02. Service sauté
by Ruyi ♡Le fait d’avoir sécher les cours ne signifiait pas qu’on pouvait éviter d’aller en classe le lendemain.
Ce matin-là, Xia Yuhao traînait des pieds, son sac à l’épaule. Il n’avait toujours pas apporté ses affaires, et pour cause : il n’avait jamais voulu venir ici. Ce transfert n’était pas un choix. Un sale type, qui harcelait des élèves de son ancien lycée, avait croisé sa route. Xia Yuhao lui avait réglé son compte dans la rue. Résultat : l’affaire avait été considérée comme une bagarre, et le gars en question avait porté plainte auprès de l’administration. Il avait même menacé de faire scandale dans les médias.
Xia Yuhao s’était immédiatement fait expulser.
Le directeur, incapable de gérer la situation, avait opté pour une solution radicale : le transférer au plus vite dans un autre établissement. Ses dossiers avaient été effacés, son passé enterré.
Cependant, il ignorait quelles ficelles sa mère, PDG d’un groupe financier coté en bourse, avait bien pu tirer, mais en un clin d’œil, il avait été accepté dans un nouveau lycée, et l’incident avait mystérieusement disparu de son dossier. Ainsi, l’argent fait tourner les meules du diable*. Sa mère avait sans doute « fait don » d’une somme rondelette à cette école notoirement pauvre.
(N/T : Cette expression imagée signifie que l’argent alimente les mauvaises actions, ou qu’il est souvent la source de corruption, de péchés ou de comportements destructeurs.)
Il soupira, debout devant sa nouvelle école.
Pourquoi les gens sont-ils obligés d’aller en cours, au juste ?
Nouvelle école, nouveaux professeurs, nouveaux camarades… Rien de tout cela ne l’intéressait. Il avait toujours préféré rester seul, et n’avait jamais eu de véritable ami. À dix-sept ans, il se sentait plus seul que jamais, sans but, sans espoir, sans idée de ce que la vie pouvait bien vouloir dire.
Ce n’était sûrement pas dans une salle de classe qu’il trouverait cette réponse.
Et encore moins dans ce fichu gymnase.
Quand l’instructeur, un homme grassouillet, l’avait croisé plus tôt dans la matinée, il l’avait entraîné dans son bureau pour lui passer un savon. Puis, il avait ajouté qu’en échange de sa participation à l’équipe de volley-ball, il fermerait les yeux sur son absence de la veille.
Bien entendu, Xia Yuhao n’en avait aucune envie. Il détestait ce genre de sport d’équipe. Pourquoi irait-il transpirer aux côtés d’un groupe de mecs puants, tout ça pour une foutue balle ? Ignorant l’homme, il avait tourné les talons et s’était rendu en classe.
Il s’était affalé sur son bureau, sac par terre, prêt à piquer un somme.
Mais c’était sans compter sur la professeure Zong Zhong. Elle l’avait rapidement repéré, interpellé et entraîné dehors pour lui parler de l’équipe de volley. Elle aussi voulait qu’il en fasse partie.
Mais qu’est-ce qu’ils ont tous avec ce fichu volley-ball ?
Avec un enthousiasme accablant, elle lui avait servi tout un discours :
« Premièrement, quelqu’un t’a recommandé. Deuxièmement, je ne suis pas seulement ton enseignante, je suis aussi l’entraîneuse de l’équipe de volley-ball. Tu maîtrises certains gestes techniques qu’on n’apprend pas facilement. Troisièmement, faire partie d’un club peut t’aider à te faire des amis. Quatrièmement, la vie doit avoir un axe, un centre d’intérêt. Sinon, tu t’ennuies, tu dors en classe et tu passes tes nuits à traîner sans but. Tu es arrivé hier et tu dors déjà sur ta table. Tu trouves ça normal ? »
Et ce n’était que le début. Elle avait continué à débiter ses arguments sans reprendre son souffle. Lorsqu’elle arriva au quinzième point, Xia Yuhao finit par céder, épuisé.
Qu’elle se taise. Je ferai n’importe quoi, juste pour qu’elle se taise.
C’est ainsi qu’il se retrouva, en cet instant précis, dans le gymnase à observer une bande d’idiots transpirant bruyamment « la sueur de leur jeunesse ».
Je comprends pas… Qu’est-ce qu’il y a de si amusant à se battre pour une petite balle ?
Peu importe. Je vais rester ici quelques jours, juste le temps que les adultes me lâchent la grappe.
Le bruit des ballons frappant le sol résonnait sans cesse dans le gymnase.
Paf ! Paf !
Cela faisait déjà un bon moment qu’il attendait sur le côté. Personne n’était venu lui parler. Il s’ennuyait à mourir. Lorsqu’une balle roula jusqu’à ses pieds, il leva distraitement la jambe, prêt à lui donner un coup.
Mais soudain, une main jaillit et saisit sa cheville. Il sursauta. Un lycéen aux lunettes carrées le fixait d’un regard glacial.
« Ce n’est pas parce que tu ne respectes pas ce sport que les autres doivent en faire autant. Aie un minimum de considération. »
Même sa voix était glacée.
Xia Yuhao retira brutalement sa jambe, les sourcils froncés.
« Je ne suis pas là parce que j’en ai envie, ok ? »
« Alors la sortie est juste là. Tu n’as qu’à partir. »
Le garçon, sans même attendre de réponse, ramassa la balle avec aisance et la lança vers la porte.
Ce mec est musclé, il saute bien, mais quel sale caractère… Et surtout, quel manque de respect !
« Hé… ! Hé ! »
Non mais c’est quoi ce type ? ! Il me snobe ? !
Furieux d’être traité comme un moins que rien, Xia Yuhao s’approcha d’un pas sec, arracha la balle des mains du garçon, puis se dirigea vers le terrain.
Tu veux jouer à ça ? Parfait.
Il lança la balle de toutes ses forces : elle passa au-dessus du filet en un éclair et alla frapper violemment le mur opposé.
Tous les regards se tournèrent vers lui.
Il redressa fièrement la tête, fixa Qiu Zixuan et déclara :
« Il s’agit juste de frapper une balle de l’autre côté. Même un cochon pourrait y arriver. »
Silence. Stupéfaction. Et maintenant… Hostilité.
Il ne s’en rendit pas compte immédiatement, mais à cet instant, il venait de se faire un ennemi de chaque membre de l’équipe.
Après ça, ce gars sera obligé de reconnaître mon talent. Il viendra me supplier de rester, et là… Je le remettrai à sa place.
Mais ce fut tout l’inverse.
« Oui, c’est vrai. Même les cochons peuvent le faire… Les cochons comme toi. Tellement idiots qu’ils ne savent même pas ce que sont les lignes du terrain. Tu viens de marcher dessus, ta balle est hors-jeu. C’est un point pour l’adversaire. »
Qiu Zixuan s’était simplement redressé, avait ajusté ses lunettes, et n’avait pas même haussé un sourcil.
Xia Yuhao baissa les yeux. Effectivement, son pied dépassait de la ligne.
Putain.
« Balle ! » Lança Qiu Zixuan.
Quelqu’un lui envoya une balle, qu’il réceptionna sans effort.
Il s’avança lentement vers la ligne de fond, sur le côté droit du terrain, puis lança froidement :
« Voici la ligne. Souviens-t’en, cochon. »
Ricanements autour de lui. Tous les joueurs affichaient le même sourire moqueur.
La colère de Xia Yuhao monta en flèche.
« Attaquant ! »
La voix de Qiu Zixuan claqua dans le gymnase.
La balle bondit au-dessus du filet. Chen Jiajun la réceptionna, un autre joueur fit une passe, Chen avança et… Smash ! Un coup sec, direct, brutal.
La balle s’écrasa aux pieds de Xia Yuhao.
Comme si elle avait été lancée exprès pour le frapper.
Chen Jiajun échangea un sourire avec Qiu Zixuan, qui acquiesça calmement.
« Parfait. »
Puis, se tournant vers Xia Yuhao, il ajouta :
« Là où tombe la balle, c’est là que tu dois être. C’est ce qu’on appelle une formation. Tu piges, cochon ? »
Ce type…
Xia Yuhao se rua en avant, saisit Qiu Zixuan par le col et arma le poing.
« Tu n’es qu’un… ! »
Mais son regard croisa à nouveau celui de l’autre. Ce calme froid, cette arrogance tranquille…
Son cœur se serra, sa colère vacilla.
« Tu ne sais parler qu’avec les poings ? » Lança Qiu Zixuan, sans ciller, d’une voix encore plus froide.
« Tu… ! »
Bon sang !
Xia Yuhao avait clairement envie d’écraser la tête de ce type contre le mur, mais pourquoi n’y arrivait-il pas ?
Il détestait ce regard hautain que ce gars posait sur lui !
« Tout va bien ! »
Un joueur souriant s’approcha de lui, saisit Qiu Zixuan par l’épaule et le tira à ses côtés.
« Je suis He Chengen, capitaine de l’équipe de volley-ball. Tu es Xia Yuhao, c’est bien ça ? »
Jetant un œil à Qiu Zixuan, il ajouta avec enthousiasme :
« J’ai adoré ta détente et la puissance de ton bras. Pas étonnant que Zixuan soit impressionné par toi ! »
« Hé ! »
Qiu Zixuan l’interrompit brusquement, en lui donnant un coup de coude à l’estomac tout en repoussant son bras de son épaule.
« Il a déjà dit qu’il ne voulait pas rejoindre l’équipe de volley. »
Xia Yuhao se sentit satisfait. Il avait bien deviné : ce He Chengen avait l’air d’un mec facile à frapper, mais il était bien plus costaud que prévu. Il aurait bien aimé se battre, mais le reste de l’équipe l’entourait déjà. Il n’était pas assez stupide pour se lancer là-dedans.
Il renifla avec mépris, se retourna pour quitter le gymnase, mais entendit soudain He Chengen derrière lui :
« Tu sais qu’on a été dans le top 12 du Groupe A l’année dernière ? »
Xia Yuhao s’arrêta. Et alors ? Ça me concerne ? Mais ce simple arrêt suffit à He Chengen pour se rapprocher, comme s’il avait flairé une ouverture.
« Hé. » soupira ce dernier, sur un ton exagérément dramatique. « Malheureusement, Zi Xuan s’est blessé en milieu de saison l’année dernière… Sinon, on aurait largement pu finir dans le top 3. »
Cette phrase réussit à piquer la curiosité de Xia Yuhao.
Ce type aux lunettes, qui a l’air trop faible pour tenir face au vent… Il est vraiment aussi fort que ça ?
Son regard glissa malgré lui vers Qiu Zixuan. Il le vit fixer les joueurs qui s’entraînaient, un mélange d’envie et de tristesse sur le visage.
Il aime vraiment ce sport, hein…
« Il ne peut plus jouer ? » demanda Xia Yuhao à mi-voix.
He Chengen acquiesça avec un soupir.
« Malheureusement, Zixuan était le meilleur attaquant du championnat. Il a même été titré deux années de suite. »
Xia Yuhao, pris de court, ressentit un pincement au cœur.
Un joueur aussi talentueux, obligé d’arrêter à cause d’une blessure ? Ce gars semblait vraiment aimer le volley-ball…
En sentant son regard posé sur lui, Qiu Zixuan tourna la tête. Leurs yeux se croisèrent. Xia Yuhao grimaça, détourna la tête brusquement, et tenta de se dégager du bras de He Chengen, mais celui-ci ne le lâchait pas.
Ils se débattaient encore quand une voix furieuse retentit à l’entrée du gymnase :
« Xia Yuhao ! Je savais que tu foutrais le bordel ! Direction le bureau du prof ! Cette fois, tu ne m’échapperas pas ! »
C’était l’instructeur de la veille, celui qui l’avait déjà pris en chasse.
« Professeur, on faisait juste semblant ! » s’exclama Qiu Zixuan en accourant.
Il lança un clin d’œil rapide à He Chengen, qui comprit aussitôt le message.
« Oui, Prof ! J’étais juste en train de sympathiser avec mon petit frère ! » lança He Chengen avec un grand sourire. Il donna même une tape sur la poitrine de Xia Yuhao. « Pas mal du tout, tes pectoraux ! Tu t’entraînes à la salle, hein ? »
Xia Yuhao lui lança un regard noir, partagé entre l’embarras et l’incompréhension. Pourquoi est-ce qu’il prend ma défense, ce type ?
L’instructeur resta suspicieux.
« Ne couvrez pas ce vaurien ! »
Il n’arrivait pas à croire que l’équipe de volley l’avait accepté aussi facilement.
Qiu Zixuan s’interposa devant Xia Yuhao, lui tapa l’épaule et répondit avec un sourire :
« On plaisantait, c’est tout. Désolé d’avoir donné une mauvaise impression, professeur. »
L’instructeur vit bien qu’ils protégeaient volontairement Xia Yuhao, mais il décida de ne pas insister.
Il fixa Xia Yuhao du regard.
« Bon, si vous plaisantiez, je vais rester observer votre entraînement. Xia Yuhao, tu veux rejoindre l’équipe, hein ? Allez, dépêche-toi, va t’échauffer ! »
Xia Yuhao n’eut même pas le temps de répliquer.
« Aucun problème, professeur ! » dit immédiatement He Chengen. « Je vais l’emmener se changer tout de suite. »
Xia Yuhao fulminait intérieurement.
Il avait envie de repousser violemment He Chengen et de hurler : Lâche-moi ! Je ne veux PAS entrer dans ton équipe à la con !
Mais il savait que tant que ce prof le surveillait, il n’avait pas le choix. Il devait lui faire croire qu’il coopérait, le temps de le faire lâcher prise. Ensuite, il pourrait disparaître pour de bon.
Juste cette fois.
Il jouerait la comédie pour ce fichu instructeur. Après ça, plus jamais il ne mettrait les pieds ici.
Il enfila sa tenue de sport à contrecœur, et se posta sur le bord du terrain avec une mine sombre. Les autres joueurs étaient déjà en train de s’échauffer, mais lui ne bougeait pas. Il observait la scène en silence, comme un spectateur.
« Xia Yuhao, tu comptes rester planté là combien de temps ? Tu vas t’entraîner ou pas ? »
Xia Yuhao serra les poings. Il ravala sa colère. De toute façon, les autres avaient bien vu qu’il n’avait aucune intention d’intégrer l’équipe. Aucun d’eux ne voulait s’entraîner avec lui.
He Chengen s’approcha calmement et lui dit :
« C’est ton premier jour, alors on va faire simple. Choisis une seule personne avec qui t’entraîner. Si tu arrives à intercepter au moins une balle sur dix, tu peux sauter le reste de l’entraînement. Qu’est-ce que tu en dis ? »
Il jeta un coup d’œil à l’instructeur, qui haussa un sourcil mais ne dit rien. Pas une mauvaise méthode pour l’éjecter dès aujourd’hui, pensa-t-il.
Xia Yuhao hocha la tête, prêt à relever le défi.
« J’arrive ! » lança Chen Jiajun, qui se porta volontaire avec un sourire moqueur.
Il regarda Xia Yuhao avec dédain.
Pourquoi ce type aurait-il le droit d’intégrer l’équipe sans même passer un test d’aptitude ? Juste parce que Zixuan et Zongzhong l’ont recommandent ?
Chen Jiajun voulait lui faire comprendre que le volley, ce n’était pas un jeu.
Mais Xia Yuhao ne lui accorda même pas un regard. Il fixa directement Qiu Zixuan.
« Toi. Oui, toi. Je vais intercepter ta balle. »
Il n’avait pas oublié la honte qu’il lui avait dit plutôt. Ce surnom de « cochon »… Il devait le lui faire payer.
« Zi Xuan est le manager du club… » tenta de protester He Chengen.
Mais Xia Yuhao le coupa net.
« Je m’en fiche. C’est lui que je veux. »
Il se montrait autoritaire et n’acceptait aucun refus. Il ne voulait que lui. Cette déclaration à demi-mot avait presque des accents de revendication.
Qiu Zixuan répondit aussitôt, d’un ton glacial :
« Je n’ai pas le temps. Je vais entraîner un autre joueur. »
Il se détourna aussitôt, concentré sur ceux qui s’exerçaient encore sur le terrain.
Mais Xia Yuhao n’avait aucune intention de se laisser ignorer. Ce ton froid, cette façon de le balayer du regard comme s’il n’existait pas… Non. Il fit un pas en avant et saisit fermement le poignet de Qiu Zixuan.
« Pourquoi ? Tu as peur que je rattrape ton service et que ce soit gênant pour toi ? Tu serais aussi timide que ça ? »
Il voulait voir de ses propres yeux ce que valait ce soi-disant meilleur attaquant de deux tournois consécutifs. Que ce Qiu Zixuan lui montre donc à quel point il était « incroyable ».
He Chengen voulut réagir, mais Qiu Zixuan leva une main pour le faire taire. Puis, il tourna la tête vers Xia Yuhao. Son regard, derrière les verres de ses lunettes, brillait d’un éclat intense.
« Très bien. Ne viens pas pleurnicher quand tu perdras. »
Défi accepté.
Hsia Yu Hao s’accroupit au sol et frappa violemment la paume de ses mains contre le parquet.
Bordel, comment on est censé attraper la balle de ce type ? !
Il avait pourtant toujours cru que le volley-ball était un jeu simple…
Pour ne pas admettre sa défaite, et surtout pour ne pas se retirer devant tout le monde, il prit le risque de réveiller sa propre blessure. Il sauta en prenant appui sur son pied gauche. Une douleur aiguë le transperça aussitôt, manquant de le faire chuter.
He Chengen se précipita pour le soutenir, l’empêchant de s’effondrer.
« Accroche-toi à moi. »
Qiu Zixuan, quant à lui, le regarda froidement et déclara d’un ton sec :
« Tu as perdu. »
Ces trois mots vinrent ébranler de plein fouet l’orgueil de Hsia Yu Hao.
Du côté du terrain, les entraîneurs s’attendaient à voir le jeune homme répliquer ou s’élancer à nouveau. Mais, contre toute attente, il se releva, arracha son haut de sport dans un geste agacé — dévoilant au passage un torse bien dessiné —, puis tourna les talons.
« Il abandonne ? ! Il ne va plus s’entraîner ? ! »
« Hsia Yu Hao ! Où est-ce que tu vas ? ! » cria l’instructeur.
« À la bibliothèque, pour étudier ! »
Personne n’y croyait une seule seconde. Lui le premier.
Dès qu’il quitta le gymnase, il se dirigea droit vers le portail de l’école. Il ne voulait plus rester dans cet endroit une seule seconde.
Mais l’image du smash de Qiu Zixuan le hantait toujours. À cet instant, ce dernier avait semblé briller. Il y avait quelque chose dans sa posture, dans la manière dont il avait lancé son service, qui avait figé Hsia Yu Hao. C’était comme s’il avait vu son cœur vibrer. Une drôle d’émotion avait surgi en lui.
Certaines personnes deviennent éblouissantes quand elles font ce qu’elles aiment…
Mais ça ne voulait pas dire qu’il aimait Qiu Zixuan !
Il n’intégrerait jamais cette stupide équipe de volley-ball. Que l’instructeur abandonne cette idée. Il s’en fichait complètement. Et si jamais ça devenait trop insupportable, il changerait encore d’école. Point.
« Hsia Yu Hao ! »
Une voix féminine s’éleva derrière lui.
Il se retourna. Une jolie fille en uniforme se tenait là. Son visage lui semblait vaguement familier, mais il n’arrivait pas à remettre un nom dessus.
La jeune fille, visiblement timide, s’approcha.
« Tu te souviens de moi ? »
« T’es qui, toi ? »
Son ton était sec. Il était encore agacé par ce qui s’était passé. En vérité, il n’avait jamais été très intéressé par les filles. L’expression de la jeune fille changea.
« Tu ne te souviens vraiment pas de moi ? Ce n’est pas pour moi que tu as été transféré ici ? »
Il la fixa un instant, cherchant dans sa mémoire. Rien ne lui revenait. Il haussa les épaules, tourna les talons et recommença à s’éloigner.
« Attends un peu ! Tu te rappelles pas ? Ce jour-là, dans la rue, j’ai été harcelée par des voyous. C’est toi qui es intervenu et les a fait fuir ! J’ai appris ensuite que tu avais failli te faire virer et que tu avais été transféré ici à la place. »
Ah… Voilà pourquoi elle me disait quelque chose.
Il s’en souvenait maintenant. En fait, il n’avait pas supporté de voir quelqu’un se faire malmener. Et comme il était déjà de mauvaise humeur, il s’était jeté dans la bagarre. Ce n’était pas parce qu’il avait eu un quelconque sentiment envers cette fille.
« Et donc ? Ils t’embêtent encore, ces mecs-là ? » demanda-t-il.
La fille secoua vivement la tête.
« Non, même après ton transfert, ils ont trop peur de toi. Ils ne m’ont plus jamais approchée. »
Alors qu’il s’apprêtait à repartir, elle cria à nouveau :
« Attends un peu ! J’ai mis un temps fou à te retrouver. Je peux au moins t’offrir un repas ? Après tout, tu t’es fait transférer à cause de moi… »
« Mademoiselle, ne t’imagine pas des choses. J’avais juste envie de me battre, c’est tout. » lâcha-t-il d’un ton impatient.
« Mais… Tu les as chassés. Tu m’as sauvée. Depuis ce jour, je… Je vais bien grâce à toi. »
Hsia Yu Hao l’interrompit sans ménagement :
« Ne te fais pas de film. C’est rien. Oublie. »
« Attends ! »
Elle serra les poings, frustrée. Pourquoi est-ce qu’il me repousse comme ça ? Beaucoup de garçons seraient ravis qu’une fille comme moi les aborde…
« Je peux au moins être ton amie ? Je… J’ai pas beaucoup d’amis. »
Il se retourna finalement. La dévisagea de la tête aux pieds, avant de lâcher, narquois :
« Avec un tel visage et tu n’as pas d’amis ? C’est quoi le problème alors ? Tu es méchante ? Tu aimes foutre la merde et colporter des ragots ? Ou tu piques les mecs des autres ? »
La fille ouvrit de grands yeux, choquée. Elle ne savait pas quoi répondre.
« Comment tu peux dire un truc pareil… »
Puis elle se ravisa et tenta maladroitement de corriger le tir.
« Je veux dire… Tu peux pas dire ça aux gens… Enfin… Oh là là… Attends, Hsia Yu Hao ! »
Après l’école, Xia Yuhao ne rentra pas chez lui. Au lieu de cela, il se rendit dans une rue animée du centre-ville, connue pour ses bars. Certains d’entre eux commençaient tout juste à ouvrir leurs portes pour la soirée. Il entra dans l’un d’eux, ôta son uniforme scolaire et enfila celui d’un serveur. C’était son travail nocturne.
Ce n’était pas qu’il manquait d’argent. Sa mère lui en donnait une bonne somme chaque mois. Il n’avait simplement pas envie de rentrer dans une maison où l’attendaient des employés froids et impersonnels. Ce lieu n’avait rien d’un foyer. Pour lui, c’était juste un hôtel dans lequel il passait la nuit.
Le soir tomba peu à peu, et le bar se remplit d’hommes et de femmes venus chercher un peu de plaisir. Xia Yuhao allait et venait entre les tables, servant de l’alcool. Tandis qu’il passait près du comptoir, son regard fut attiré par un homme qui, discrètement, sortait quelque chose de sa poche. L’homme l’ajouta au Long Island Iced Tea qu’il venait de commander. Intrigué, Xia Yuhao observa la scène de plus près.
Ce n’est pas juste un thé glacé, pensa-t-il. C’est l’une des boissons les plus fortes qu’on puisse trouver dans ce genre d’endroit. Beaucoup de types en profitent pour saouler les filles naïves avec ça.
L’homme poussa le verre vers une jeune fille à l’air innocent. Elle semblait réticente, mais il insista. Elle finit par porter le verre à ses lèvres.
C’est à cet instant que Xia Yuhao vit le coin des lèvres de l’homme se relever en un sourire narquois. Il n’attendit pas une seconde de plus.
« Ne bois pas ça ! » lança-t-il.
La jeune fille sursauta, confuse. L’homme fronça les sourcils, irrité. Avant qu’il ne puisse dire quoi que ce soit, Xia Yuhao attrapa sa chemise et, d’un geste rapide, sortit de sa poche une petite capsule plastique contenant une pilule blanche.
« Tu viens de mettre ça dans son verre, hein ? »
Pris sur le fait, l’homme voulut balbutier une excuse, mais la fille le gifla violemment.
« Espèce de dégueulasse ! Tu voulais me droguer ? ! »
Elle prit son sac et s’enfuit, furieuse.
L’homme, humilié, se retourna vers Xia Yuhao avec un regard noir et pointa un doigt accusateur vers lui.
« Tu aurais mieux fait de te mêler de tes affaires ! »
« Dans ce bar, l’usage de drogues est strictement interdit. Et toi, tu n’es plus le bienvenu ici », répondit froidement Xia Yuhao en frappant le comptoir du plat de la main.
L’homme, hors de lui, jeta un regard haineux au jeune serveur avant de partir.
Xia Yuhao terminait généralement son service à 23 heures. Le propriétaire du bar, bien qu’il l’apprécie, ne voulait pas qu’un lycéen travaille trop tard. Il tenait à ce qu’il dorme suffisamment avant les cours du lendemain.
Ce soir-là, après avoir fini, il sortit par la porte de derrière. Mais à peine avait-il mis le pied dans la ruelle qu’il s’arrêta net.
L’homme de tout à l’heure l’attendait, accompagné de quelques amis. Tous avaient l’air menaçant.
« Tu as un sacré sens de la justice, gamin », lança l’un d’eux en souriant froidement.
Xia Yuhao jeta son sac à terre et fit craquer ses articulations.
« Si vous voulez vous battre, allez-y franchement. Je vous ferai aucun cadeau. »
Il n’était pas du genre à se laisser intimider. À son ancienne école, il avait la réputation d’être un dur à cuire. C’était justement à cause d’une bagarre qu’il avait dû changer d’établissement. Et les gars qu’il avait autrefois écrasés n’avaient plus jamais osé embêter la fille qu’il protégeait.
Il avait accumulé trop de colère ces derniers jours. Cette embuscade tombait à point nommé pour la libérer.
Soudain, il entendit un cri derrière lui :
« Attention derrière toi ! »
Il se figea une fraction de seconde. Cette voix…
Trop tard. Un coup de poing le frappa en plein visage. Le choc le fit vaciller. Mais il se reprit aussitôt et se jeta sur son agresseur. Ils roulèrent au sol, se frappant avec rage. Les autres hommes approchèrent pour intervenir, mais quelqu’un surgit de nulle part et renversa un des assaillants.
Un autre homme leva sa jambe pour frapper la tête de Xia Yuhao. Quelqu’un se précipita et bloqua le coup de pied à temps.
« Qiu Zixuan ? ! » s’écria Xia Yuhao, stupéfait en voyant son camarade de classe.
Qu’est-ce qu’il fait ici à cette heure ?
Mais à peine eut-il fini sa phrase qu’il vit Qiu Zixuan tomber à genoux, la main sur sa jambe gauche, le visage crispé de douleur.
Son genou blessé… Il souffre encore ?
Une rage sourde s’empara de Xia Yuhao. Ses coups devinrent plus violents. Il frappa, hurla, donna des coups de pied à ces adultes lâches et cruels. Il voulait leur faire payer. Il voulait les briser pour qu’ils n’osent plus jamais s’en prendre à quelqu’un.
Puis, au loin, des sirènes retentirent.
Quelqu’un avait appelé la police.
Les types, toujours en possession de drogues, prirent la fuite en entendant les sirènes approcher.
Xia Yuhao, lui non plus, ne voulait pas se faire arrêter. Il avait déjà été transféré à cause d’une bagarre. Si la police contactait sa famille… Sa mère risquait de le renvoyer à l’étranger. Il ne voulait pas quitter cette école. Pas maintenant…
Il jeta un coup d’œil à Qiu Zixuan, toujours au sol. Un sentiment diffus l’envahit, quelque chose qu’il n’arrivait pas encore à définir. Un mélange d’inquiétude et d’instinct protecteur.
« Qui se battait ici ? ! » hurla un officier au loin.
Xia Yuhao, le souffle court, s’approcha de Qiu Zixuan et tenta de le relever. Mais ce dernier secoua la tête.
« Pars devant. »
« Qu’est-ce qui se passe ? »
« Mon genou… »
Le souvenir lui revint alors. Qiu Zixuan s’était blessé au genou et avait même dû abandonner le volley-ball, son sport favori.
Sans réfléchir, Xia Yuhao se pencha, plaça les bras de Qiu Zixuan autour de ses épaules et le hissa sur son dos.
C’est alors que la porte arrière du bar s’ouvrit brusquement. Le gérant leur fit signe.
« Dépêchez-vous, entrez vite ! »
Ce chapitre vous est présenté par la Dragonfly Serenade : Traductrice • Ruyi ⋄ Correctrice • Ruyi
・.ʚ Voilà la fin du chapitre ɞ .・
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