19. Chiot d’un jour ⋄ Partie 13
par Ruyi ♡Après avoir assisté à l’événement du clan des loups-garous, Yoon Chi-young prit la direction de l’hôtel, expliquant que sa maison était trop éloignée.
« Les animaux ne sont pas autorisés dans l’hôtel. »
Tu peux soit me laisser, soit m’emmener avec toi.
Alors que le chiot observait distraitement la vue nocturne par la fenêtre de la voiture, Yoon Chi-young, lui, avait déjà trouvé une solution… Et l’avait mise en œuvre.
« C’est mieux que la poche de mon manteau, non ? »
Encore ça !
Cette fois, il le glissa directement à l’intérieur de sa veste de costume. Heeseong se débattit, refusant de se retrouver collé contre la poitrine de l’homme, mais Yoon Chi-young tenta de l’apaiser d’un baiser et d’un murmure rassurant. Résigné, le chiot finit par se réfugier de lui-même dans la veste. Le côté gauche de la poitrine de Yoon Chi-young se bombait légèrement, comme s’il y avait dissimulé un petit pain chaud.
Je suis crevé…
Mais une fois installé, ce n’était pas si mal. Petit à petit, le chiot se détendit, s’étalant confortablement. Il détestait se l’avouer, mais c’était agréable… Bien plus chaud et douillet que la poche du manteau. Yoon Chi-young prenait soin de son corps, faisait du sport chaque jour, avait même une pièce dédiée chez lui — dormir contre cette poitrine solide n’était pas la pire des options.
À travers les tissus, il entendait les sons de l’extérieur : les pas résonnant dans le hall de l’hôtel, l’échange poli à la réception, puis la voix chaleureuse de Yoon Chi-young saluant un jeune homme dans l’ascenseur.
À l’oreille de cet inconnu, il murmura avec malice :
« Tu veux que je te montre quelque chose d’effrayant ? »
Peu importe les bruits venus de l’extérieur, Heeseong, blotti dans ses bras, s’endormit paisiblement. Bientôt, Yoon Chi-young se pencha et entrouvrit légèrement la veste qui enveloppait le chiot.
« Wow ! Qu’est-ce qu’il est mignon ! » S’exclama-t-il tel un enfant avec émerveillement en le découvrant.
Les oreilles de Heeseong tressaillirent sous l’effet de la surprise, mais il ne se réveilla pas. Vraiment… Il n’a rien d’un chef de gang, pensa-t-il à moitié endormi.
Clic
La porte de la chambre se referma, et la voix de Yoon Chi-young s’éleva doucement dans le calme :
« Maintenant que j’y pense, je ne t’ai pas donné à manger… »
… Tu ne parles pas de moi, là ?
Le chiot entrouvrit les yeux, encore engourdi de sommeil. Ces derniers temps, Yoon Chi-young avait tendance à se parler tout seul d’une manière étrange. Essayait-il d’être drôle ? De toute façon, je suis un chiot, maintenant.
À cet instant, une grande main s’introduisit dans la veste et sortit délicatement le petit corps encore chaud.
« On mange un peu avant de dormir ? »
Je veux pas sortir !
Yoon Chi-young venait troubler son sommeil juste au moment où il était parfaitement installé. Mais Heeseong, trop fatigué pour protester, se laissa déposer sur la table sans broncher.
Le menu du room service s’étalait sous ses yeux.
« Qu’est-ce que tu veux manger ? »
« … ? »
Le chiot cligna des yeux sans comprendre.
Il est cinglé ? Pourquoi un bol de gukbap* coûte 50 000 wons* ?
(N/T : « Gukbap » (국밥) – Plat coréen traditionnel composé de soupe chaude (guk) servie avec du riz (bap) dedans. Nourrissant et populaire, souvent associé à une cuisine simple et réconfortante.)
(N/T : Ça fait environs 30 euro.)
Le prix lui semblait délirant. Mais Yoon Chi-young, lui, ne semblait pas s’en soucier. Il désigna tranquillement le menu.
« Un menu complet de galbi* avant de dormir, ça te tente ? Je pense que ton petit ventre pourra le supporter, non ? »
(N/T : « Galbi » (갈비) – Côtes de bœuf ou de porc marinées et grillées, plat emblématique de la cuisine coréenne, souvent cuites au barbecue.)
En vérité, Heeseong avait un estomac capricieux, et Yoon Chi-young faisait toujours très attention à son alimentation. Mais ce soir, prévoyant de ne manger qu’un peu, Heeseong hocha la tête sans trop réfléchir.
Le room service fut servi pile au moment où Yoon Chi-young sortit de la douche. Le chiot, de son côté, s’était brièvement lavé dans le lavabo et ressortait enroulé dans une serviette, tel un burrito.
À peine assis, il reçut une bouchée de galbi effiloché, mélangée à quelques cuillerées de riz.
« Alors ? C’est bon ? »
Oh… Waouh !
Les yeux du chiot, jusque-là embués de sommeil, s’ouvrirent en grand, éblouis.
Les côtes savoureuses — dont le prix exorbitant laissait supposer un mets de luxe — étaient, sans exagérer, la viande la plus délicieuse que Heeseong ait jamais goûtée de sa vie. Certes, il n’en avait pas souvent mangé, mais cela n’enlevait rien à l’évidence.
Encore. J’en veux encore.
Pour une fois, Heeseong s’agrippa au poignet de Yoon Chi-young, quémandant une nouvelle bouchée. Ce dernier, amusé, le nourrit avec entrain, puis éclata de rire en voyant la sauce à ribs dégouliner autour de la gueule du chiot.
« Je te traite comme un petit bijou, et voilà que tu finis toujours crasseux… »
Incompréhensif, le chiot se lécha le museau, puis tourna les yeux vers le miroir placé à côté de lui. Il y découvrit un minuscule chien maculé de taches : de la sauce sur la tête, des traces de vin sur le dos, et le museau entièrement barbouillé.
La moitié de ces taches, c’est toi qui me les as mises !
Alors qu’il se tortillait en grognant, crocs en avant, Yoon Chi-young l’amadoua avec une autre bouchée de côte. Le chiot se calma aussitôt, puis termina son repas dans un silence satisfait.
Une fois rassasié, il s’allongea de tout son long sur le lit moelleux. La literie d’hôtel était douce comme un nuage. C’était une sensation nouvelle, mais terriblement agréable.
Je me sens bien…
Il fallait bien le reconnaître : Heeseong s’était peu à peu habitué à vivre aux côtés de Yoon Chi-young, à profiter de ces plaisirs inédits. Toutes ces choses étranges qui lui étaient offertes, il les découvrait pour la première fois — et pourtant, il s’y adaptait avec une aisance déconcertante.
« … … »
Mais chaque fois qu’il se sentait ainsi… Une pointe de tristesse l’envahissait.
Parce qu’il savait que tout cela n’était qu’un mensonge. Il n’était pas un simple chiot ; il était Gyeon Heeseong, un beastman déguisé. Et s’il venait à être découvert, il ne goûterait plus ces douceurs… Il serait trop occupé à faire face aux conséquences. Une ombre de culpabilité passa sur son cœur, et il se surprit à éprouver une certaine nostalgie pour le casino — l’endroit où il pouvait être lui-même.
Mais aussitôt, il se reprit :
Non. … Peu importe ce qui arrive, je ne regretterai jamais ce casino.
Il avait beau tenter de refouler les raisons, elles revenaient en force. Ces clients qui le harcelaient. Ceux qui tentaient de l’acheter comme une vulgaire marchandise, avant de le rabaisser et l’insulter. Et son frère, qui lui disait simplement de supporter, sans comprendre. Tous ces souvenirs le blessaient.
… J’aimerais que mon frère soit toujours de mon côté. Comme Yoon Chi-young l’est.
Mais aussitôt cette pensée formulée, Heeseong secoua la tête avec vigueur. Il ne pouvait pas comparer son frère — de la même espèce que lui, celui qui l’avait recueilli — à ce loup carnivore. Son frère restait son bienfaiteur, malgré tout.
Soudain, le chiot releva la tête, pris d’un doute.
Pourquoi est-ce qu’il est si silencieux ?
D’habitude, Yoon Chi-young se jetait sur lui dès qu’il se couchait. Mais là, pas un mot, pas un geste. Méfiant, Heeseong s’approcha de son visage, le pelage hérissé d’électricité statique.
… Tu es encore malade ?
Yoon Chi-young, ses oreilles de loup noir dévoilées comme la fois précédente, respirait difficilement. Il était penché sur le côté, le front plissé par la douleur.
Le chiot avait déjà été témoin de cette scène à plusieurs reprises. Les épisodes où Yoon Chi-young souffrait ainsi devenaient de plus en plus fréquents. Comme le médecin l’avait averti, c’était sans doute dû à l’accumulation de phéromones qu’il n’arrivait plus à contenir.
« Ugh, haah… »
Pourquoi tu ne te transformes pas simplement ? Tu pourrais te changer en loup.
En y repensant, Yoon Chi-young ne lui avait jamais montré sa vraie forme. Bien qu’ils passent chaque jour ensemble, il la cachait avec une obsession presque maladive.
Pensait-il que Heeseong serait effrayé parce qu’il n’était qu’un chiot ? Pourtant, Heeseong avait grandi entouré de chiens de combat violents — il n’avait jamais eu peur des loups.
« Hé, transforme-toi. Je n’ai pas peur des loups. Si tu continues à accumuler des phéromones comme ça, tu vas finir par faire un choc phéromonal. »
Le chiot s’adressa à Yoon Chi-young. Pour ce dernier, cela ne devait ressembler qu’à de petits grognements, mais Heeseong, lui, était sérieux.
Chez les homme-bêtes de sang pur, les phéromones devenaient toxiques si elles s’accumulaient dans le corps. Il fallait impérativement les libérer, soit en reprenant sa vraie forme, soit par des rapports sexuels.
Si elles s’accumulaient trop, le choc phéromonal pouvait entraîner une perte totale de contrôle, voire de la violence. Dans les cas extrêmes, certains allaient jusqu’à se blesser eux-mêmes. Il était donc vital pour un pur-sang d’évacuer ses phéromones régulièrement.
« Petit chiot… »
Yoon Chi-young esquissa un léger sourire face aux reproches du chiot. Des mèches de cheveux lui collaient au front à cause de la sueur, et il releva les yeux, d’un éclat aussi tendre que douloureux. Heeseong trouva ce visage injustement séduisant, mais il l’écouta sans protester.
« Je suis content que tu sois à mes côté aujourd’hui… »
Tu dis ça alors que tu es plié de douleur ?
« Maintenant, mon petit chiot… Dois bien m’aimer, non ? »
Ne te méprends pas.
Le chiot le regarda avec pitié, mais finit par lui lécher doucement la joue. Yoon Chi-young retint un soupir avant de rire doucement. Ses pupilles grises, cependant, brillaient d’un éclat plus vif — comme s’il analysait la réaction du chiot.
« Même si j’ai mal… Je crois que ça me va de vivre comme ça, avec toi. »
« … »
Ces mots auraient pu sonner comme une réplique romantique. Mais venant d’un loup cannibale, ils prenaient une autre signification. Heeseong savait qu’il était rentré ce soir-là, les mains encore imprégnées de l’odeur du sang.
Il n’avait plus peur, et pourtant… Une angoisse sourde le rongeait. Plus Yoon Chi-young luttait contre ses instincts, plus le moment approchait où il ne pourrait plus les contenir.
Et Heeseong avait envie de lui répondre autrement.
J’ai peur de vivre comme ça…
Le chiot resta silencieux, puis, rassemblant toutes ses forces, il le couvrit avec une couverture.
Cette nuit-là, Heeseong mit longtemps à s’endormir. Il tournait en rond sur le lit, perdu dans ses pensées. Vu sa petite taille, ce simple mouvement ressemblait à une longue promenade.
Finalement, il se glissa sous la couverture, se pelotonnant entre les cuisses de Yoon Chi-young, et pensa :
J’ai peur de ne plus vouloir redevenir humain.
Né homme-bête, était-ce juste de tromper les autres en vivant comme un petit chiot ?
Mais affronter les conséquences en tant qu’humain l’effrayait encore plus. Oui, il avait causé des problèmes à Yoon Chi-young, mais se faire voler de la drogue et frôler la mort… Tout cela lui semblait bien trop injuste pour être entièrement de sa faute.
Et plus que tout, une peur plus profonde l’habitait.
Celle d’être rejeté par le frère qui l’avait accueilli. Il avait déjà été abandonné une fois. Il connaissait trop bien cette douleur, et ne voulait plus jamais être mis à l’écart.
… Je ne veux pas être chassé de la meute.
Les yeux noirs du chiot se remplirent de larmes. Mais Heeseong se recroquevilla davantage, tentant de ne pas pleurer, s’endormant malgré lui… Tout en détestant un peu le réconfort qu’il trouvait auprès de celui qui avait été un jour son prédateur.
Ce chapitre vous est présenté par la Dragonfly Serenade : Traductrice • Ruyi ⋄ Correctrice • Ruyi
・.ʚ Voilà la fin du chapitre ɞ .・
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