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    Dix jours s’étaient écoulés depuis que Yoon Chi-young avait pris Heeseong sous son aile.

    Désormais, chaque matin, il le toilettait soigneusement avant de l’emmener avec lui au travail. Son emploi du temps, en tant que gangster, était suffisamment souple pour qu’il puisse dorloter son chiot tout au long de la journée. Perché dans ses bras comme un accessoire luxueux, Heeseong se laissait choyer, bien malgré lui.

    Durant cette période, une chose était devenue évidente pour Heeseong : Yoon Chi-young ne ressemblait en rien à l’image qu’il se faisait d’un chef de gang.

    Parce que, franchement… Quel genre de patron passe son temps à parler à un chien qui ne peut même pas lui répondre ?

    « Tu sais quel est mon type idéal, chiot ? »

    Je m’en fiche. Je n’ai vraiment pas envie de savoir.

    Sur le chemin du travail, installé dans la voiture, Yoon Chi-young se lançait dans ses bavardages habituels. Installé sur ses genoux, Heeseong l’ignorait royalement, absorbé par un film d’action diffusé sur un smartphone.

    Loin d’être découragé par cette indifférence, Yoon Chi-young continua sur sa lancée, un sourire au coin des lèvres.

    « Quelqu’un qui… Me procure toujours une excitation palpitante. »

    J’ai dit que ça ne m’intéresse pas !

    Agacé, Heeseong, sans quitter l’écran des yeux, mordit soudainement les doigts de Yoon Chi-young comme un prédateur. Mais peu importait la force de ses morsures ou l’intensité de ses caprices, l’homme se contentait de rire, manifestement amusé.

    Après cette petite crise, Heeseong retourna à son film, tandis que Yoon Chi-young caressait doucement sa petite tête ronde, grosse comme une pomme de terre.

    « Quand je vois quelqu’un à la fois mignon et sexy… Ah, tu connais cette sensation où un simple contact visuel suffit à te faire perdre le contrôle ? »

    Ce type est irrécupérable.

    Heeseong n’accordait généralement pas d’intérêt aux paroles des autres, et encore moins à celles de Yoon Chi-young, qu’il considérait uniquement comme un obstacle à son évasion.

    Et pour être honnête, cet homme débitait souvent des absurdités.

    « La première chose que j’ai ressentie en le voyant, c’était l’envie de le sucer. »

    Putain !

    Ferme-la !

    Irrité, le chiot s’écroula sur le sol en agitant furieusement ses petites pattes. Mordre Yoon Chi-young ne servait à rien, alors il n’avait pas d’autre choix que de manifester son mécontentement de cette manière.

    Finalement, lassé de ces trajets interminables pour le travail, Heeseong décida d’abandonner – pour l’instant – ses projets d’évasion et d’explorer une autre stratégie.

    Noona, emmène-moi avec toi.

    Les yeux brillants, il remua sa petite queue en direction de la femme assise sur le canapé, un membre du clan des loups. Se blottir contre Yoon Chi-young était humiliant, mais c’était une toute autre histoire lorsqu’il s’agissait d’une femme.

    « Qu’est-ce qu’il a, ce chiot ? »

    D’un geste nonchalant, Yoon Geon-young souleva la boule de poils d’une seule main avant de rire légèrement.

    Elle était la sœur de Yoon Chi-young, et si leur ressemblance était indéniable, leur aura, en revanche, différait totalement. Issue elle aussi du clan des loups, elle dégageait une élégance raffinée et une acuité* rappelant celle d’un félin.

    Ses longs cheveux noirs, soyeux et impeccablement coiffés, lui donnaient un air incroyablement séduisant et sophistiqué. En réponse, Heeseong se mit à battre frénétiquement de la queue, affichant son charme le plus irrésistible. Il sentit le regard amusé de Yoon Chi-young depuis le canapé d’en face, mais il s’en fichait éperdument.

    Sa sœur doit être plus forte que lui, non ?

    Dans ce cas, elle devrait pouvoir facilement lui prendre son chiot. Fort de cette logique, Heeseong redoubla d’efforts pour la séduire, sa queue frétillant avec enthousiasme.

    C’est alors que Yoon Chi-young sortit une cigarette et murmura d’une voix basse :

    « Maintenant, tu dragues carrément. »

    « Je vois, donc c’est vrai que tu as un faible pour les bâtards*. »

    Avec un rictus moqueur, Yoon Geon-young reposa le chiot sur le sol.

    La supériorité des sangs purs… Toujours aussi agaçante. Mais au moins, elle, elle est plus supportable que Yoon Chi-young.

    Décidé à poursuivre son plan, Heeseong se roula sur le dos, usant de tous ses charmes. C’est alors qu’il remarqua un homme assis aux côtés de Yoon Geon-young.

    Pourquoi il tremble comme ça en regardant Yoon Chi-young ?

    Le blond, manifestement un autre membre du clan des loups, semblait tétanisé, incapable de soutenir le regard de Yoon Chi-young.

    Pourtant, aux yeux du chiot, l’aura intimidante du gangster avait perdu de son efficacité, éclipsée par son obsession insupportable pour les câlins et les baisers.

    Alors que Yoon Chi-young allumait tranquillement sa cigarette, il prit une bouffée et laissa échapper une volute de fumée avant de dire :

    « Tu n’es pas venue juste pour me voir, pas vrai ? Tu veux impressionner ton mec, c’est ça ? »

    À ces mots, le blond resserra sa prise sur la main de Yoon Geon-young, les dents crispées. Il avait l’air si fragile que Heeseong ressentit presque l’envie de le réconforter, comme pour lui dire de ne pas s’inquiéter.

    « Yoon Chi-young. »

    La voix de Yoon Geon-young se fit plus sèche, empreinte d’une sévérité tranchante.

    « Père est mort. Évite les clubs et autres lieux de divertissement. »

    « Sérieux, tu t’es déplacée jusqu’ici juste pour me dire ça ? »

    « Je te conseille en tant que futur chef. Beaucoup d’yeux sont braqués sur toi. Comporte-toi avec un minimum de décence. »

    « Ah… Donc c’était juste une leçon de morale. »

    Yoon Chi-young exhala tranquillement la fumée et rit, agitant nonchalamment les orteils de ses jambes croisées. Même la mention de son futur rôle de leader ne semblait pas l’inquiéter le moins du monde. Au lieu de ça, il répondit avec un ricanement :

    « Ça fait une semaine que je ne suis pas allé dans une maison de jeux… Tu es vraiment à côté de la plaque. »

    « Maintenir la décence signifie aussi te débarrasser de ce bâtard. »

    C’est dur, venant d’une sœur…

    Se sentant offensé, le chiot abandonna l’idée de jouer les adorables créatures et se redressa brusquement. C’était comme si on venait de lui rappeler la fierté du clan des loups qu’il avait oubliée.

    Il observa tour à tour les deux frères et sœurs, son expression soudainement sérieuse. L’atmosphère était lourde, presque menaçante, comme s’ils se faisaient face en ennemis. C’était la première fois que Heeseong voyait Yoon Chi-young afficher une hostilité aussi évidente.

    « Tu m’élèves comme un chien de combat, et maintenant tu parles de décence ? »

    Chien de combat ? Qu’est-ce que ça veut dire ?

    Alors que Heeseong restait perplexe, Yoon Chi-young, dans un rire léger, fit tomber la cendre de sa cigarette qui pendait du bout de ses longs doigts avant de demander d’un ton narquois :

    «  C’est bien pour toi de jouer avec l’homme que ton frère fréquentait  ?  »

    D’un regard acéré, il désigna l’homme blond du clan des loups. Celui-ci, visiblement terrifié, ne parvenait pas à masquer ses émotions, laissant échapper ses oreilles de loup jaunes sous le coup du stress.

    Yoon Geon-young toisa son frère avec mépris avant de murmurer d’une voix glaciale :

    « Tu avais probablement l’intention de le dévorer. »

    Ses mots étaient prononcés avec une désinvolture tranchante, comme si elle ne s’adressait pas à un frère, mais à un simple adversaire. La froideur dans son regard fit frissonner Heeseong.

    … Pourquoi regarde-t-elle son propre frère avec un tel dédain ?

    Le frère de Heeseong, bien que sans lien de sang avec lui, accordait une grande importance à la loyauté. Jamais il ne traiterait un membre de sa famille avec autant d’hostilité. Pourtant, Heeseong avait toujours entendu dire que les loups possédaient un puissant esprit de meute, à l’image des chiens… Mais ceux qui se tenaient devant lui, ces loups de sang pur, semblaient prêts à s’entre-déchirer à tout moment.

    Après une confrontation silencieuse mais pesante, Yoon Geon-young finit par se lever. Yoon Chi-young, lui, continua de fumer avec élégance, sans chercher à la retenir. Il se contenta de lui adresser un avertissement voilé, son sourire à peine esquissé.

    «  Mes félicitations pour être la prochaine cheffe, sœurette.  »

    « …  »

    « J’espère juste de ne pas avoir à te tuer. »

    Yoon Geon-young ne répondit pas. L’hostilité entre eux était palpable, comme une menace suspendue dans l’air.

    Au même moment, l’homme blond tenta de redresser son manteau, sur lequel Heeseong était assis. Distrait, le chiot se laissa déplacer sans opposer de résistance, tandis que l’homme ajustait sa posture.

    C’est alors que les yeux noirs de Heeseong s’écarquillèrent.

    Oh…  

    La main droite que l’homme blond dissimulait sous sa manche se révéla lorsqu’il déplaça maladroitement le chiot. La peau du dos de sa main était en lambeaux, comme si elle avait été déchiquetée par une bête sauvage.

    De l’autre côté, Yoon Chi-young, qui observait la scène, éclata de rire.

    «  Elle te sert bien, cette main, maintenant  ?  »

    «  …  »

    À ces mots, le visage du blond devint livide, et il quitta précipitamment les lieux.

    Le chiot le regarda s’éloigner, interloqué.

    Est-ce qu’il a vraiment… Mordu l’homme avec qui il sortait  ? 

    Même après leur départ, Heeseong resta fixé sur Yoon Chi-young.

    Soudain, sa présence lui parut à nouveau étrangère.


    Heeseong réfléchit profondément, même après être rentré du travail.

    Pourquoi s’attaque-t-il aux siens ?

    D’après ce qu’Heeseong avait observé jusqu’à présent, Yoon Chi-young avait agi avec brutalité, mais n’avait jamais semblé avoir l’intention de dévorer des hommes-bêtes. Bien sûr, il pouvait y avoir un autre côté à sa personnalité… Cependant, Heeseong, avec son intuition aiguë et son odorat sensible, ne croyait pas que Yoon Chi-young, le gourmet, se permettrait de goûter des créatures crues.

    « Je ne savais pas que mon toutou avait un faible pour les femmes…  »

    Et dire qu’il bouderait pour de telles choses, sans parler d’être un cannibale.

    Le chiot, allongé dans le lit avec Yoon Chi-young, soupira, agacé par cette pensée.

    S’appuyant sur son bras, Yoon Chi-young joua avec la queue du chiot de façon un peu enfantine et demanda :

    « Tu ne m’as jamais montré d’affection, pas vrai ? »

    Et alors ?

    « Je comptais t’acheter des crevettes demain…  »

    À ces mots, le chiot réagit enfin. Il jeta un regard distrait à Yoon Chi-young et agita paresseusement sa queue, une sorte de supplique pour la friandise.

    Ravi de recevoir ne serait-ce qu’un léger signe d’intérêt, Yoon Chi-young esquissa un sourire malicieux avant d’approcher son visage de celui du chiot. Heeseong détourna la tête, anticipant déjà les remarques inutiles de Yoon Chi-young.

    «  Tu t’es déjà accouplé, chiot  ?  »

    Il avait vu juste. Heeseong aurait bien voulu maudire l’absurdité de poser une telle question à un chiot, comme s’il allait répondre. Mais tout ce qu’il parvint à exprimer fut un regard empreint de dédain et de frustration envers Yoon Chi-young.

    Ce dernier, imperturbable, insista.

    «  Ah… Tu ne l’as pas encore fait, pas vrai  ?  »

    Qu’est-ce que ça peut te faire ? !

    Irrité, le chiot repoussa brusquement le visage de Yoon Chi-young avec ses pattes avant. Grattant la peau de Yoon Chi-young avec ses petites griffes, ce dernier éclata de rire, comme s’il avait enfin compris, et cessa de caresser la queue du chiot.

    « Ta réaction en dit long, tu ne l’as vraiment pas fait. »

    Merde…

    C’était précisément pour cette raison qu’Heeseong détestait converser avec cet homme : cela le laissait toujours exaspéré.

    Il n’avait jamais eu de relations sexuelles. Trop jeune et bien trop occupé à travailler sous les ordres de son frère, il n’avait jamais vraiment eu le temps d’y penser. De plus, dans la société des hommes-bêtes, les femelles préféraient les mâles forts et imposants, ce qui excluait naturellement Heeseong de la compétition, avec son apparence pâle et délicate.

    Cependant, il n’était pas pour autant impopulaire. Bien qu’il ressemble à un chien, il jouissait d’une certaine popularité auprès des hommes. À la maison de jeux où il travaillait, certains clients demandaient spécifiquement après lui, lui glissant de l’argent, déboutonnant leur ceinture, ou allant jusqu’à lui pincer furtivement les fesses en passant.

    Bien sûr, Heeseong ne laissait jamais passer ce genre de choses.

    À chaque fois qu’il entendait son frère hurler : «  Heeseong, petit vaurien  !  », le coup était déjà parti.

    Même s’il avait l’apparence d’un petit chien de compagnie, Heeseong avait grandi parmi des éleveurs de chiens de combat liés au crime organisé. Autant dire que personne n’osait l’embêter sans en subir les conséquences.

    Est-ce pour cela que je suis sensible au contact physique ?

    Heeseong réalisa quelque chose de nouveau à propos de lui-même.

    Les harcèlements qu’il avait subis dans la maison de jeux l’avaient rendu particulièrement sensible au toucher. Sans y réfléchir, il s’était emporté contre Yoon Chi-young, qui l’avait mordu.

    « C’est un soulagement. »

    C’est alors que la voix douce de Yoon Chi-young se fit entendre. Levant les yeux, Heeseong croisa son regard alors qu’il caressait doucement le cou du chiot avec un doigt.

    « Cela aurait été légèrement décevant si j’étais le seul inexpérimenté. »

    Tu…  ?

    Le doute devait être évident dans les yeux sombres du chiot, car Heeseong inclina involontairement la tête—un geste que Yoon Chi-young trouva adorable. Ce dernier esquissa un large sourire, les coins de sa bouche se relevant avant qu’il n’enlace le chiot.

    Pris au dépourvu dans cette étreinte soudaine, Heeseong écarquilla les yeux, incrédule.

    Que devenait donc cet homme raffiné de la tribu des loups, celui qui s’était fait mordre au bras ?

    D’autant plus que cet homme semblait craindre Yoon Chi-young. Il était si bouleversé qu’il ne parvenait même plus à contrôler ses émotions, laissant transparaître ses oreilles et sa queue, incapable d’établir un véritable contact visuel.

    Serait-ce possible…  ? Est-ce qu’il essaie de me séduire pour m’attirer dans son lit ? 

    C’était plausible. Yoon Chi-young avait un visage séduisant, une stature imposante pour un homme, et un charme indéniable.

    De plus, les rumeurs ne naissent jamais de rien. D’après l’expérience de Heeseong à la maison de jeux, celles qui semblaient les plus probables étaient souvent fausses, tandis que celles qui paraissaient absurdes se révélaient, bien souvent, être la vérité.

    Donc, les rumeurs sur le loup cannibale pourraient être vraies.

    Étrangement pourtant, Heeseong ne ressentait plus aucune peur envers Yoon Chi-young.

    Le fixant droit dans les yeux, il osa même poser effrontément sa joue contre son torse.

    … Non, il a dit qu’il ne me mangerait pas.

    L’espace d’un instant, il se surprit à se voir comme un simple petit chien hors de danger… Mais puisqu’il savait que Yoon Chi-young n’était pas un menteur, il se sentit aussitôt rassuré.

    Et à bien y réfléchir, un loup cannibale valait peut-être mieux qu’une sœur qui méprisait sa propre famille par pur élitisme.

    Si Heeseong avait eu une véritable famille, jamais il ne l’aurait traitée avec dédain.


    ・.ʚ Voilà la fin du chapitre ɞ .・

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