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    Au travers d’une légère brume parfumée, deux beautés d’allure céleste descendirent les marches, leurs bracelets tintant doucement, leurs manches flottant dans les airs. Pour les deux hommes, c’était comme voir des déesses descendre du ciel. Ils en restèrent bouche bée, incapables de respirer.

    « Je suis l’humble, Yuèwēi…  »

    « Et moi, l’humble Yù Róng…  »

    « Nous saluons humblement nos maîtres*…  » Leurs voix, douces comme celles de fauvettes sortant de la vallée, avaient le pouvoir de faire chavirer n’importe quel cœur.

    « Relevez-vous, relevez-vous ! » s’écria Cáo Xīn, tout sourire, complètement subjugué. « Mesdemoiselles, par ici, venez par ici… Moi, c’est Cáo Xīn, et voici mon grand frère, Lù Cāng…  »

    « Troisième frère…  » soupira Lù Cāng en fronçant les sourcils.

    Quel genre de client se comporte comme ça dans un lupanar ? On dirait un gosse en chaleur…

    Avec élégance, il tendit la main vers la jeune femme en robe violette :

    « Yuèwēi, viens t’asseoir ici. »

    Yuèwēi* portait bien son nom : une peau de neige, des yeux profonds et brillants, un visage débordant de tendresse, enveloppée dans une robe mauve pâle — elle ressemblait à une rose en fleur sous la lumière lunaire, exactement le genre de femme que Lù Cāng adorait.

    Elle lui adressa un sourire doux et s’assit timidement à ses côtés.

    « Yù Róng…  »

    Cáo Xīn n’eut même pas le temps de finir que Yù Róng s’était déjà blottie dans ses bras :

    « Oh là là, ces deux seigneurs ont l’air bien nouveaux, c’est la première fois que vous venez ici, non ? »

    Comparée à la douce Yuèwēi, Yù Róng était d’une vivacité espiègle.

    Troublé par ses mots doux et son regard enjôleur, Cáo Xīn répondit en bégayant :

    « Avec mon grand frère, on… On vient d’Hángzhōu. C-c-c’est ma première fois à la capitale…  »

    « Aïe, vous êtes un vilain ! »

    Yù Róng se frotta davantage contre lui, lançant un clin d’œil charmeur à Lù Cāng :

    « C’est toi le plus âgé, alors pourquoi est-ce que c’est lui que tu appelles « grand frère » ? »

    « Parce que… Parce que grand frère… Ben, c’est grand frère, voilà tout ! » bredouilla Cáo Xīn en se contentant de sourire niaisement.

    Lù Cāng fronça de nouveau les sourcils. Il n’avait jamais aimé les femmes trop exubérantes comme Yù Róng. Il préférait la douceur tranquille. Et surtout, il craignait que ce crétin de Cáo Xīn ne se laisse trop aller et finisse par tout dévoiler.

    Il serra doucement Yuèwēi dans ses bras. Elle lui souriait tendrement, alors il détourna la conversation :

    « Mesdemoiselles Yuèwēi et Yù Róng, vous êtes bien curieuses, mais racontez-nous aussi un peu qui vous êtes. Dis-moi, Yuèwēi, quel âge as-tu ? »

    Yuèwēi rougit, posa sa tête sur l’épaule de Lù Cāng et répondit d’une voix douce :

    « Cette humble servante a dix-huit ans… Et grande sœur Yù Róng en a dix-neuf…  »

    Le corps délicat de Yuèwēi était pressé contre le sien, dégageant un parfum sucré et enivrant. À cet instant, Lù Cāng sentit son cœur se serrer.

    Ces derniers mois, tous mes souvenirs charnels sont teintés d’amertume. Mais aujourd’hui… Peut-être que je vais enfin pouvoir effacer cette humiliation.

    Il tendit la main vers la poitrine légèrement inclinée de Yuèwēi. Elle frissonna, puis se laissa faire, docile comme une poupée de porcelaine.

    Mais Yù Róng, qui observait la scène, lança soudain :

    « Oh ! Jeune maître Lù, un homme aussi distingué… Et vous êtes si audacieux ? »

    Cáo Xīn éclata de rire avant même que Lù Cāng ne réagisse :

    « Mon grand frère a travaillé deux mois à la capitale. Je crois qu’il n’a pas vu de femme depuis un bon moment. »

    Il tourna la tête vers lui pour appuyer ses propos.

    « Oui… C’est vrai. Cela fait longtemps que je n’ai pas eu de « femme ». »

    Merde ! Lù Cāng grinça intérieurement des dents.

    Ce foutu idiot, il fallait qu’il remue le couteau dans la plaie* ? !

    Deux mois… Deux mois que je n’ai vu qu’un homme… Et même pas par choix, bordel.

    Une gêne sourde le saisit. Sa main, posée sur la poitrine de Yuèwēi, perdit un peu de sa fermeté.

    « Eh bien, il va falloir que notre petite Yuèwēi s’occupe bien de vous ce soir ! » lança Yù Róng en riant. Elle adressa à Yuèwēi un regard taquin, avant de se lever :

    « Ce n’est pas tous les jours qu’on vous voit ici, alors profitez bien. Il se fait tard…  »

    Cáo Xīn souriait jusqu’aux oreilles. Passer la nuit de printemps* avec une femme aussi belle ? Il n’en fallait pas plus pour l’enthousiasmer.

    Lù Cāng sentait aussi une excitation brûlante monter en lui. Il souleva Yuèwēi dans ses bras et lança à Yù Róng :

    « Merci, petite sœur, pour ton aide…  »

    Il allait demander où se trouvait la chambre de Yuèwēi quand la porte s’ouvrit brusquement dans un grand fracas, coupant net sa phrase.

    La vieille tenancière apparut, l’air paniqué :

    « Yuèwēi, Yù Róng, vite ! Allez prévenir toutes les filles, nous avons des invités de marque à recevoir ! »

    Yuèwēi et Yù Róng s’arrêtèrent net, prêtes à monter, mais Lù Cāng les retint par le bras.

    Il se tourna vers la tenancière, furieux :

    « Qu’est-ce que ça veut dire ? Ces deux demoiselles sont déjà à moi pour la nuit — qui ose encore parler « d’invités de marque » ? »

    « Ah… Messieurs, toutes mes excuses, mais nous ne recevons plus de clients ce soir. Revenez un autre jour, notre maison de fleurs vous accueillera gratuitement », répondit la tenancière avec un sourire crispé.

    Lù Cāng haussa un sourcil :

    « Gratuitement ? Vous croyez pouvoir nous faire partir comme ça ? Et notre honneur, vous y avez pensé ? »

    Sa main glissa vers la garde de son épée, prêt à dégainer.

    La tenancière fronça les sourcils et fit signe aux servantes de monter à l’étage. Elle ajouta :

    « Ces invités… Viennent sans doute de très haut. Notre maison est sous la gestion directe des bureaux impériaux, et les nobles de la cour doivent toujours être reçus en priorité. C’est une vieille règle, vous comprenez…  »

    « Une vieille règle, hein ? Eh bien, j’ai hâte de voir qui ose venir me prendre mes femmes. »

    Depuis longtemps, Lù Cāng rongeait sa frustration. Même dans un bordel, il refusait de perdre la face. C’était une question de dignité.

    Il dégaina son épée et la posa violemment sur la table. Son regard, sombre et perçant, lançait un défi sans équivoque.

    Les autres clients, plus dociles, se laissaient escorter vers la sortie sans un mot, accompagnés par les servantes. Aucun ne semblait protester.

    Lù Cāng s’en étonna.

    Pourquoi ils ne réagissent pas ? Ils sont déjà habitués à ce genre de scène ?

    La tenancière, voyant qu’il n’allait pas coopérer, fit signe à ses hommes d’intervenir pour le faire sortir.

    Mais trois ou quatre gardes ne suffirent pas. Lù Cāng les repoussa d’un geste.

    Il se rassit, les jambes croisées, entouré de jolies filles qui le regardaient avec des étoiles dans les yeux. Un vieux sentiment d’héroïsme refit surface.

    Il attira Yuèwēi sur ses genoux, un air satisfait au visage.

    « Monsieur… Vous ne pouvez pas vous permettre d’offenser ce genre de personne… Partez tant qu’il en est encore temps…  » supplia presque la tenancière.

    Lù Cāng secoua la tête :

    « Hé… Je ne crois pas que ce soit possible maintenant ! Et alors ? Même s’il a trois têtes et six bras, je n’ai pas peur. »

    La tenancière allait ajouter quelque chose, mais une voix grave l’interrompit depuis l’entrée :

    La tenancière allait ajouter quelque chose, mais une voix grave l’interrompit depuis l’entrée :

    « Madame Liǔ, les demoiselles sont-elles prêtes ? »

    Celui qui venait de parler était un homme d’âge mûr, vêtu d’un somptueux manteau de brocart rouge, suivi d’une escorte de serviteurs habillés à l’identique.

    Son regard glissa distraitement vers le fond de la salle, et il aperçut Lù Cāng et Cáo Xìn, assis là, bien installés. Il fronça les sourcils et s’adressa à la tenancière :

    « Que se passe-t-il avec ces deux-là ? »

    « Ah, grand frère Dīng… Ces messieurs sont des clients têtus, ils refusent de partir…  »

    Le dénommé grand frère Dīng plissa les yeux, visiblement agacé. Il fit un geste bref de la main vers ses hommes :

    « Attrapez-les et foutez-les dehors. »

    Mais Lù Cāng n’était pas homme à se laisser intimider. Il dégaina son épée dans un éclair d’acier et se jeta aussitôt dans la mêlée. Les lames s’entrechoquèrent violemment. Un instant durant, le vacarme des armes emplit la salle, sans qu’aucun camp ne prenne l’avantage.

    Alors que le combat battait son plein, une voix puissante retentit à l’entrée, claquant comme un coup de tonnerre :

    « Assez ! »

    Un homme vêtu de blanc fit son entrée dans le grand hall, entouré de jeunes serviteurs au visage délicat. Le garde qui avait crié « Assez ! » — visiblement à la tête du groupe — recula aussitôt pour se ranger derrière l’homme en blanc.

    Le capitaine Dīng, ainsi que les autres serviteurs qui s’étaient battus, rengainèrent leurs armes à la hâte et se replièrent sur les côtés.

    « Mes sincères salutations, jeune maître Jìng — »

    Tous dans le hall tombèrent à genoux. Lù Cāng sursauta en entendant ce nom, et leva précipitamment les yeux vers l’homme.

    Putain de merde…

    Leur regard se croisa, et en apercevant ces yeux familiers et d’une beauté troublante, Lù Cāng sentit un vrombissement lui exploser dans la tête. L’épée qu’il tenait lui échappa des mains et tomba au sol dans un clang métallique.

    Ce jeune homme dont émanait un aura noble n’était autre que la source de toutes ses poisses de ces deux derniers mois — Jìng.

    Jìng l’avait vu aussi. Un sourire étrange étira le coin de ses lèvres :

    « … Tiens, ce ne serait pas le petit frère* Cāng ? »

    Un frisson glacé traversa Lù Cāng de part en part, et il resta muet, incapable de prononcer un mot.

    Cáo Xìn, qui se trouvait à côté de lui, se pencha :

    « Grand frère, tu le connais ? »

    « Ah… Euh… On peut dire ça comme ça…  »

    Sentant Jìng s’approcher, Lù Cāng recula instinctivement — mais une chaise bloqua son mouvement. Jìng le poussa nonchalamment, le forçant à s’asseoir dessus, malgré lui.

    «  Ah, ainsi ce client est une connaissance du jeune maître Jìng ? Aiya, pourquoi ne pas l’avoir dit plus tôt…   »

    La maquerelle, avec un sourire professionnel au lèvre, s’approcha des deux hommes.

    «  En vérité, en le voyant, je m’étais déjà dit qu’il n’était pas un homme ordinaire. C’est pourquoi j’ai expressément demandé à notre meilleure fille, YuèWēi, de le servir…   »

    Lù Cāng ne savait pas s’il devait rire ou pleurer devant ce changement d’attitude. Mais avec le regard glacial de Jìng planté sur lui, il fut incapable d’aligner la moindre phrase.

    Et bien sûr, Cáo Xìn, toujours aussi peu clairvoyant, trouva encore le moyen d’en rajouter à côté :

    «  Grand frère, depuis quand tu connais une personne aussi fascinante ? Allez, présente-le-moi !  »

    Merde, quel abruti celui-là… pesta intérieurement Lù Cāng, avant de balbutier :

    «  C’est… C’est quelqu’un que j’ai rencontré à la capitale…   »

    Il se rappela soudain qu’il ne connaissait même pas le nom de famille de Jìng, et lui lança un regard suppliant.

    Jìng sourit, toujours aussi éblouissant :

    «  Je me nomme humblement Yuán*…   »

    «  Enchanté, Maître Yuán !  » s’exclama Cáo Xìn en joignant les poings* pour le saluer.

    Jìng acquiesça d’un léger mouvement de tête, puis se tourna vers la maquerelle :

    «  Que s’est-il passé avec mon frère ? Pourquoi se battait-il avec le capitaine Wú et les autres ?  »

    La maquerelle était, elle aussi, en nage — elle n’aurait jamais dû offenser un ami de Jìng.

    «  Un malentendu, un simple malentendu… Nous préparions la salle pour l’arrivée du jeune maître Jìng, comme d’habitude. Mais ce jeune homme refusait obstinément de partir, alors une dispute a éclaté avec le capitaine Wú… Nous ne savions vraiment pas qu’il s’agissait de l’ami du jeune maître.  »

    «  Oh ? Alors frère Cāng est venu ici pour se divertir avec les filles ?  »

    Le ton de Jìng était léger, presque moqueur, mais son sourire glaça Lù Cāng jusqu’aux os — pire qu’une lame sur la gorge.

    «  Ah… Ah…   » Lù Cāng ne savait absolument pas quoi répondre, alors il lâcha quelques sons pour gagner du temps.

    «  Grand frère, il fait super frais ici, pourquoi tu transpires autant ?  » demanda encore Cáo Xìn, complètement à côté de la plaque.

    Lù Cāng n’avait même plus la force de le maudire.

    Il avait déjà expérimenté plus d’une fois les méthodes terrifiantes de Jìng — lui, qui n’avait jamais eu peur de rien ni de personne, avait réellement connu la peur lorsque Jìng l’avait forcé à lui faire une fellation.

    Jìng rit en entendant Cáo Xìn, puis se tourna vers ses suivants :

    «  Le jeune maître Lù est un ami à moi. C’est un heureux hasard qu’on se retrouve ici. Allez attendre dehors.  »

    Quand le capitaine Wú et les gardes furent sortis, il se tourna de nouveau vers la maquerelle :

    «  Aujourd’hui, laisse les Douze Fleurs Célestes nous servir. Toi, tu peux aller te reposer.  »

    La maquerelle s’éclipsa promptement. Les Douze Fleurs Célestes s’approchèrent, formèrent une ligne bien ordonnée et saluèrent d’une voix harmonieuse :

    «  Mille bénédictions au Jeune maître Jìng —  »

    «  Levez-vous !  »

    Jìng agita la main avec nonchalance, puis attira YuèWēi contre lui :

    «  Xiao Wēi, on dirait que tu es encore plus jolie qu’avant ?  »

    «  Le jeune maître Jìng me flatte…   » répondit YuèWēi, aussi douce qu’une eau d’automne*, tout en se blottissant dans ses bras.

    Puis, feignant l’indifférence, Jìng tira Lù Cāng pour le faire asseoir sur la chaise juste à côté de la sienne, avant de se tourner vers les autres courtisanes :

    «  Allez, mes beautés, asseyez-vous toutes aussi.  »

    D’un geste nonchalant, il désigna deux jeunes femmes :

    « Vous deux, occupez-vous de l’ami du jeune maître Lù. »

    Collé par deux beautés et charmé par quelques mots doux, Cáo Xìn en avait les os ramollis. Comment aurait-il pu remarquer l’expression étrange de Lù Cāng, que Jìng maintenait fermement par le bras ?

    Lù Cāng, voyant YuèWēi sourire dans les bras de Jìng, radieuse comme une brise de printemps, ressentit une émotion difficile à décrire. Avec une gueule pareille, pas étonnant que les femmes lui tombent dans les bras…

    Alors pourquoi est-ce qu’il passe son temps à venir me chercher, hein ? !

    Perdu dans mille pensées emmêlées, Lù Cāng sentit soudain une main soulever le bas de sa robe et grimper le long de sa cuisse.

    Il lança un regard furieux à Jìng, mais celui-ci affichait un air paisible, tenant toujours YuèWēi contre lui pendant qu’ils bavardaient et riaient tranquillement. Impossible de deviner que sa main droite s’affairait discrètement sous la table.

    Cette main agile glissa avec dextérité le long de sa taille, puis plongea vers une zone bien plus sensible. Le visage de Lù Cāng vira immédiatement au rouge, et il tenta à la hâte d’attraper cette main indécente qui s’agitait sans vergogne.

    Mais Jìng ne comptait pas le laisser s’en tirer si facilement. Il tourna légèrement la tête, l’air souverain, tranquille, presque détaché :

    « Petit frère Cāng, comment se fait-il que tu sois d’aussi bonne humeur aujourd’hui ? Tu as pensé à venir t’amuser à la Maison Tóng’huā ? »

    Lù Cāng luttait de toutes ses forces pour immobiliser cette main obscène, mais aussi étonnamment puissante. Pris de court par cette question, il balbutia un moment, et juste avant qu’il ne puisse répondre, Cáo Xìn intervint, tout content de prendre la parole :

    « C’est parce que je suis venu rendre visite à Grand Frère aujourd’hui, alors il m’a emmené ici pour me faire découvrir un peu la capitale. »

    En entendant ça, Lù Cāng paniqua. Si jamais Jìng se mettait en colère contre Cáo Xìn, ce serait de sa faute à lui. Il s’empressa de répliquer :

    « Non, non, c’est moi qui voulais venir, ça n’a rien à voir avec Troisième-frère… »

    Il lança un regard anxieux à Jìng, et croisa pile son regard. Un frisson glacé le parcourut. Les yeux de Jìng étaient d’un calme plat, impossible à lire — dénué d’émotion. C’était justement cette expression que Lù Cāng craignait le plus : il ne pouvait jamais deviner quelles pensées terrifiantes se cachaient derrière.

    « Vous avez l’air proches, ton petit frère et toi. Vous venez même aux bordels ensemble… Vous savez vivre, hein. »
    Le ton de Jìng était léger, presque désinvolte, mais Lù Cāng sentit tous les poils de son dos se hérisser.

    Cáo Xìn, complètement inconscient, renchérit joyeusement :

    « Mais oui, mais oui, Grand Frère et moi, on est inséparables. À la montagne… Euh, je veux dire à Hángzhōu, on allait tout le temps ensemble dans les bordels du centre-ville. »

    Lù Cāng le maudit en silence pour ne rien capter à la situation*, et regarda avec horreur l’expression de Jìng s’assombrir de plus en plus.

    Tout à coup, Jìng retira sa main de sous la tunique de Lù Cāng et se leva d’un coup :

    « Il est déjà tard. C’est une si belle nuit de printemps, ce serait du gâchis de la passer à rien faire. Yù Róng, Yōu Lán, et vous deux là-bas… » Il désigna quatre fleurs célestes au hasard.

    « Vous, ce soir, vous vous occuperez bien de jeune maître Cáo. »

    Lù Cāng vit clairement Jìng faire un clin d’œil à Yù Róng tout en parlant. Elle lui répondit par un sourire entendu. Il comprit aussitôt qu’ils allaient faire payer quelque chose à Cáo Xìn. Il s’apprêtait à intervenir, mais ce dernier, l’air ravi, avait déjà sauté sur l’occasion pour le remercier à tout-va :

    « Ah… Ah… Je ne suis qu’un homme sans prestige, je ne mérite pas tant de beauté… Jeune maître Yuán est vraiment trop généreux… »

    Jìng eut un soupir d’agacement, mais répondit tout de même avec patience :

    « Tu es un ami de frère Cāng, comment pourrais-je ne pas bien t’accueillir ? Yù Róng, emmène-le donc vers une chambre VIP dans l’arrière-cour. »

    « Bien. »

    Yù Róng s’inclina respectueusement, puis, avec un sourire délicat, prit Cáo Xìn par le bras :

    Jeune maître Cáo, c’est une délicate attention de la part du jeune maître Jìng, vous ne pouvez tout de même pas la refuser. Venez donc prendre un peu de bon temps avec moi. Ne faisons pas attendre nos deux jeunes maîtres, ils souhaitent… Passé du bon temps ensemble.

    « Que… ? »

    Le visage de Lù Cāng vira aussitôt au cramoisi. Il allait se lever, mais Jìng le retient sur place d’une main ferme.

    « Ah, pardon, pardon, je me suis mal exprimée. Je voulais dire qu’ils souhaitent passé du bon temps avec les sœurs ici présentes. »

    Yù Róng se dépêcha de corriger son lapsus, même si, intérieurement, elle ne comprenait pas bien la réaction démesurée de Lù Cāng.

    Cáo Xìn avait enfin été emmené de force. Dans l’immense salle, il ne restait plus que Jìng, Lù Cāng, et les demoiselles aux allures de divinités du Yáo Chí*, ces fées fleurs vêtues comme des immortelles.

    Lù Cāng avait bien du mal à supporter cette atmosphère oppressante. Il attendit un bon moment, voyant que Jìng n’avait aucune intention de prendre la parole, il se leva avec hésitation, tremblant presque :

    « Je… Je… Je vais y aller en premier… »

    « Assieds-toi ! ! ! »

    Éclata Jìng, le visage sombre tout en le força violemment à se rasseoir.

    « Cuì Juān, va préparer la suite Huā Yuè. C’est là que je dors ce soir. Et vous, là — allez l’aider. »

    Après avoir désigné trois ou quatre jeunes filles, Jìng les regarda monter les escaliers docilement. Puis, soudain, il serra fort dans ses bras un Lù Cāng livide, figé sur sa chaise.

    « Qu’est-ce que tu fais… Non ! Non ! »

    Lù Cāng poussa un cri paniqué. Mais ses jambes étaient fermement bloquées ; il n’avait d’autre choix que de marteler le dos de Jìng de ses poings.

    « Qui aurait cru que Maître Jìng avait ce genre de penchants… »

    Yuè Wēi éclata soudain de rire derrière eux en dissimulant sa bouche, tout en regardant fixement Lù Cāng avec une curiosité insistante.

    Être ainsi humilié par Jìng, devant la fille qu’il aimait, mit Lù Cāng hors de lui, entre honte et colère. Son regard se posa alors sur la dague accrochée à la taille de Jìng. Un flot d’émotions troubles lui monta à la tête — impossible à contenir. Il tendit la main et arracha l’arme.

    « Maître Jìng, attention ! » cria Yuè Wēi, affolée.


    ・.ʚ Voilà la fin du chapitre ɞ .・

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