé par son absence.

    Cependant, Rufus ne s’était jamais montré en société jusqu’à présent.

    Lorsqu’elle en avait entendu parler, elle s’était attendue à un être difforme ou marqué par de profondes cicatrices, à un homme au visage usé par les combats.

    Mais l’homme assis en face d’elle était étonnamment décent.

    « Merci de m’avoir invité. »

    Non, en réalité, plus elle l’observait, plus elle le trouvait séduisant, il y avait quelque chose d’indéniablement captivant dans ses traits. Ce petit détail intrigua un peu la princesse.

    « Puis-je vous appeler Seigneur Rufus ? » demanda-t-elle d’une voix douce, légèrement enjôleuse, un ton qu’elle maîtrisait à la perfection lorsqu’elle jouait avec les jeunes nobles.

    « Oui. »

    «  Bien, Seigneur Rufus. Je suis ravie de faire votre connaissance. Votre séjour au palais royal vous plaît-il  ?  »

    « En effet. »

    Sa réponse était brève, presque sèche, et aucun mot supplémentaire ne suivit.

    Que fait cet homme ?

    La princesse était déconcertée par son attitude.

    La princesse Sordide, réputée pour sa beauté éblouissante, était habituée à voir tous les hommes se disputer ses faveurs.

    Ils déployaient des efforts inimaginables pour attirer son attention, rivalisant d’esprit et de charme dans l’espoir de lui arracher un sourire ou un mot aimable.

    Mais cet homme…

    Cet homme restait aussi impassible qu’une porte close.

    Le silence qui s’ensuivit était lourd et pesant, comme un nuage orageux stagnant au-dessus du jardin.

    Serait-il nerveux ? 

    La princesse lança un regard furtif à son interlocuteur.

    Oui, c’était sans doute cela. Il devait être si submergé par la nervosité qu’il n’arrivait même pas à ouvrir la bouche. Ce genre de chose arrivait souvent.

    Nombreux étaient les jeunes nobles qui, sous son regard, perdaient leurs moyens : certains se mettaient à transpirer abondamment, d’autres bégayaient, incapables de formuler une phrase cohérente.

    Dans une tentative de dissiper cette tension gênante, la princesse désigna d’un geste élégant les rafraîchissements disposés sur la table.

    « Je vous en prie, servez-vous. »

    « Non, merci. »

    Le ton était plat, presque glacial. Rufus ne toucha pas aux rafraîchissements méticuleusement préparés pour l’occasion.

    Mais ce n’était pas tout : il n’effleura même pas le regard de la princesse.

    Regardez-moi ça !

    Sordide sentit monter en elle une vague de frustration mêlée à de l’incompréhension.

    Jamais un homme ne l’avait traitée ainsi.

    Elle était habituée à être adorée, à ce que chaque regard posé sur elle soit chargé d’admiration et de désir. Depuis son enfance, elle avait été couverte d’amour, un amour si constant qu’elle considérait comme allant de soi.

    Comment pouvait-elle concevoir qu’un homme puisse exister dans ce monde sans être subjugué par elle ?

    Mais Sordide ignorait tout.

    Elle ne se rendait pas compte que le regard de cet homme n’était pas dirigé vers elle.

    Non.

    Le regard de Rufus, calme et intense, était rivé sur une silhouette discrète. Une servante, postée à l’écart dans un coin du jardin.


    ・.ʚ Voilà la fin du chapitre ɞ .・

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