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    Finalement, Wooyeon s’était retrouvé, sans vraiment pouvoir y échapper, à promettre de participer à une session de révision. Une première fois en choisissant le lieu, une autre en mangeant des tteokbokki… Il avait bien eu le pressentiment que quelque chose clochait. Mais il était trop tard pour faire marche arrière : on ne ramasse pas l’eau déjà renversée.

    « Alors, aujourd’hui, faisons ça chez Wooyeon. »

    Et pour ne rien arranger, il avait fini — sans trop savoir comment — par proposer sa propre maison comme lieu de révision. La salle du club était déjà prise par d’autres membres, les salles d’étude affichaient complet, et aucun des autres n’était en mesure de les accueillir.

    Seongyu vivait avec ses parents, et Garam avait expliqué que son studio était trop petit. Wooyeon avait protesté, à moitié avec une arrière-pensée.

    « … Et toi, sunbae ? »

    Dohyun avait répondu avec une expression un peu plus douce. D’ordinaire, il vivait seul, mais son petit frère était chez lui en ce moment. Sans trop réfléchir, Wooyeon lui avait demandé si ce dernier était aussi un Alpha — et la réponse l’avait laissé sans voix.

    « Dans ma famille, je suis le seul Alpha. »

    Les traits particuliers se transmettaient généralement entre individus du même type. Tout comme Wooyeon était né d’un Alpha et d’un Oméga, Dohyun aurait dû l’être aussi. Ce constat, aussi évident soit-il, le frustra soudainement : je ne sais presque rien de lui.

    « Je vais procéder à l’appel. »

    Sans qu’il s’en rende compte, le professeur s’était approché du pupitre. Balayant l’amphithéâtre du regard, il passa naturellement le nom de Kang Junseong. Lorsqu’il atteignit ceux commençant par « Kwon », une main se leva aussitôt.

    « Professeur, je suis là. »

    Wooyeon tourna instinctivement la tête dans cette direction. La voix lui était familière, mais cette nuque d’un blond éclatant lui était totalement étrangère. Évidemment, ce n’est pas lui. C’est au moment où il s’apprêtait à détourner les yeux…

    « Kang Junseong ? Bien. Ta blessure, ça va mieux ? »

    « Elle est complètement guérie maintenant. »

    Kang Junseong tourna la tête. Wooyeon inspira profondément, le visage soudain figé. Un visage qu’il ne pourrait jamais oublier s’imposa violemment dans son champ de vision.

    Ce gros porc.

    Pourquoi les mauvais pressentiments ne se trompent-ils jamais ? Pourquoi cette putain de malédiction vient-elle toujours me tomber dessus, sans jamais rater son coup ?

    Cette voix qui lui lançait des injures, cette bouche constamment tordue en un rictus moqueur, ce regard rempli de mépris. Tout ça le poussait au bord du précipice.

    Yeonie, n’est qu’un sale idiot.

    Wooyeon enfonça ses ongles dans sa paume, tentant de réguler son souffle saccadé. Des souvenirs lui revenaient, poisseux comme une boue qu’il n’arrivait pas à décoller. Son cœur battait d’un rythme désagréable, et ses phéromones frémissaient, troubles et mal contenus.

    « Seon Wooyeon. »

    C’était un souvenir impossible à effacer. Il n’avait pas été frappé, mais son cœur en était meurtri. On ne lui avait pas volé d’argent, mais on avait ruiné son esprit. S’il n’y avait pas eu Dohyun, cette période n’aurait été qu’un trou noir, totalement privé de lumière.

    « Seon Wooyeon n’est pas là ? »

    « Wooyeon, on t’appelle. »

    Des fragments de souvenirs jaillirent en désordre, comme une averse brutale. Wooyeon ne leva la main qu’après que son camarade, assis derrière lui, lui eut donné un coup de coude dans le dos. Au son de son « Oui », Junseong tourna la tête vers lui.

    « …  »

    « …  »

    Leurs regards se croisèrent, tranchants comme des rasoirs. Sa gorge le piqua, brûlante, comme s’il avait avalé une poignée d’aiguilles. Les souvenirs qui refaisaient surface tournaient en boucle dans sa tête, aussi nets que s’ils dataient d’hier.

    Putain, tu m’ignores encore ?

    À trois rangs de distance, à peine cinq pas en diagonale — son passé, celui qui l’avait harcelé, était assis là, bien réel. Il avait décoloré ses cheveux en jaune et ses traits s’étaient durcis, mais Wooyeon le reconnaissait sans l’ombre d’un doute : c’était bel et bien le « Kang Junseong » dont il se souvenait.

    « Bon, où en étions-nous la dernière fois ? »

    Wooyeon parvint difficilement à détourner la tête et posa son menton dans sa main. Il n’eut même pas le temps de s’étonner que Junseong n’ait pas baissé les yeux. Peu après, ce dernier détourna enfin le regard, et Wooyeon put relâcher, avec peine, le souffle qu’il retenait.

    Durant tout le cours, il fut incapable de prendre des notes correctement. L’idée qu’un type comme lui ait pu obtenir les résultats pour intégrer cette fac le rongeait. Sa rancune contre ce hasard absurde prenait toute la place. Quelle était la probabilité qu’ils se retrouvent dans la même université, certes dans des filières différentes, mais dans le même cours optionnel ?

    « Le partiel sera remplacé par un projet de groupe. Les groupes ont été formés aléatoirement, donc inutile de demander à changer. »

    Wooyeon n’écoutait déjà plus depuis un moment. Il mordait l’intérieur de sa joue et avalait sa salive à répétition. Junseong, lui, chuchotait avec entrain à son voisin, le téléphone à la main, comme si tout allait bien.

    Il ne se souvient même pas…

    Le seul réconfort auquel Wooyeon pouvait se raccrocher, c’était l’idée que Junseong ne le reconnaîtrait pas. Il avait grandi, avait perdu du poids, s’était teint les cheveux, et ne portait plus de lunettes. Même sa propre mère aurait eu du mal à le reconnaître dans cet état — alors Junseong n’avait absolument aucune chance.

    Même les profs ne m’ont pas reconnu…

    Il posa la main sur sa poitrine pour calmer sa respiration agitée. Ce n’était pas un petit séminaire, mais un cours optionnel de grande capacité, réputé pour sa popularité. Il suffisait de tenir trois mois. Trois mois à garder le profil bas, sans faire de vagues. À moins de se retrouver dans le même groupe, les occasions de croiser Junseong resteraient minimes.

    « Pour fin avril, vous développerez une invention adaptée à l’ère globale. Pas besoin de la fabriquer, mais elle doit rester réaliste. Vous devrez rendre un PowerPoint pour la présentation, ainsi qu’un rapport écrit. »

    Wooyeon se força à recentrer son attention sur le professeur. Celui-ci consulta ensuite la liste des groupes et commença à appeler les noms. Kang Junseong fut cité en premier, suivi d’un « Kwon », puis de deux « Kim ». Mais le problème surgit avec le dernier nom.

    « Seon Wooyeon, vous complétez le Groupe 1. »

    Wooyeon leva la main, la stupeur peinte sur le visage. Le professeur s’interrompit et lui fit signe de parler. Il repoussa sa chaise et se leva, aussitôt fusillé du regard par toute la salle.

    « Je suis Seon Wooyeon, département de littérature anglaise. Je… Je crois qu’il y a une erreur dans l’appel. »

    Tous les noms précédents commençaient par « K », et le sien, en « S », semblait avoir été greffé là sans logique. Peut-être y avait-il eu une confusion ? Mais le professeur secoua doucement la tête, arborant un sourire indulgent.

    « Les quatre premiers ont été répartis selon l’ordre alphabétique, et j’ai ensuite ajouté un étudiant en lettres aléatoirement à chaque groupe. Vous êtes bien dans le Groupe 1. »

    Wooyeon cligna des yeux, abasourdi. Aléatoirement ? Mais pourquoi faire ça ?

    Il bouillait intérieurement à l’idée de contester, mais le professeur poursuivit d’un ton parfaitement serein :

    « Ah, et puisque j’y pense, il y aura un bonus si la présentation est faite en langue étrangère. Ce n’est pas obligatoire — si un autre membre du groupe est plus à l’aise, il peut s’en charger. »

    Le professeur lui demanda s’il avait d’autres questions. Wooyeon bredouilla un « non », les épaules crispées, et se rassit lentement. Les regards revinrent vers l’estrade, dissipant la tension.

    « Le Groupe 2 est composé de…  »

    Pendant que les groupes 2 et 3 étaient annoncés, Wooyeon garda la tête baissée, l’esprit en ébullition. Ce n’était pas une simple coïncidence : il y avait une logique derrière tout ça, et c’était justement ce qui le rendait impuissant. Il aurait voulu demander un changement de groupe, mais le professeur avait été clair plus tôt : aucun changement possible.

    « Le temps restant est à consacrer à la désignation d’un chef de groupe. Une fois choisi, informez l’assistant. »

    Sur ces mots, le professeur quitta l’amphithéâtre. Un assistant entra alors pour calmer l’agitation générale. Submergé par une envie violente de fuir cet espace clos, Wooyeon ferma brièvement les yeux.

    Putain…

    Il ne trouvait aucune solution. Son estomac se retournait de dégoût. Comment est-ce qu’on en est arrivé là ? Une suite absurde de coïncidences s’était métamorphosée en un destin cruel qui le serrait à la gorge.

    « C’est toi, Seon Wooyeon ? »

    Wooyeon leva les yeux, le visage soigneusement neutre. Kang Junseong se tenait là, juste devant lui. L’idée de faire semblant de ne pas comprendre, de rester dans l’ombre, lui traversa l’esprit. Mais une mauvaise note serait tout aussi problématique.

    « Avec toi, on est cinq dans le Groupe 1. »

    Junseong était accompagné de visages inconnus. Assis nonchalamment sur un bureau, il affichait un sourire faussement chaleureux, à en donner la nausée.

    « Kang Junseong, première année en Génie des Télécommunications. T’as l’air nouveau toi aussi — t’as 20 ans, non ? »

    Il ne le reconnaissait vraiment pas. Le fait qu’il commence par se présenter, comme Dohyun l’avait fait, ne laissait aucun doute. Devant le silence de Wooyeon, son visage se crispa légèrement, mal à l’aise.

    « … T’es peut-être un aîné ? »

    Wooyeon étouffa un rire amer et poussa un soupir. Autrefois, ce même silence aurait suffi à provoquer une pluie d’insultes. Mais aujourd’hui, Junseong utilisait un langage poli. C’était risible, absurde… Et désespérément vide de sens.

    « Non, je suis en première année. »

    Il répondit d’un ton parfaitement détaché. Le visage de Junseong s’illumina aussitôt, soulagé de constater que tous les membres du groupe étaient des nouveaux. Une légère odeur d’Alpha émanait de lui.

    « Ouf, j’ai cru que j’avais fait une connerie. »

    Espèce de merdeux même pas capable de maîtriser tes phéromones.

    Sa voix amicale s’écrasa contre les hurlements du passé dans l’esprit de Wooyeon. Il ravala son dégoût, se souvenant avec amertume de la fierté qu’il tirait autrefois de son propre statut d’Alpha.

    « Bon, on devrait commencer par choisir un chef de groupe…  »

    En troisième année de collège, Junseong s’amusait parfois à imprégner les affaires de Wooyeon de ses phéromones. Bien sûr, Wooyeon ne s’en rendait pas compte, et chaque fois qu’il utilisait ces objets, Junseong éclatait de rire à gorge déployée.

    « Crétin. Même pas foutu de sentir mes phéromones. »

    « … Pourquoi tu me regardes comme ça ? »

    Les traits génétiques n’étaient pas une échelle de valeur. Certains naissaient avec un grain de beauté, d’autres avec des cheveux frisés — ce n’étaient que des caractéristiques innées, rien de plus. Le petit cercle d’Alphas que Junseong avait formé à l’époque n’était qu’un jeu d’adolescents, un ridicule partage d’équipes.

    « Pour rien. »

    Wooyeon secoua la tête, l’âme écrasée. Une infime trace de phéromones flottait dans l’air, accrochée à ses narines. À l’époque, il ne pouvait pas les percevoir — il n’avait pas encore manifesté. Mais aujourd’hui, en tant qu’Oméga dominant, il savait. Celui qui traitait les autres comme du bétail avec condescendance… Kang Junseong était un Alpha secondaire.*

    « Mais toi… T’es vraiment beau. »

    Junseong se frotta la nuque avec gêne, les doigts glissant dans ses cheveux décolorés. Il expliqua qu’il l’avait pris pour une célébrité, que leur premier échange de regard l’avait totalement désarçonné. Une lueur d’émoi, à peine contenue, perçait dans ses yeux.

    « Et puis, ton odeur… Tes phéromones, elles sont incroyables. »

    Un rire moqueur monta aux lèvres de Wooyeon, aussitôt englouti par un sentiment de vide. Tandis que Junseong accumulait les compliments maladroits, ses joues se teintaient de rouge, comme celles d’un adolescent troublé. Ce regard-là, si étranger à ses souvenirs, ouvrait en lui une brèche béante.

    « Tu… T’es un dominant ? »

    « … Ouais. »

    Il retint de justesse un rictus amer. Tes phéromones sentent bon, vraiment ? Wooyeon baissa les yeux, ruminant ces mots comme une ironie cruelle.

    « Je suis bien un dominant. »

    Avant, tu disais que je puais.

    La phrase resta coincée au fond de sa gorge, tranchante, douloureuse, comme une arête qu’il n’arrivait pas à avaler.


    ・.ʚ Voilà la fin de cette deuxième partie du chapitre 4 ɞ .・

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