Chapitre 02
by Ruyi ♡« Gros incident lors d’un événement de la joaillerie V&A. »
L’employé, qui venait de lire le gros titre, posa le journal à côté de la caisse. Impossible de passer à côté : c’était partout. À la télé, sur Internet, dans toutes les conversations. Tout le monde en parlait.
Un client arriva au comptoir et y déposa le journal, un paquet de chewing-gum, une bouteille d’eau et un magazine masculin.
« Chase Miller fait un carton, hein. »
« Ouais. » répondit l’homme brièvement, d’un ton détaché. L’employé scanna les articles un à un.
« Franchement, ce genre de personne ne devrait même pas être invitée à ce type d’événement. Chase Miller n’a toujours pas réagi, en plus. »
« Ah… Je ne suis pas trop les célébrités. »
Il mentait avec aisance. Ce n’était pas tout à fait faux, il ne s’y connaissait pas vraiment en célébrités. En réalité, il voulait juste régler ses achats et rentrer chez lui.
Au même moment, un autre client se glissa derrière lui et fixa l’employé. Celui-ci leva les yeux. L’homme était plus grand qu’il ne l’aurait cru. Sa chemise masquait son torse, mais on devinait sans peine la carrure imposante qu’elle dissimulait. Surpris, l’employé cligna des yeux, emballa rapidement les articles, et se contenta d’un signe de tête quand le client s’en alla.
Ses yeux suivirent le dos de l’homme qui s’éloignait, tandis qu’un autre client s’approchait du comptoir.
« C’est quoi ce temps que vous avez mis à le servir ? »
« Vous avez vu le visage du mec ? »
Le client lui lança un regard interloqué, mais l’employé marmonna encore, les yeux fixés dans la direction où l’inconnu avait disparu :
« Ce mec-là… C’est forcément un Alpha, non ? »
Le client fronça les sourcils.
« Il ne sentait même pas les phéromones. »
« Mais il est tellement canon ! Bien sûr que c’est un Alpha. »
L’employé semblait complètement fasciné par cet inconnu — mais il ignorait totalement qui il était et où il était passé. Il poussa un soupir, reprit un article, scanna le code-barres.
J’espère qu’il reviendra.
Il jeta un dernier coup d’œil au magasin. Josh, hors de lui, traversait la rue en courant, zigzaguant entre les voitures. Des klaxons retentirent, des conducteurs lui lancèrent des insultes, mais il les ignora et accéléra encore. Il avait déjà trente minutes de retard.
Pourquoi est-ce que ça a pris autant de temps ? Dix minutes, c’était suffisant, mais il a fallu qu’il se mette à parler pour rien dire…
Et en plus, le sujet abordé par le vendeur était justement celui que Josh ne voulait surtout pas entendre.
Depuis plusieurs jours, il entendait parler de Chase Miller à en attraper la migraine. Même en essayant d’y échapper, c’était impossible. À chaque discussion, le nom revenait. Le visage de Chase s’affichait sur les canettes du distributeur automatique, et dès qu’il allumait la télé, on parlait de lui aux infos. Sur les panneaux d’affichage au bord des routes, c’était encore son parfum.
Il était littéralement impossible de vivre dans ce pays sans entendre parler de Chase Miller.
Josh était à bout. Il ravala de justesse les jurons qui lui montaient aux lèvres — il avait déjà vu Pete répéter sans malice un mot grossier qu’il avait entendu par hasard, et en avait été horrifié. Depuis ce jour-là, Josh faisait très attention à ne jamais jurer, même par mégarde. Mais aujourd’hui, c’était un de ces jours où il était presque impossible de se contenir.
C’est en pensant à Pete, et uniquement à lui, qu’il réussit à se calmer. Lorsqu’il arriva enfin chez lui, il fut à deux doigts de pousser un cri de soulagement.
« Pete ! »
Il monta les escaliers trois par trois jusqu’à son étage, ouvrit la porte à la volée et appela son fils. Dans le salon, Pete, qui jouait avec le baby-sitter, tourna la tête et s’écria aussitôt :
« Papa ! »
« Pete ! »
Josh l’attrapa aussitôt dans ses bras et couvrit son visage de baisers. Il était si envahi de bonheur qu’il en avait le souffle coupé. Toute la fatigue de la journée s’envola en un instant. Après cinq longues heures, il retrouvait enfin son fils adoré.
Ce n’est qu’après ces retrouvailles remplies d’émotion qu’il s’adressa au baby-sitter, toujours Pete dans les bras.
« Merci d’avoir veillé sur lui aujourd’hui. »
« Avec plaisir. Pete est adorable, c’est un vrai bonheur. »
Le baby-sitter était un étudiant, un jeune homme simple qui gardait Pete à temps partiel. Josh, qui le dépassait d’une tête, lui sourit.
« Je te demande beaucoup, ces temps-ci. Tu as bientôt des examens, non ? Dis-moi à l’avance si tu ne peux pas venir un jour. »
« Bien sûr, Josh. Je ferai en sorte de venir autant que possible. À bientôt, Pete. »
Après une brève poignée de main avec l’enfant et avoir reçu son salaire, le baby-sitter repartit, laissant Josh seul avec son fils.
Comme toujours, Pete grimpa sur ses épaules et s’y installa avec plaisir. Josh entama les préparatifs du dîner.
« Ouah, ah, baaah ! »
Pete remuait les fesses en produisant des sons étranges.
Sans doute le générique de son dessin animé préféré… Je suppose.
Josh embrassa la jambe potelée de Pete en passant dans la cuisine étroite. Il fit griller un steak, prépara une salade de pommes de terre, et ajouta des haricots pour compléter le plat.
« J’aime pas les haricots ! »
Installé sur sa chaise d’enfant, Pete protesta dès qu’il aperçut les légumes verts.
Josh, en découpant la viande en petits morceaux pour faciliter la prise, expliqua patiemment :
« Les haricots sont les amis des pommes de terre. Ils sont contents d’aller ensemble dans le ventre de Pete. Je les ai convaincus de venir, tu sais. Et Jason serait triste si tu les rejetais, non ? »
Jason était la peluche préférée de Pete, un petit chien. L’argument tenait d’habitude, mais aujourd’hui, Pete n’était pas prêt à céder.
« J’aime pas les haricots ! »
En voyant son fils faire la moue et recracher un haricot, Josh eut un flash. Il pensa brièvement à quelqu’un… À un homme adulte, au visage froid. Mais aucun homme n’était aussi mignon que Pete.
Le visage boudeur de son fils devant les haricots était si attendrissant qu’il ne pouvait qu’abdiquer. Josh embrassa le petit pied potelé, mit les haricots dans un mixeur, les réduisit en purée jusqu’à ce qu’ils disparaissent, et brandit triomphalement l’assiette vide.
« Ennemi anéanti ! »
« Ouais ! Ouais ! »
Pete, ravi, se trémoussait sur sa chaise. Josh lui donna à manger, tout en essuyant avec son mouchoir les restes qui s’accumulaient autour de sa bouche. En regardant cette petite main brandir la fourchette avec application, Josh sentit son cœur exploser d’amour.
Ils marchèrent ensuite lentement dans le salon, Pete blotti contre lui, attendant qu’il s’endorme.
Après l’avoir couché, Josh rangea sommairement, prit une douche, puis sortit une canette de bière.
« Pfiou… »
Un soupir satisfait lui échappa. Sa vie n’était pas luxueuse, mais il n’avait aucune plainte à formuler.
Parfois, il s’imaginait Pete plus grand, quittant la maison pour aller à l’université, et les larmes lui montaient aux yeux… Mais ce jour-là était encore bien loin. Il vida sa bière et alla se coucher.
Quand la sonnerie du téléphone retentit, Josh dormait profondément.
« Oui, allô… Emma ? »
Il se réveilla en sursaut, surpris par la tristesse dans la voix de sa sœur. Il jeta un coup d’œil précipité à l’horloge sur la table de chevet et calcula le décalage horaire avec l’Ouest.
« Oh, Josh… Qu’est-ce que je vais faire ? »
« Pourquoi ? Qu’est-ce qui se passe ? »
Il lui demanda, inquiet, et Emma répondit d’une voix paniquée :
« Maman… Elle s’est évanouie, euh… Là, on est à l’hôpital. »
« Quoi ? … Emma, ne pleure pas, parle doucement. Qu’est-ce qui s’est passé ? »
La voix de Josh devint plus tendue sans qu’il ne s’en rende compte. À l’autre bout du fil, sa sœur sanglotait. Il avait encore l’esprit complètement vide.
« Arrête de pleurer, explique-moi. Vous êtes aux urgences ? »
« Oui… Hmm… »
Emma se remit à pleurer. En tant que petit frère, Josh n’était pas surpris — c’était habituel — mais il bouillait intérieurement. Pourtant, il ne pouvait rien faire d’autre qu’attendre patiemment qu’elle se calme.
Après un moment pénible, Emma reprit son souffle et commença à bafouiller. En résumé, leur mère était à l’hôpital parce que son état s’était aggravé, avec plusieurs rechutes.
« Ils m’ont aussi dit que mon dépôt de garantie était presque épuisé… »
Après avoir péniblement terminé sa phrase, Josh lui demanda d’un ton plus posé qu’au début :
« Tu as vérifié si elle avait une assurance santé ? »
« Non, je vais y aller plus tard… J’ai prévenu mon boulot que je prenais un congé. Je vais aller à la banque pour demander un prêt, mais je… Je sais pas si c’est une bonne idée… »
Emma n’arriva pas à finir sa phrase. Josh retint son souffle.
« Josh… Je comprends vraiment pas ce qui arrive à maman… J’ai les mains glacées… J’arrive plus à respirer… »
« Emma. Emma. »
Il l’appela doucement, juste avant qu’elle ne perde complètement pied.
« Calme-toi d’abord. Est-ce que maman va bien maintenant ? »
« Hein ? Oui, la crise est passée. »
La voix d’Emma tremblait encore, mais elle faisait des efforts pour rester consciente. Elle avait du caractère. Rien qu’en imaginant combien elle devait être terrifiée, Josh avait envie de sauter dans le premier avion pour la rejoindre.
« Qu’est-ce que le médecin a dit ? Est-ce qu’elle peut sortir ? »
« Non, je crois qu’ils vont la garder quelques jours. Ils doivent encore faire des examens… »
Emma, qui respirait toujours difficilement, demanda d’une voix un peu plus calme :
« Qu’est-ce que je dois faire, Josh ? »
« T’inquiète pas, » répondit-il d’un ton décidé. « Je vais t’aider, d’une manière ou d’une autre. Tu as pu dormir un peu ? »
« Non. »
Elle répondit faiblement.
La fatigue extrême dans sa voix traversa le combiné.
« D’accord, va te reposer un peu. Je te rappelle plus tard. »
Emma murmura, épuisée :
« … Oui, je vais dormir. Josh, je te rappelle plus tard. »
« Ne t’en fais pas. Conduis prudemment. »
Après avoir ajouté cette recommandation, il raccrocha. Le silence retomba brutalement. Dans l’obscurité, il se sentit submergé, repassant mentalement toute la conversation. Mais la situation était limpide.
J’ai besoin d’argent.
« Ahh… »
Il se prit la tête entre les mains et soupira profondément. Mais ce n’était pas le moment de paniquer. Josh essaya de se rappeler combien il lui restait. Il tentait de faire les comptes mentalement, quand il entendit des pleurs.
« Papa… Papa… »
En entrant dans la chambre, Josh vit Pete en larmes, les bras tendus vers lui, cherchant du réconfort. Il lui arrivait parfois de se réveiller ainsi, en pleurant. Comme toujours, il tendit les bras vers Josh en se lovant contre lui.
« Ça va, Pete… »
Josh fit les cent pas dans la pièce en le portant. Petit à petit, l’enfant se calma et finit par se rendormir. Josh déposa un baiser sur le sommet de sa tête. La chaleur du corps de Pete le calmait toujours. La douceur unique de son fils apaisait ses angoisses.
Finalement, il s’assit sur le canapé, les jambes allongées, avec Pete endormi contre lui, et resta là toute la nuit.
« Salut, Rose. »
Josh frappa avant d’ouvrir la porte du bureau pour saluer.
Rose, assise à son bureau en train de se faire les ongles, sursauta avant de lui adresser un large sourire.
« Salut, Josh. Tu es particulièrement beau, aujourd’hui. »
Comme toujours, il répondit simplement par un sourire. Il n’était pas d’humeur. Il avait laissé Pete endormi à la maison, et l’enfant pleurerait sûrement en se réveillant seul. C’était comme ça tous les jours, mais la culpabilité restait tenace.
Il aurait aimé pouvoir rester auprès de son fils jusqu’à ce qu’il grandisse, mais la réalité ne le lui permettait pas. Et aujourd’hui, en plus, la personne qui gardait habituellement Pete prenait sa journée.
La culpabilité s’accentuait du fait qu’il avait confié Pete à Mme Robert, sa voisine, avant même que l’enfant ne se réveille. Elle vivait de sa pension et traitait Pete avec beaucoup d’affection, comme ses petits-enfants qu’elle voyait rarement. Elle lui achetait parfois des jouets ou faisait des biscuits. Josh savait qu’il ne pouvait pas lui confier son fils trop longtemps.
Il jeta un coup d’œil vers le bureau de Mark. Rose, en remarquant son regard, releva la tête.
« Le patron n’est pas encore là. Il arrive d’habitude plus tôt. Tu veux un café ? »
Josh lui sourit, un peu déçu.
« Oui, merci. »
« Attends une minute. »
Rose se leva avec enthousiasme et se dirigea vers la cuisine. Josh s’installa sur le canapé. Il se sentait nerveux, sans trop savoir pourquoi. Son regard erra un instant avant de se poser sur le journal posé sur la table. Une photo en première page attira son attention. Rose, de retour, remarqua où il regardait.
« C’est le procureur qui s’occupe de l’affaire Davis. Plutôt canon, non ? »
C’était une affaire de meurtre à New York. Le principal suspect, un Alpha fortuné, jouissait d’une réputation douteuse. Les gens riches et puissants se faisaient facilement des ennemis, et si, en plus, la victime était un Oméga, les gens prenaient vite parti. Mais ce qui captivait surtout l’opinion, c’était le procureur.
Rose soupira d’admiration en posant une tasse devant Josh. Celui-ci la remercia brièvement et porta la boisson à ses lèvres sans quitter la photo des yeux. Rose lui demanda :
« Tu penses que c’est un Alpha ou un Oméga ? »
« Je ne sais pas trop… »
Les Alphas et les Omégas qui manifestaient leurs caractéristiques à l’adolescence étaient souvent d’une beauté remarquable. Ce n’était pas toujours le cas, mais dans la plupart des cas, leur apparence suffisait à deviner leur nature. Même sans phéromones.
Le procureur en faisait partie. Il était si séduisant que même Josh avait été captivé un instant en voyant la photo, malgré sa mauvaise qualité. En vrai, il doit être encore plus impressionnant.
Josh hésita à le qualifier de « beau » ou de « joli », tant il avait un visage à couper le souffle.
« Il ne peut pas être un Bêta, non ? … Enfin, c’est possible, mais peu probable. »
Rose aussi semblait hésiter. Elle le regarda, puis détourna les yeux, mal à l’aise. Il existait bien des Bêtas très séduisants, bien que ce fût rare. Josh avait réussi à masquer sa vraie nature grâce à cela. Il lui adressa un sourire vague. Rose fixa son regard sur lui et s’installa rapidement à ses côtés.
« Je suis vraiment surprise. Un gars aussi beau, j’étais sûre que tu étais un Alpha. »
Elle semblait un peu déçue. Josh avait entendu ce genre de remarques toute sa vie. Du genre : « Impossible que tu sois Bêta. » Mais ils avaient tous tort.
Josh était un Oméga. Il portait même une marque derrière l’oreille.
S’il avait exercé un autre métier, il n’aurait pas eu à le cacher. Mais personne ne voulait d’un Oméga comme garde du corps. Josh avait donc décidé de mentir dès le départ.
Il n’avait pas beaucoup de phéromones, et son apparence trompait tout le monde. Lors des périodes de chaleur, ses phéromones devenaient plus perceptibles, mais il les contrôlait avec des médicaments. Depuis qu’il avait reçu la marque, ces épisodes étaient devenus plus rares.
Il était convaincu de pouvoir passer inaperçu toute sa vie.
Il faillit porter machinalement la main à son oreille, mais se ravisa. Il devait cacher la marque. Il aurait pu faire semblant d’être un Alpha, mais cela aurait soulevé d’autres questions, du genre : « Pourquoi avoir prétendu être un Bêta jusque-là ? » Et tout aurait fini par se savoir.
Il n’avait qu’un seul choix : cacher sa vraie nature à tout prix. C’est pour ça qu’il portait parfois un casque ou d’autres accessoires pour couvrir ses oreilles, même en dehors du travail.
Je ne peux pas me permettre de perdre ce boulot.
Un frisson lui parcourut le dos. Il fit mine de boire son café pour se ressaisir.
Rose le regardait avec compassion.
« Pete a quel âge cette année ? Ça ne doit pas être facile, de l’élever tout seul. »
« Ce n’est pas facile, mais ça vaut le coup. »
Au bureau, tout le monde croyait que la mère avait abandonné Pete. Dans leur métier, ce n’était pas rare, alors personne ne posait trop de questions. Jusqu’ici, ça suffisait.
Mais depuis que Rose avait divorcé, il y a quelques mois, son intérêt pour Josh semblait avoir grandi.
Ignorant le refus implicite de Josh, elle se pencha vers lui.
« Mais un enfant a besoin d’une mère, non ? Il est encore si petit… Il ne lui manque pas une figure maternelle, tu crois ? »
Josh fronça légèrement les sourcils. Ce n’était pas ce à quoi il s’attendait.
« Rose… Vous êtes un peu trop près. »
Elle ne recula pas. Au contraire, elle ferma les yeux et approcha ses lèvres. Elle allait l’embrasser.
Josh tendit la main entre eux pour l’arrêter. Rose embrassa sa paume, surprise.
« Rose, je n’en ai pas envie. »
À ces mots doux mais fermes, elle se figea et plissa les yeux.
« Non ? »
« Le patron peut arriver d’une seconde à l’autre. »
« Tu plaisantes ? »
Elle fronça les sourcils.
« Je crois que j’entends des pas. C’est peut-être lui. »
« Tu te fous de moi, là ? »
Elle bégaya.
À cet instant, la porte s’ouvrit brusquement.
« Que faites-vous ici si tôt ? »
« Oh ! »
À l’entrée du patron, qui parla d’un ton sec, Rose sursauta et se redressa en vitesse. Josh, imperturbable, le salua.
« Bonjour, Mark. »
« Tu m’attendais ? »
Mark lança un regard à Rose, visiblement embarrassée, qui s’éloignait en réajustant ses vêtements. Il se dirigea ensuite vers son bureau. Josh le suivit et referma la porte.
« Haa… »
Mark poussa un long soupir, s’assit et le fixa.
« Tu peux me rendre un service ? Ma situation est un peu compliquée… Tu sais que je suis père célibataire. »
Josh répéta les mensonges déjà servis à Rose.
« Je te rembourserai dès que ma mère ira mieux. »
« Ah bon ? » répondit Mark en sortant une cigarette.
Josh avait arrêté de fumer à la naissance de Pete. Il recula légèrement pour éviter l’odeur et demanda :
« Mark, est-ce que tu peux m’aider ? »
« Combien ? »
« … Dix mille dollars ? »
« Bon courage. »
Mark se mit soudain à tousser violemment. Josh pensa brièvement aux gestes de premiers secours. Une fois calmé, Mark reprit d’un ton méfiant :
« Tu joues ? »
« Non. »
Josh secoua la tête et répondit avec franchise :
« Ma mère est malade. Il faut de l’argent pour l’hôpital. »
« Je croyais que c’était juste de l’hypertension ? »
« Oui… Mais elle a aussi perdu un rein… Enfin, il y a plusieurs choses. »
Il parla sans émotion, ne cherchant pas à émouvoir, juste à exposer les faits.
« L’hôpital a déjà envoyé la facture. J’avais économisé un peu, mais ça ne suffit pas. »
Mark ne répondit pas tout de suite. Il tira sur sa cigarette.
Est-ce qu’une petite société de sécurité peut vraiment prêter autant d’argent ?
Après un silence, Mark soupira et répondit :
« … Je vais y réfléchir. »
Ce n’était pas un non. Mais la somme était énorme. Josh se demanda pourquoi il hésitait.
« Tu comptes me rembourser en bossant ? »
Mark le regarda, accablé.
« Tu sais combien de temps il te faudrait pour rembourser dix mille dollars ? Il faut être réaliste. »
Josh quitta le bureau avec un sourire gêné. Derrière lui, Mark continuait de fumer, l’air grave.
« Papa, ça sent la cigarette. »
Dès qu’il aperçut Josh, l’enfant, confié à Mme Robert, afficha un sourire ravi… Avant de se boucher le nez et de le taquiner d’un air faussement indigné. Josh, pris de court, s’épousseta précipitamment. Pete attendit qu’il ait terminé, puis lui tendit les bras. Josh le souleva d’un geste et frotta ses lèvres contre sa joue ronde.
« Bourrr. »
« Hahaha ! »
Le petit éclata de rire, chatouillé par l’air vibrant. Il se tortilla dans ses bras, hilare. Pete tenait dans sa main une petite voiture qu’il n’avait encore jamais vue. Visiblement, Mme Robert venait de lui offrir un nouveau jouet. En croisant le regard de Josh, elle sourit doucement.
« Je l’ai juste achetée en passant. J’ai pensé à Pete en la voyant. »
Josh, embarrassé de refuser un tel geste, se contenta de lui adresser un sourire de gratitude et la remercia. Il n’oublia pas d’encourager Pete à la remercier aussi.
« Vous n’avez pas eu de souci ? Il ne vous a pas trop fatiguée ? »
« Pete est toujours adorable. Vraiment, vous auriez pu rentrer plus tard. J’adore passer du temps avec lui. Il est le bienvenu, à tout moment. »
Son sourire était sincère. Mme Robert, qui vivait de sa modeste retraite, avait pensé à Pete en lui offrant un jouet. Josh se dit qu’il devait lui rendre ce geste d’une manière ou d’une autre.
Au fait, elle avait dit que la lumière de la salle de bain ne marchait plus…
Jetant un regard derrière elle, il reprit d’un ton décontracté :
« Il y a des choses à réparer ? J’ai un peu de temps libre aujourd’hui, je peux m’en charger. »
Mme Robert ne parvint pas à dissimuler sa joie.
« Vous feriez ça ? Eh bien… Il y a la lumière de la salle de bain qui ne s’allume plus. Et le lavabo aussi, il se bouche souvent… »
« Parfait. Je vais chercher mes outils. »
Pour ne pas laisser Pete seul et risquer qu’il pleure, Josh retourna chez lui avec le petit dans un bras et la boîte à outils dans l’autre. Quand il revint, Mme Robert était déjà en train de préparer de la pâte à biscuits.
Ouh là, ça risque de ne plus s’arrêter maintenant…
Songea-t-il intérieurement, sans pourtant trouver de raison valable pour refuser. Finalement, ce qui avait commencé par une vérification de la lumière de la salle de bain se termina par une réparation de chaise dans le salon.
Pendant ce temps, Pete, qui observait son père travailler avec curiosité, finit par s’endormir, l’ennui l’ayant doucement gagné.
Lorsqu’il rentre chez lui avec son fils dans les bras, l’heure du dîner approche déjà. Mme Robert lui a proposé de manger ensemble, mais Josh a poliment décliné : à ce rythme, il ne s’en sortirait jamais. Il revient tout de même avec un sac plein de cookies tout juste sortis du four. Pete, qui vient de se réveiller, tend la main vers l’un d’eux, mais Josh le lui retire rapidement.
« Non, tu dois d’abord dîner. »
Pete suit le biscuit du regard, l’air profondément déçu. Josh sent son cœur vaciller. Le petit lève vers lui un visage tout triste, et il ne lui faut pas plus de trois secondes pour lâcher un soupir vaincu.
« Ugh… »
Comment un enfant peut-il être aussi adorable et irrésistible, même si c’est le mien… ?
Le cœur serré, Josh finit par céder et lui tend le biscuit. Pete l’attrape en sautillant sur place, tout content. Josh lui essuie du pouce les filets de salive au coin des lèvres, puis se hâte de préparer le repas.
Quand est-ce que Mark va appeler ?
Même en nourrissant Pete, Josh a l’esprit ailleurs. Il pense au montant de l’acompte pour l’hôpital, à ce qu’il lui reste d’économies, à d’éventuelles solutions pour obtenir plus d’argent. Il est tellement absorbé qu’il ne remarque même pas Pete laisser tomber sa cuillère à deux reprises, l’obligeant à lui en donner une propre à chaque fois.
La sonnette retentit alors qu’ils ont presque terminé de manger.
« Ah, désolé du retard. »
À peine la porte ouverte, Mark entre directement dans l’appartement, sans un mot de plus. Il est arrivé plus tôt que Josh ne le pensait. Aussitôt, une tension lui serre la poitrine et il se met à le suivre, anxieux. Assis sur sa chaise haute, Pete trempe un cookie dans son verre de lait. Il ouvre de grands yeux en voyant Mark entrer sans prévenir. Josh s’approche rapidement et dépose un baiser sur sa tête pour ne pas qu’il soit effrayé.
« Pete, c’est M. Mark. Il faut lui dire bonsoir. »
« Bonsoir. »
Ce n’est qu’à ce moment-là que Pete salue d’une petite voix. Mark lui ébouriffe vaguement les cheveux, puis se tourne aussitôt vers Josh.
« Il faut qu’on parle. »
Mark se dirige sans hésitation vers le salon. Josh lui emboîte le pas.
« Tu as déjà dîné ? »
« Oui. Et toi ? Tu veux qu’on s’y mette ? »
« Ça ira. »
Il comptait dîner pendant que Pete mangeait ses biscuits, mais ce genre de visite n’a rien d’ordinaire — surtout à cette heure. Et vu ce qui s’est passé dans la journée, Josh ne peut s’empêcher d’être nerveux. Il tente pourtant de garder contenance, encourage Pete à continuer de manger seul, puis suit Mark dans le salon.
« Haa… »
Même une fois assis sur le canapé, Mark tarde à parler. Josh prend place à une certaine distance, et attend qu’il se lance. L’attente semble interminable, mais il n’ose pas le presser. Il jette de temps à autre un œil vers Pete, puis baisse à nouveau les yeux vers ses pieds. Enfin, Mark prend la parole, comme s’il s’était résolu :
« C’est à propos du travail. »
Il pousse un nouveau soupir, avant de continuer :
« J’ai quelque chose. La paye est bonne, et dans l’ensemble, les conditions sont plutôt correctes. En fait… Elles sont excellentes. Tu recevras toute la somme d’un coup, avec même une avance possible. L’acompte suffira largement à couvrir ce que tu m’as dit, et tu recevras le reste à la fin. Franchement, y’a rien à redire. Mais le problème, c’est… La personne qui fait la demande. »
Qui peut bien être assez problématique pour qu’il tourne autant autour du pot ?
Josh fixe ses lèvres avec patience, attendant le nom. Le silence s’étire, pesant, jusqu’à ce que Mark se décide enfin à parler. Quand il finit par lâcher ce nom, Josh comprend tout de suite pourquoi il hésitait autant.
« C’est Chase C. Miller… Tu t’en souviens, non ? »
À l’instant où ce nom est prononcé, Josh oublie littéralement de respirer.
Chase C. Miller.
Comment oublier ce nom ?
Ces yeux violets, glacés, qui le regardaient de haut. Cette chevelure naturellement blonde, éclatante sous le soleil. Ce visage aux traits marqués, superbe, et ce corps mince, élancé, d’une élégance troublante qui serrait le cœur rien qu’à le voir. Depuis ses débuts, il est l’acteur le plus en vue d’Hollywood, enchaînant les rôles et les succès. Il n’a jamais quitté la première place des classements du « plus bel homme du monde » ni celle du « plus sexy ».
Un Alpha dominant qui a laissé une marque indélébile sur Josh.
Et l’homme qui l’a mis enceint de Pete.
Ce chapitre vous est présenté par la Dragonfly Serenade : Traductrice • Ruyi ⋄ Correctrice • Ruyi
・.ʚ Voilà la fin du chapitre ɞ .・
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